Le port de Beni Saf était un édifice public, il a été concédé à une compagnie privée pour 99 ans. Le décret du 14 juin 1876 avait permis d'une part et autorisé de l'autre à la compagnie des mines de Soumah et de la Tafna laquelle avait fait la demande pour construire ce port à ses propres frais, à ses risques et périls sans aucune aide, ni subvention, ni garantie de la part du gouvernement colonial de l'époque. Les travaux du port furent entrepris dès le début de l'année 1877 et terminés vers la fin de 1881. Ce port à ces premiers jours, a été baptisé « port de Marsa Sidi Ahmed », sa fonction principale était ouverte aux importations ou exportations avec l'Europe et plus particulièrement la France. Nous ne savons point à ce jour si nos ports actuels portent officiellement un nom celui de Beni Saf est appelé communément « El Marina » mais rare ceux qui connaissent son vrai nom d'antan. Le besoin de parler n'empêche pas seulement d'écouter, mais de voir, et dans ce cas l'absence de toute description du milieu extérieur est déjà une description d'un état interne. La superficie du bassin de ce port était de 17 ha, ce port a été construit à l'emplacement d'une ancienne lagune servant de confluent aux oueds Ahmed et Boukourdan. Il est situé au fond d'une baie très ouverte entre l'ile de Rachgoun et le Cap Figalo. Les deux jetées du port, celle de l'ouest mesure environ 875m et est coudée à angle droit et contient un chargeur flexible pour la manutention du minerai de fer, ce chargeur a été supprimé suite à son inactivité qui était due au tarissement du minerai de fer. La jetée Est mesure 300m et était réservée au commerce, elle était destinée aux navires de commerce aménagé pour embarquer entre autre le crin végétal, l'Alfa, le blé, le vin et autres agrumes et les conserves de poissons. Entre ces deux jetées une ouverture d'entrée de bateaux appelé la « passe » d'entrée mesurait 160m de longueur et a été récemment diminuée par une petite jetée d'une soixantaine de mètres afin de baliser le routage des bateaux. Le port de Beni Saf avait son propre outillage d'exploitation, mis à sa disposition par l'ex-compagnie à savoir : une vieille grue d'une force d'environ 40tonnes portée par un chaland et fonctionnait à la vapeur, un ber et un bateau dragueur nommé « Edouard de Billy » lequel maintenait régulièrement et continuellement la profondeur par le dragage dans le port et la passe à environ de 10m de profondeur car les alluvions déversées par la Tafna ayant tendance à combler ces derniers. Deux grosses bouées en matière ferreuse permettant aux minéraliers et autres bateaux de commerces de s'amarrer. Une cale sèche avait été conçue pour la mise à terre de sa drague et de ses différents chalands et de part et d'autres de la cale sèche deux petites plages sablonneuses permettant à la houle (vents du nord) de venir finir ses mauvais jours. Au vent du Nord, rien ne mord, et au vent d'Est le poisson fait la sieste La flottille de pêche de Beni Saf se composait à ses premiers débuts de chalutiers, de lamparos et de palangriers, l'industrie de la pèche avait pris un formidable élan, dès le début de l'exploitation du port, un véritable poumon économique. Il existait deux chantiers navals, les charpentiers de marine étaient tous originaire d'Espagne. La production de bateaux de pêche s'accroissait de jour en jour, mais devant l'insuffisance du bassin du port et l'exiguïté des quais, cette contrainte de l'incapacité du port limite ou plutôt freine cet accroissement. Le port a été construit spécialement pour l'embarquement du minerai de fer. Un projet d'aménagement pour le port de Beni Saf existait et ce depuis 1945 ; en 1952 un crédit de 700 millions 1iere tranche avait été inscrite au budget de l'assemblée Algérienne de l'époque coloniale, mais aucune suite n'a été donnée à ce projet. Si tu donnes un poisson à un pauvre il mangera un jour, mais si tu lui apprends à pêcher il mangera tous les jours Proverbe chinois Les premiers pêcheurs de Beni Saf étaient pour la plupart des pêcheurs d'origine espagnole, ils avaient ramené avec eux leurs arts et coutumes d'origine (espagnole) même le style du parler que les séquelles font partie de notre langage d'aujourd'hui, le Benisafien a son propre dialecte composé d'un cocktail d'arabe, français ,espagnol et berbère . Quand l'appât vaut plus cher que le poisson, il est inutile de pêcher Les styles de pêche les plus employés étaient la pêche au chalut, à la lampe et à la palangrotte : * le chalut : est un filet bleu en plastic trainé par un chalutier sa forme ressemble à un entonnoir prolongé à l'ouverture par des ailes pour servir à dilater la portée. On parle souvent de « chalutage en bœuf » venant de l'expression citant les bœufs qui tiraient la charrue. Le chalut est trainé par des câbles. Il est fermé à son extrémité par un cordage. Un système combiné de panneaux, de chaines (lest) et de lièges ou flotteurs plus techniques (dans le cas de la pêche dans les grands fonds) permet de maintenir béante son ouverture et d'en régler la forme et la profondeur. Aujourd'hui la pêche au chalut est remplacée par le chalut pélagique. Le chalut pélagique est un filet remorqué qui évolue en pleine eau, entre la surface et le fond, sans être en contact avec lui. Comme pour le chalutage de fond, il existe des chaluts pélagiques simples remorqués par un seul navire .Le chalut pélagique est, en général, beaucoup plus grand que le chalut de fond. Sa partie antérieure est faite de simples cordages ou de très grandes mailles, qui rabattent les bancs de poissons vers la partie postérieure du filet. Le chalut pélagique peut accroître les risques de surexploitation. Il ya aussi la pêche au filet à corde. *à la lampe : et on parle de pêche au lamparo mot espagnol « lámpara » signifiant lampe. La lampe utilisée pour cette pèche, elle éclairait avec de l'acétylène. Le poisson est attiré à la surface par la source lumineuse, le filet de type senne flottant dont on peut éventuellement refermer la ralingue de fond pour capter le poisson. Le lamparo d'hier a été remplacé par le « Galion » aujourd'hui. Dans l'ancien temps, on pêchait avec le filet appelé « Lamparo » puis vient la modernisation on inventa une série de filet appelé « Galion » nouvelle technique de pêcher qui a fait oublier « Lamparo ». Et au fur et à mesure du temps la modernisation prend place, et on inventa le filet à corde pour pêcher le poisson bleu à la place du «Galion » cette politique de pêche se faisait il y a plusieurs décennies et dans tout le bassin méditerranéen. Si ces filets portent préjudice à l'espèce marine, la CEE avait bien longtemps interdit ces filets. Par contre la réalité est tout autre, pourquoi le poisson se fait rare et la sardine se vend à 500 DA le Kg, la vérité avancée par les marins pécheurs dans le cadre privé populaire et officieux, est que les fonds marins ont été dévastés par la dynamite utilisée par des Armateurs qui ont oublié d'être avant tout des professionnels. * à la palangrotte : La palangrotte est un instrument de pêche mais aussi une technique de pêche, des longueurs de fil en nylon auxquels sont accrochés plusieurs hameçons On peut pêcher en tenant le fil à la main, ou en laissant le fil pendre à un morceau de liège. *Trémail : est un filet de pêche c'est aussi un outil de pêche passif permettant de capturer des poissons. Le filet est tendu verticalement dans l'eau et permet de capturer des poissons d'une taille précise grâce aux mailles dimensionnées pour retenir un poisson par la tête ou l'avant du corps. Chaque pêche et chaque espèce pêchée utilise un filet différent par sa couleur, sa taille, la grosseur de son cordage et la dimension de ses mailles. Le trémail est un filet calé sur le fond. Il est composé de trois nappes de filet aux mailles inégales, deux externes à grandes mailles, et une nappe interne, lâche à petites mailles dans lesquelles les poissons s'emmêlent après avoir passé le filet externe à plus grosses mailles. Les trémailleurs peuvent poser plusieurs trémails mis bout à bout pouvant constituer l'équivalent d'un filet de 10 km. Ils les relèvent toutes les 24 ou 48 heures. L'arrogant vend le poisson qui est encore en mer Le manque ou absence de statistiques ne nous permet pas d' illustrer avec exactitude l' apport annuel de poissons blancs et bleus suivant les différentes périodes allant depuis la création du port à ce jour pour mieux illustrer l'intérêt et l'avantage sinon le profit que ce port à avancer. Dès son arrivée le poisson, mis dans des casiers en bois avant il passait d'abord dans la pesée, un agent communal percevait les taxes pour le gouvernement colonial et pour la commune d'antan, ensuite il passait à la criée vente aux enchères aux mareyeurs qui le dispatchaient vers les contrées du pays. Il y avait aussi deux fabriques de glace à Beni Saf, une située sur le grand virage qui mène au marché de la ville dans un entrepôt de la compagnie Mokta, la seconde à Boukourdan , les deux fabriquaient des pains de glace de 25kg transportés par charrette jusqu'à la criée ou un concasseur manuel à manivelle permettait de les réduire en morceaux, ces pains de glace étaient utilisés aussi pour les frigos à des fins de rafraichissement . Le transport se faisait par camion contrairement à aujourd'hui où le camion frigo est exigé par la réglementation. Le poisson bleu était expédié mais une bonne partie était vendue sur place aux usines de salaisons et conserves à l'huile et à la tomate qui ont disparues de la sphère économique Benisafienne. Un jour viendra où il n'y aura plus d'autres champs de bataille que les marchés s'ouvrant au commerce et les esprits s'ouvrant aux idées. Naguère, le trafic commercial se faisait sur la jetée Est, jadis aussi, les exportations assez importantes portaient sur le crin végétal surtout vers l'Angleterre, les céréales et le vin, les salaisons et même les boites de conserves vers la France. Aujourd'hui le port est devenu un port uniquement de pêche, les usines de salaisons et de conserves ne font plus partie du décor, le poisson se fait rare malgré une flottille importante et modernes venues d'ailleurs. L'activité économique à Beni Saf n'est plus comme avant. Le port ne fournit plus comme avant des ressources pour la commune, ni d'activités prometteuses pour la nouvelle génération .Le port nécessite des aménagements importants mais aussi des idées encore plus importantes pour créer un pôle économique intégré de pèche allant de la production du petit hameçon en passant par tous les outillages ,articles et produits se rapportant à la pèche car la facture d'importation est devenue une recette facile qui détruit l'art de création et d'innovation d'un tissu créateur de valeur et d'emploi.