A la veille de la commémoration du 48ème anniversaire du recouvrement de la souveraineté, par les Algériens, sur les médias lourds que sont la radio et la télévision, nous nous sommes approchés du directeur de Radio Bahia FM, M. Fayçal Haffaf, qui a bien voulu se confier à Réflexion Un geste d'autant plus appréciable étant donné que M. Haffaf, qui venait de perdre son père, a bien surmonté sa douleur pour se consacrer à l'organisation de la célébration de l'événement et trouver le temps de nous accueillir avec la plus grande amabilité dans son bureau. Une commémoration qui revêt une importance particulière pour M. Haffaf, qui, à peine sorti de l'adolescence, a embrassé la carrière de journaliste. Il se remémore les conditions pénibles dans lesquelles se faisait le journal « El Djomhouria », mais pas seulement. Il rappelle aussi les moyens dérisoires dont disposait la radio oranaise, l'une des premières en Algérie, qui avait été abandonné suite au départ massif des occupants français qui la dirigeaient et qui croyaient qu'elle n'émettrait plus jamais en leur absence. A cette occasion, M. Haffaf rend un vibrant hommage aux quelques Algériens qui avaient, très rapidement relevé le défi, en se jurant que Radio Oran ne cessera jamais d'émettre. Ceci, grâce un petit groupe composé notamment de Ali Aoufi, Mohamed Sahraoui et les regrettés, Hachemi Hantez, Hamid Benzerga et Harraztz Djilali qu'on vient récemment de perdre. « Ces hommes, qui étaient tenus complètement à l'écart des studios, vivaient réussi à arracher le savoir-faire, et remettre en marche la radio. Je dois dire que le regretté Hamid Benzerga, cousin germain du regretté chanteur-compositeur Abdelhamid Benzerga, employé alors comme simple garçon de course, avait été « sommé » par ses compagnons de se « débrouiller » comme il pouvait et tenir la barre technique. C'est ce qu'il fit, et cela marchera pendant des années. » Un véritable exploit réalisé par une équipe dont le nombre se compte sur les doigts d'une seule main. Radio Oran ne s'était pas tue, contrairement à ce que pensaient les techniciens européens qui, à travers leur bras armé, l'OAS, voulaient plonger Oran, et toute l'Algérie dans le chaos. A ce propos, M. Haffaf a déclaré «depuis, le flambeau, repris de belle manière, continue de briller de toute sa flamme. L'Algérie a formé ses propres techniciens dans tous les domaines, aussi à la radio qu'à la télévision, ce qui nous incite au grand respect des hommes de 1962. » Il a ajouté que : « eu égard aux moyens techniques sophistiqués dont nous disposons actuellement, nous sommes condamnés à réussir, d'atteindre les plus grandes performances. » « Réussir est le meilleur hommage que nous puissions rendre à tous ses pionniers, et c'est la meilleure épitaphe que nous pourrons leur dédier. » A encore déclaré notre interlocuteur. « Radio Oran a été créée en 1952 au sous-sol de l'actuelle Marché ex Michelet, au centre-ville. C'est l'une des plus anciennes radios avec celles d'Alger, Constantine et Béchar. De nouveaux équipements sont installés au rez-de-chaussée de la cité ex Perret, du boulevard Mouloud Feraoun, avec un studio de télévision régional qui émettait le soir deux ou trois heures par jour, en noir et blanc, bien sûr. Une émission destinée au public « indigène » était programmée une fois par semaine et que très peu d'autochtones avaient le privilège de regarder- le téléviseur étant à l'époque un produit de grand luxe inaccessible à l'écrasante majorité des familles algériennes. C'était généralement des émissions de variétés placées sous haute surveillance de manière à éviter que quelconques messages patriotiques politiques puissent être glissés à l'intérieur d'une chanson, d'un sketch… Mais certaines allusions au colonialisme, à gloire de la guerre de libération, glissées avec la grande subtilité dont faisaient preuve les artistes nationalistes, parvenaient quand même aux téléspectateurs avisés qui s'ingéniaient à chercher toujours un message derrière le plus anodin des spectacles humoristique. M. Haffaf n'a pas manqué d'évoquer la mémoire du regretté Aïssa Messaoudi, dont la place faisant face au siège de la radio et la télévision d'Oran porte le nom. « C'était le speaker dont la voix galvanisait les auditeurs algériens durant la période coloniale à son déclin. Il savait trouver les mots simples qu'il martelait savamment de manière à nourrir l'espoir de la population algérienne qui subissait les exactions des militaires français et des criminels de l'OAS qui ont redoublé de sauvagerie à l'approche de la date fatidique du cessez-le feu, qui était le prélude à l'indépendance. » La voix immortelle du regretté Aïssa Messaoudi, aidait les Algériens, l'oreille collée contre leur poste mis en sourdine, à leur insuffler le courage de surmonter leurs souffrances quotidiennes, sans pour autant se résigner sur le sort. La voix d'Aïssa Messaoudi, qui sortait des fins fonds des montagnes d'Algérie « frappait » avec la force d'un bataillon, d'une division de l'armée coloniale.