Les 3.000 dinars que les pouvoirs publics ont décidé de mettre dans les poches, déjà trouées, des «smicards» algériens, au-delà de leur impact quasi-nul sur le pouvoir d'achat des ménages, constitue presque un non événement. De fait, la tripartite n'a servi qu'à entériner une décision encore une fois venue «d'en haut», comme au bon vieux temps. Les partenaires de la tripartite se sont tous félicités- la finissante UGTA en premier- de cet «acquis social résultat d'une âpre négociation». Il n'en fut rien, en réalité. Ce genre de déclaration servant tout juste de feuille de vigne pour cacher- mal d'ailleurs- la position peu enviable de la Centrale syndicale qui a divorcé définitivement avec sa fonction originelle qui est de se soucier du pouvoir d'achat des travailleurs. Faut-il préciser que les 3.000 dinars qu'a, prétendument, accouchés cette tripartie ont été déjà budgétisés et adoptés dans le cadre de la loi de Finances 2010, intervenue deux jours avant ce grand rendez-vous ? En d'autres termes, la réévaluation du Salaire national minimum garanti (SNMG), qui entrera en vigueur le 1er janvier 2010, a été officialisée et endossée à l'APN avant qu'elle ne soit annoncée en grande pompe à l'issue de la tripartite. Les responsables de l'UGTA voulaient tromper le monde du travail en annonçant, la veille de la tripartite, qu'ils allaient proposer trois variantes d'augmentation du SNMG qui sont 15.000, 16.000 et 18.000 dinars et que ses représentants vont tenter de défendre devant le Premier ministre et les patrons. Ils feignaient d'ignorer que la loi de Finances, adoptée la veille, prévoyait noir sur blanc les 3.000 dinars consentis par le trésor public. Au-delà de ce marché de dupes, faut-il souligner que cette augmentation ne sera pratiquement d'aucun secours pour les ménages tant l'inflation vertigineuse a déjà «bouffé» ces quelques dinars de plus ? En effet, un simple coup d'œil à la mercuriale renseigne que les prix des fruits et légumes supposent un SMIG d'au moins le double. C'est, d'ailleurs, à cette conclusion qu'a abouti une étude commandée par l'UGTA et annoncée jeudi à la radio par Abdelkader Malki. Pourquoi donc se féliciter d'un SMIG politique qui est très loin des exigences d'un marché pris de folie ? Encore que cette amélioration du SNMG ne profitera pas à tout le monde. On sera loin des 4 millions d'Algériens bénéficiaires, annoncés jeudi par Ahmed Ouyahia. Selon le Premier ministre, cette augmentation va toucher 500.000 salariés du secteur public économique, 1,6 million de fonctionnaires et 1,8 million de retraités. Il ne dira pas comment? Il va falloir attendre les longues et fastidieuses conventions de branches pour voir, enfin, les travailleurs des secteurs économiques tirer, éventuellement, profit d'une hausse qui sera à ce moment-là largement dépassée. Absente de toutes les luttes sociales, et prisonnière d'un pacte social, interdisant les grèves, qu'elle a signé, l'UGTA s'est empressée de brandir cette évaluation du SNMG comme son trophée de guerre. Pour son rôle de syndicat politique qui sait se taire quand la rue gronde, la centrale de Sidi Saïd a été gratifiée, encore une fois, à l'occasion de cette tripartite du statut usurpé d'unique représentant syndical à ce genre de négociations. C'était peut-être cela le véritable objet de cette tripartite aux allures de monologue.