La chaîne de télévision arabe basée à Qatar, Al-Jazeera, qui détient le taux d'audition le plus élevé dans le monde arabe avec plus de 70 millions de téléspectateurs, un réseau de 100 correspondants et directeurs de bureaux à travers le monde, est depuis le 25 janvier dernier au centre d'une instante polémique auprès de certains dirigeants Arabes. Accusée de servir de porte voix aux révoltés et protestataires, et surtout d'appeler et inciter au renversement des régimes arabes pendant la Révolution égyptienne et les événements actuels en Libye, les fréquences d'Al-Jazeera ont été brouillées par des interférences à partir de la Jordanie. Chahutée à Tripoli au Caire, ses bureaux régionaux fermés au Maroc, en Tunisie, en Irak et par Moubarak avant sa chute, un refus d'ouvrir des bureaux en Algérie, en Arabie Saoudite, au Bahreïn, il ne reste pratiquement à El-Jazeera qu'un bureau à… Al Qods. Al Jazeera se défend par la voix de son directeur général, Ouaddah Khanfar, et par le journaliste, Fayçal Kacem, l'animateur de la fameuse émission «Al-Ittijah Al-Mouâkes». «Notre chaîne ne fait que son travail de professionnalisme, notre studio et nos caméras sont à la disposition du peuple et aussi des responsables et dirigeants. Seulement, il ne faut pas confondre Al-Jazeera, qui est une chaine indépendante et qui n'appartient à aucun Etat. Elle est basée à Qatar, comme elle pouvait être ailleurs. En cas d'abus, la solution consiste à recourir à la justice», a-t-il déclaré. Ahmed Mansour, un journaliste de nationalité égyptienne dira que, durant un temps record, il a rencontré de nombreux anciens dirigeants arabes, chefs d'Etat et chefs de gouvernement, dont Ahmed Benbella à l'occasion de plusieurs jours d'enregistrement dans «Témoin d'une époque». «Par contre, dira-t-il, d'autres responsables s'en sont pris à moi lors de l'interview et d'autres ont déclinés l'offre, préférant garder pour eux ce qu'ils ont vécu politiquement.» Khadîdja Benguena, journaliste algérienne et présentatrice du JT, d'Al-Jazeera, une ancienne de l'ENTV, dira: «Franchement le grand problème auquel est confrontée l'Algérie est celui de la communication. Les dirigeants algériens refusent de communiquer, alors que l'occasion leur a été offerte à plusieurs reprises. On a fait appel à eux à plusieurs occasions pour apporter la contradiction, mais ils ont décliné l'offre. Ils ne parlent pas et ne mesurent pas ce qu'ils ratent en refusant de faire connaitre leurs points de vue à des millions de téléspectateurs.» Sollicitée si elle pense qu'il y a plus de liberté à Al-Jazeera qu'à l'ENTV, elle répond : «On ne doit pas se mentir à soi même. Bien sûr que nous sommes plus libres en exerçant à Al-Jazeera. Je n'ai jamais subi, en tant que présentatrice, des pressions de quiconque. Personne ne m'a jamais demandé de ne pas poser telle ou telle question ni de ne pas recevoir sur le plateau une telle autre personnalité. Mais on doit tenir compte du fait qu'à travers le monde, il n'existe pas de journalisme professionnel exercé dans une liberté absolue.» «Al-Jazeera» a bien déposé une demande d'ouverture d'une antenne régionale maghrébine, à Alger, bien avant France-24. Elle n'a toujours pas reçu de réponse positive, alors que France-24 a obtenu le ok des autorités en un temps record», conclut le directeur de l'information.