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Transition et représentation : efficacité ou finalité
Publié dans AlgerieNetwork le 14 - 00 - 2019

« Je plains l'homme qui ne sent pas le fouet quand c'est le dos d'un autre qui est frappé » Abraham Lincoln
Les révolutions modernes ont souvent été accompagnées d'écrits, de réflexions, d'analyses, de propositions, de débats et de rencontres citoyennes. Dans toutes les révolutions, il a été question de « transition » et de « représentation » « démocratiques ». Chez nous, ces termes se retrouvent la plupart du temps dans les réseaux sociaux, mais ils ne sont ni expliqués ni analysés. Chacun y va de son sentiment et naïvement ou de façon pernicieuse des personnalités sont « désignées » pour représenter le mouvement citoyen, personnalités à qui on donne déjà des rôles dans la « transition » « démocratique ».
La démocratie a un support, c'est les urnes et les règles. Dans notre cas de figure, exit les urnes et exit les règles. Il suffit d'avoir Photoshop et voila ! Vite fait, bien fait ! C'est un petit peu une façon inversée de faire pire que ce système que nous voulons dégager.
Admettons que nous acceptons d'aller dans ce sens, quels sont les critères qui nous permettraient de choisir celui qui va être président et celui qui va être un simple membre. Avant d'aller plus loin, dans cette liste il manque toujours deux postes : le porte parole et le secrétaire. Autrement dit point de traçabilité et de partage d'information ou pour faire pompeux pas de communication. On peut supposer cependant que YouTube fera l'affaire et que les réseaux sociaux seront là pour diffuser en Live des communiqués « Urgent » qui n'ont d'urgent que la bêtise qui est transmise et qui participent de l'effort global d'intoxication et de propagande que nous subissons.
Dans la démarche suggérée, il n'y a pas de charte, pas de projet, pas de date, pas de lieu, pas de comment, pas d'étape, pas de processus. A l'efficacité on opte pour la finalité. Qu'importe les moyens, la fin justifie tout et pour ajouter de l'importance à ça on enveloppe l'image par « le peuple a choisi ». Choisi quoi ? Une société libérale ou socialiste, musulmane ou religieuse, Avec des mâles dominants ou une société équilibrée avec des droits égaux aux femmes et aux hommes ? Un pouvoir présidentiel ou parlementaire ? Des partis classiques : droite, gauche, centre ou des partis qui s'étalent de la gauche à la religion et du centre à la région ? Une constituante ou un collège d'expert ? Négocier ou pas ? Yatnahaw Ga3 ou pas ?
A l'évidence les choses ne sont pas simples et ceux qui sont placardés ça et là ne nous aident pas pour bien comprendre. Un « représentant » désigné nous raconte par YouTube interposé quel a été son parcours, surtout intellectuel, alors que nous avons besoin de savoir quelle est sa vision de l'Algerie pour les 50 ans à venir, comment qu'il compte procéder, sur quelles forces il compte s'appuyer, quelles sont les étapes clés de son projet et surtout s'il accepterait que des gens du peuple viennent l'auditer dans son patrimoine pour valider son intégrité et son honnêteté. Un « autre », qui a eu souvent un temps de passage dans la chaîne Ennahar se voit propulsé comme « représentant » malgré ses « accointances » avec cette chaîne contestée et contestable.
Critiquer le régime ça ne doit pas être une carte de crédit utilisable en tout temps et en tout lieu et ce n'est pas en surfant sur la vague qu'on va apporter un plus dans le changement de ce système mais en décortiquant d'abord les lois pour identifier les aspects pernicieux, bloquants, insuffisants ou mal écrits de certains articles. C'est très facile de dire à ses sympathisants par Facebook interposé que vous allez être à la grande poste à 11 h 30, d'arriver à l'heure fixée et au lieu désigné et de faire un discours violent mais populiste à des personnes qui vous sont vouées corps et âme et de se faire filmer comme si c'était « par hasard », spontané. Des jeunes passent la nuit dans certains parcs et jardins pour aller manifester le lendemain pour une Algerie différente qui ne soit pas fondée sur le vice et la ruse. Des jeunes qui s'excusent « d'être jeunes » et qui parfois relaient aussi cette idée de représentants avec à l'appui des noms dont ils ne connaissent rien.
Certains représentants ont tout : une aisance financière, des biens importants, des réseaux profonds dans le système et en face des jeunes qui n'ont rien, pas de boulot, pas de maison, pas de femme, pas de perspectives, parfois même pas une carte de métro et qui souvent ne mangent que des omelettes frites ou pour les plus heureux des plats de « chawarma ». Ces jeunes nous les voyons dans les marches, heureux de chanter la révolution, courageux devant les jets d'eau et les gaz lacrymogènes, qui ont marché parfois des kilomètres sans le sou. Ils ne savent pas que déjà « le fleuve a été détourné » en 1963, en 1980, en 1988 et en 2001 et qu'il risque encore une fois d'être détourné.
Ont-ils des solutions, ces jeunes ? Que leur propose-t-on ?
Pour le régime, la solution c'est la convocation du corps électoral.
Le processus est lancé depuis le 09 Avril 2019 puisque c'est à cette date que Bensalah a convoqué le corps électoral pour le 4 juillet 2019. Pendant 45 jours les candidats vont recueillir les parrainages, déposer le 23 mai 2019 leur dossier, attendre 10 jours pour la validation de leur candidature, soit le 2 juin 2019 et passer à la campagne électorale qui va se dérouler sur 30 jours. Le 4 Juillet 2019, jour décisif, les Algériens iront soit voter soit boycotter les urnes.
Pour les opposants au régime, c'est la transition démocratique avec pour certains une variante incluant « la constituante » comme les tunisiens, variante qui est constante depuis plusieurs années chez le FFS et pour d'autres une participation à l'élection malgré les aléas et les dysfonctionnements des lois en vigueur.
Si l'on sait ce que c'est qu'une élection, pour la transition ce n'est pas évident, car malgré une définition acceptable telle que proposée par le site www.toupie.org, qui rappelle qu'une « “transition démocratique” est un processus politique qui permet un passage progressif d'un régime dictatorial à une démocratie », la transition « peut prendre des formes très différentes selon les pays et se dérouler en général sur plusieurs années. S'il s'agit d'une junte militaire, celle-ci peut négocier son immunité avant de céder le pouvoir ». La phase de transition politique, qui correspond au passage d'un régime à l'autre, s'achève avec l'arrivée au pouvoir d'un gouvernement et d'une assemblée législative résultant d'une élection libre et disposant d'un pouvoir souverain. Elle est généralement suivie d'une phase de consolidation de la démocratie pour en assurer la stabilité. Parmi les facteurs pouvant favoriser le déroulement d'une transition démocratique et assurer le succès, on peut citer :
* le niveau de développement du pays,
* l'expérience d'un régime démocratique antérieur à la dictature. »
Retenons pour le moment que c'est un passage progressif qui peut se dérouler sur plusieurs années et que pour passer à la transition les tenants du pouvoir auront besoin de négocier leur immunité avant de céder le pouvoir.
Combien de temps sommes nous capables de supporter cette transition et comment les représentants comptent ils procéder pour trouver les voies consensuelles ? L'économie étant en difficulté a-t-on actuellement des solutions pour mener un processus politique à son terme, de façon pacifique et efficace, tout en maintenant une économie « agonisante » ou faut-il tout inventer ?
La rue maintient son forcing et devient de plus en plus précise dans ses revendications, sauf que ses revendications posent un problème. Il y a comme une confusion, nous ne savons pas s'il faut toucher le moteur ou ses supports, si on doit enlever la boite à vitesse ou les roues, ou si on doit tout jeter à la poubelle, sans recyclage possible. Mais avant il faut avoir les clés du garage. Et c'est là que ça se complique. Mis à part le fait que l'on ne sait pas ou se trouve le garage on ne sait pas aussi ou se trouve la clé et surtout nous ne savons pas qui la détient.
On est à vrai dire en face d'un dilemme sérieux. Mis à part nos manifestations grandioses du vendredi et accessoires les autres jours, les voies que nous sommes entrain de choisir semblent assez naïves car déjà nous sommes divisés dans les approches bien que d'accord sur l'essentiel. Mais est ce que demander le changement du système veut surtout dire « Yatnahaw Ga3 » ? Autrement dit est-il évident d'aller vers une solution sans avoir identifié le problème.
Les spécialistes du management vous diront que pour chaque problème, il faut se poser les questions suivantes lorsque nous voulons aboutir au changement : 1. Le changement est-il nécessaire ? 2. le changement est-il possible ? 3. Quels changements sont possibles ? 4. Quel est le changement optimum ou consensuel ? Toute problématique a besoin de réflexion or dans notre cas de figure le débat n'existe pas, tout au moins il y a des prises de paroles parfois séduisantes mais inopérantes. Je remarque ce vide souvent lorsque je veux analyser mes statistiques de publications : sur 1000 vues, je trouve 2 commentaires. Ça veut dire peut être que ce n'est pas en rapport, que c'est tendancieux, que c'est compliqué ou que les analyses n'intéressent pas ou personne.
Enfin et c'est juste une proposition : pourquoi au lieu de dire « Yetnahaw Ga3 » on ne dit pas « Nedokhlou Ga3 ». Ainsi chacun se chargera d'une tâche : Les juristes du diagnostic des lois, les médecins du diagnostic des hôpitaux, les juges du système judiciaire, pénal et du système pénitentiaire, les hommes d'affaires du système fiscal, des douanes, de la réglementation des marchés publics, Les jeunes de l'ANSEJ, de l'ANEM et de la DAS.. et les experts de l'assistance a ces corporations pour les aider dans la démarche de diagnostic, de la formulation des problèmes et des propositions de solutions. Quand aux jeunes on peut imaginer de les intégrer, surtout les universitaires, dans tous les dossiers de ces corporations. Les autres jeunes et même les seniors, on réfléchira à leur proposer immédiatement des solutions qui pourraient inclure de grands travaux même si pour cela on doit s'endetter, car l'endettement n'est pas un danger c'est plutôt son utilisation dont il faut s'en méfier comme d'ailleurs la planche à billet qui est utilisé pour le payement des fonctionnaires et certains projets « d'amis » au système.
Mourad Boukhelifa
Homme politique, Expert Software Développer, Politologue


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