ALGER- Halim Faidi, architecte-urbaniste, à la tête de l'un des plus renommés cabinets d'architecture sur la place d'Alger, estime que l'exécutif doit repenser la ville, revoir sa copie en matière de production de logements. M. Faidi, qui a co-réalisé le plan du nouveau siège du ministère des Affaires étrangères et conçu l'aménagement des anciennes Galeries d'Alger en un Musée d'Art moderne, connu désormais sous l'abréviation (MaMa), donne à l'APS sa vision de l'urbanisme. APS : Quel constat faites-vous de l'urbanisme en Algérie ? M. Faidi : Le même que celui qu'ont affiché les autorités, c'est-à-dire alarmant. Et c'est un vrai sujet de satisfaction pour l'Architecte que je suis de savoir que nos préoccupations et celles de l'état sont les mêmes. Pour le constat, il me semble que la question de l'urgence conjuguée à la période de la décennie noire ont généré des pratiques non maîtrisées qui ont donné le déficit actuel en matière 'urbanisme. Bachdjerrah est une banlieue de Kouba, en pleine capitale et les conditions de vie y sont proches des conditions de vies d'une ''favella'' brésilienne. Bab ezzouar, après la catastrophe connue des cités des années 1980, voila qu'on est reparti de plus belle avec des opérations AADL qui génèrent déjà au bout de trois ans d'existence toutes les tares des grands ensembles. Pareil pour la nouvelle ville de Constantine, etc... Il y a absence totale de la notion de ville dans ces quartiers. Rendons nous compte que nous avons acheté des solutions froides de logements en privilégiant des typologies que leurs propres inventeurs occidentaux implosent sous nos yeux, en direct à la télévision. APS : Quelles sont les solutions que vous préconisez pour remédier à cette situation ? M. Faidi : Il faut admettre d'abord que si nous ne faisons rien, près de trois millions de logements vont se construire avec la même démarche que celle qui préside à ce jour, c'est-à-dire que nous risquons de produire trois millions d'HLM, améliorés pour certains et dégradés pour d'autres. Ce n'est pas le contenu de la promesse ni du contrat social. Les autorités sont plus que jamais conscientes de cet état de fait mais ont besoin de l'effort de tous pour redéfinir une démarche efficiente. Les solutions passent par la mise en place d'abord d'un cadre de concertation. Ce qui nous manque le plus c'est la vision partagée. Elle est la seul garante de stabilité et de développement. J'attends que les autorités nous confient des réflexions sur des projets urbains. Il nous manque également de nous inspirer de nos villes traditionnelles (Medinas, ksours). Je dis qu'il est possible de faire mieux si nous faisons ensemble. Le projet de société en dépend, et il se place désormais sous la responsabilité de tous. APS : Que pensez-vous de l'organisation des assises nationales de l'urbanisme et pensez-vous qu'elles vont donner des résultats concrets ? M. Faidi : Sur le plan politique et la volonté d'une large réunion large, c'est un succès et je considère que c'est un véritable évènement. Sur ce qui peut en sortir, cela dépendra de l'exécutif et de sa capacité à lâcher certaines prérogatives et se montrer plus transparent dans les procédures. Je crois que cela est en chemin. J'attends par ailleurs un vrai courage politique de la part du ministère de l'Habitat et de l'Urbanisme pour que la forme, la procédure et la réglementation en place ne freinent pas les ambitions de développement auxquelles nous aspirons, ni le bien être futur que nous méritons.