CONSTANTINE - La première expérience algérienne en matière de collecte du patrimoine national immatériel, achevée depuis peu, est une réussite, a estimé un musicologue de Tlemcen, au cours d'une rencontre organisée à Constantine en marge de la 5ème édition du festival international du Malouf. M. Fayçal Benkalfat, membre de l'équipe qui vient de mettre au point la première anthologie des trois écoles de musique classique algérienne, a indiqué que cette expérience, qu'il juge "fabuleuse", a permis d'établir les fiches de quelque 2.000 pièces musicales du patrimoine classique algérien. "Le fait important dans cette expérience pionnière, effectuée dans quatre langues, est qu'elle sera incessamment lancée sur un portail Internet évolutif, ce qui permettra sa consultation et son enrichissement par tous ceux que cela intéresse", a révélé M. Benkalfat, notant à ce propos que même l'encyclopédie en ligne, Wikipédia, commence à s'intéresser à cette oeuvre. "Ce travail, mené pour la première fois dans l'histoire du pays, ponctuée par la mise au point d'une étude systémique du patrimoine musical classique de l'Algérie, vaut également par le processus qui a mené à son élaboration", a ajouté le conférencier, estimant que cela a permis aussi de révéler l'existence et la collecte, auprès de particuliers, de plus de 300 manuscrits "qui ont mené à l'identification de plus d'une centaine de poètes à l'origine d'£uvres considérées jusque-là comme étant anonymes". "Toute une pluie de manuscrits nous est tombée dans les mains au cours de notre travail de recherche", a souligné, à ce propos, M. Benkalfat, avant de rendre un hommage appuyé à Mustapha Abboura et Ghaouti Bouali, de Tlemcen, qui ont déjà entrepris, entre 1813 et 1920, un travail de transcription d'un grand nombre de pièces musicales du patrimoine classique de l'Algérie. "Le travail laissé par ces pionniers, sans doute le premier du genre dans tout le monde arabe, est l'équivalent d'un véritable trésor archéologique", a considéré ce musicologue. Au cours des débats qui ont abordé, entre autres questions, la situation actuelle de la musique classique algérienne, M. Benkelfat a affirmé que l'école du malouf de Constantine, considérée par certains comme "une école de 3ème zone", renferme aujourd'hui "près de 50 % des potentialités du pays dans le domaine de la musique dite andalouse". Le conférencier a relevé à ce sujet que Salim Fergani, fils aîné d'un des maîtres incontestés de ce genre musical, Hadj Mohamed-Tahar, "est l'un des meilleurs musiciens d'Algérie". Bon nombre de musiciens à Constantine, comme ailleurs dans le pays, "n'ont pas eu la reconnaissance qu'ils méritent, y compris la star internationale du raï, le king Khaled, dont l'immense talent n'a pas encore été estimé et exploité à sa juste valeur", a-t-il dit.