La Banque mondiale a émis jeudi de fortes inquiétudes sur les conséquences financières du coût du traitement du VIH/SIDA dans les pays de l'Afrique subsaharienne qui risquent de voir leurs budgets très lourdement grevés. Sur fond de ralentissement de la croissance économique mondiale, la BM exhorte les gouvernements africains et les bailleurs d'aide au développement à intensifier considérablement leurs efforts de prévention du VIH. ‘‘Si on ne parvient pas à réduire très fortement le nombre de nouvelles infections, les pays risquent, dans les années qui viennent, de ne pas être en mesure de maintenir les programmes de traitement destinés aux malades du VIH/SIDA'', prévient-elle. Après plusieurs décennies d'expansion, l'épidémie, qui a tué 30 millions de personnes et en a contaminé plus de 60 millions d'autres, marque aujourd'hui le pas, avec une stabilisation des taux de prévalence dans le monde, et en Afrique en particulier. Globalement, plus de 6 millions de personnes bénéficient actuellement de traitements qui leur permettent de survivre au SIDA, tandis que les financements mondiaux pour la lutte contre l'épidémie sont passés de 260 millions de dollars en 1996 à 15,9 milliards de dollars en 2009, a précisé cette institution financière internationale. ‘‘Mais les coûts des thérapies grimpent aujourd'hui en flèche et viennent grever encore davantage des finances publiques déjà mal en point'', ajoute-t-elle. Dans son nouveau rapport consacré aux aspects budgétaires du VIH/SIDA au Botswana, en Afrique du Sud, au Swaziland et en Ouganda, la BM avertit que l'instabilité grandissante de l'économie mondiale suscite de vives inquiétudes quant à la poursuite et au développement des programmes de traitement contre le SIDA dans les pays à faible revenu. A titre d'exemple, l'Ouganda est fortement tributaire (pour 85 %) des apports extérieurs pour financer l'ensemble de ses programmes de lutte contre le VIH/SIDA, dont la viabilité est de ce fait mise en péril. ‘‘Le financement à long terme de la lutte contre le VIH/SIDA constitue une question complexe, notamment parce que le coût du traitement des nouvelles infections s'étend sur plusieurs décennies'', explique Elizabeth Lule, co-auteur de ce nouveau rapport. Au Botswana, où environ 25% de la population des 15-49 ans est séropositive, le rapport prévoit que les coûts budgétaires de la lutte contre le VIH/SIDA culmineront à 3,5 % du PIB vers 2016, avant de reculer lentement à 3,3 % du PIB d'ici 2030 si le nombre de nouvelles infections diminue. Mais compte tenu du ralentissement progressif de l'apport des revenus miniers au PIB, la charge budgétaire représentée par le VIH/SIDA pourrait correspondre d'ici 2021 à plus de 12 % des recettes publiques. En Afrique du Sud, le VIH/SIDA a des conséquences considérables sur les finances publiques et sur la capacité du gouvernement à atteindre ses autres grands objectifs de politique sociale et de santé publique, note la BM. ‘‘En développant les programmes de prévention du VIH, l'Afrique du Sud est en mesure d'économiser 2.500 dollars pour chaque infection évitée'', indique Ruth Kagia, directrice des opérations de la BM pour le Botswana, l'Afrique du Sud et le Swaziland. Au Swaziland, les répercussions du VIH/SIDA sur le budget sont plus graves en raison de la baisse des recettes publiques et de la situation macroéconomique. Ces dernières années, ce pays, qui connaît le taux de prévalence du VIH le plus élevé du monde, a couvert 60 % des dépenses liées au VIH/SIDA sur ses ressources nationales. Mais ces dépenses sont en hausse et le Swaziland va devoir compter sur un accroissement des financements extérieurs pour pouvoir couvrir de tels besoins. En Ouganda, on estime que les coûts de la lutte contre le VIH/SIDA devraient dépasser les 3 % du PIB, tandis que les financements extérieurs ont contribué à environ 85 % de la totalité des dépenses consacrées à l'épidémie. Selon des estimations, le coût d'une nouvelle infection s'élève à environ 12 fois le PIB par habitant (5.900 dollars). ‘‘Les pays qui souffrent le plus du poids budgétaire que constitue le financement des programmes de lutte contre l'épidémie de VIH ne sont généralement pas ceux qui ont les taux de prévalence les plus élevés. Il s'agit des pays à faible revenu où le coût de chaque infection représente plusieurs fois le PIB par habitant et les ressources nationales sont plus limitées'', déplore Markus Haacker, co-auteur du rapport.