Le référendum pour le peuple sahraoui "doit être au centre des négociations" lors de la tournée de l'Envoyé personnel du secrétaire général de l'Onu Sahara occidental, Christopher Ross, dans la région et en Europe, a estimé le représentant du Front Polisario auprès de l'ONU, Ahmed Boukhari, cité lundi par l'agence de presse sahraouie (SPS). La tournée de Ross aura pour but, selon l'Onu, d'"échanger les points de vue entre les acteurs principaux sur la manière d'accélérer le processus afin de parvenir à la réalisation de son principal objectif identifié par les résolutions successives du Conseil de sécurité à savoir une solution politique mutuellement acceptable qui permette l'autodétermination du peuple du Sahara Occidental", a déclaré M. Boukhari dans un article publié vendredi par le journal espagnol El Païs et repris par l'agence. Selon le diplomate sahraoui, "M. Ross aurait pu effectuer cette tournée en mai dernier s'il n'y avait pas la curieuse et surprenante décision marocaine de mettre fin à la coopération du Maroc avec lui". "M. Ross revient donc à la région avec la mission d'accélérer le processus en vue de concrétiser son objectif ultime", a-t-il dit, ajoutant que "cela requiert, d'une part, le réexamen des causes ayant conduit à l'impasse actuelle, et, d'autre part, un examen de fond des différentes propositions de solution posées actuellement sur la table du Conseil de sécurité". M. Boukhari a expliqué que le processus actuel que dirige Ross au nom de l'Onu "n'a pas réellement commencé en 2007, à Manhasset (USA), mais en 1979". "Cette année-là, la résolution 3437 (1979) de l'Assemblée générale exhortait le Maroc à mettre fin à son occupation militaire du Sahara Occidental et de négocier avec le Front Polisario, comme représentant légitime du peuple sahraoui, les termes d'un cessez-le-feu et les modalités d'un référendum d'autodétermination", a-t-il rappelé. Il a relevé que "l'OUA tenta de suivre cette voie mais elle se heurta, en 1983, au refus marocain et prit alors la décision d'admettre en son sein la République arabe sahraouie démocratique (RASD), en tant que membre à part entière", notant que "la colère du Maroc le poussa à se retirer de l'Organisation, et cette colère dure jusqu'à aujourd'hui". "En 1991, la persistance de l'ONU et de l'OUA dans leurs efforts et les conséquences de 16 ans de guerre purent finalement convaincre le Maroc d'accepter l'organisation d'un référendum d'autodétermination dans lequel le peuple du Sahara occidental aura à choisir entre l'intégration au Maroc ou l'indépendance", a-t-il encore rappelé, précisant que la Minurso s'installa alors sur le territoire avec l'objectif d'organiser le référendum en Février 1992. "Rabat parvint, fin 1998, à la conclusion que le référendum conduira inévitablement à l'indépendance du Sahara occidental et prit la décision de s'en dérober", a-t-il dit. Le représentant du Front Polisario auprès de l'ONU a rappelé, en outre, qu'"après avoir rejeté le plan Baker, Rabat annonça en avril 2004, au SG des Nations Unies, Kofi Annan, qu'"elle s'opposera à tout plan de paix incluant l'option de l'indépendance du Sahara occidental, affirmant que l'indépendance met en cause la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental". "M. Annan répondit, dans son rapport d'octobre 2004, que l'option de l'indépendance avait déjà été acceptée par le Maroc dans le plan de règlement", a-t-il fait valoir. M. Boukahri a relevé, d'autre part, qu'il y a à peine deux semaines, le rapport du Département d'Etat américain au Congrès a souligné que le Maroc revendique la souveraineté sur le Sahara occidental, une position qui n'est pas acceptée par la communauté internationale". "Le rapport va même plus loin quand il affirme que le Maroc n'est pas considéré par l'Onu comme la puissance administrante, de jure, du territoire", a-t-il ajouté, indiquant qu'"en réalité, la puissance administrante du territoire demeure encore l'Espagne, bien que celle-ci ne cesse d'éviter cette vérité". "En Juin 2007, encouragé par certains secteurs de l'administration Bush, par Chirac et Zapatero et par Sarkozy plus tard, le Maroc présenta au SG de l'Onu sa fameuse proposition d'autonomie, qui fut immédiatement contrée par la proposition de solution du Front Polisario", a-t-il souligné. Il a rappelé que le Conseil de sécurité (dans sa résolution 1754 de l'année 2007) prit note des deux propositions "sans les qualifier de sérieuse et crédible, comme voulait voir le Maroc". Il a indiqué que sur la base de ces développements, le processus de Manhasset a commencé en Juin 2007. "La troisième voie proposée par Rabat, n'est en fait qu'une solution unilatérale, conçue pour légitimer un butin de guerre", a-t-il dit, ajoutant que "son péché capital réside dans l'hypothèse irréaliste que la communauté internationale et le Polisario accepteraient, d'emblée et d'évidence, son principe de base, c'est à dire la souveraineté marocaine unilatéralement proclamée sur le Sahara occidental". "Pour Rabat, l'autodétermination est secondaire, superflu, et sa fonction est de confirmer un accord, qui doit porter uniquement sur l'incorporation du territoire au Maroc, et cela devrait être le seul but de la négociation", a-t-il expliqué. Selon M. Boukhari, "la proposition sahraouie diffère de la proposition marocaine dans la mesure où elle reste ouverte à toutes les options préconisées par l'Onu pour un problème de décolonisation et, par voie de conséquence, ouverte à toutes les solutions, y compris l'indépendance, l'autonomie ou l'intégration, ces deux dernières étant en fait deux faces d'une même monnaie". "Par conséquent, la négociation, aux yeux du Front Polisario, doit situer au centre la consultation du peuple sahraoui et son objectif se doit d'éliminer les obstacles sur la voie du référendum d'autodétermination", a-t-il indiqué. "Ce point de vue a été confirmé de nouveau par le SG de l'Onu dans son rapport d'avril 2011, disant que l'opinion du peuple sahraoui est l'élément central dans la recherche d'une solution juste et durable", a-t-il relevé. La nouveauté dans la proposition du Polisario est le fait d'inviter le Maroc à élargir l'horizon et utiliser le processus de paix afin de pouvoir mettre en place des conditions mutuellement avantageuses dans les deux cas de solution, l'indépendance ou de l'autonomie, dont l'application prendra effet le jour après les résultats du référendum. Le Maroc continue de tourner le dos à cette invitation. Cinq ans se sont écoulés depuis le début du processus de Manhasset et force est de constater qu'il ne mène nulle part pour la simple raison que la proposition marocaine, telle que composée, sape les fondements et la raison d'un processus d'autodétermination relatif à un conflit de décolonisation.