La presse et des experts américains ont admis que la crise des otages du site gazier de Tiguentourine (In Amenas), ainsi que la bataille qui fait rage au Mali et la mort de l'ambassadeur américain à Benghazi en septembre dernier, sont les conséquences de l'opération de l'OTAN menée contre la Libye en 2011. Sous le titre "les attaques djihadistes en Afrique du nord révèlent le côté sinistre du printemps arabe", le New York Times souligne, dans son édition du dimanche, que l'Algérie "avait, pourtant, mis en garde des répercussions sur la région de l'Afrique du nord de toute intervention militaire en Libye pour l'éviction de Mouammar El-Gueddafi". Aussi, souligne le quotidien new yorkais, même les avertissements de l'ex-dirigeant libyen quant à l'avènement d'un chaos dans la région "se sont avérés, finalement, prémonitoires", en rappelant sa mise en garde dans laquelle il avançait, précise le journal, que "les gens de Ben Laden viendraient imposer des rançons sur terre et sur mer". Pour l'expert américain, Robert Malley, cité par NYT, "c'est l'un des aspects les plus sombres des soulèvements arabes" relevant que la prolifération des armes en Libye, la désorganisation de ses services sécuritaires et la porosité des frontières sont une "véritable aubaine pour les djihadistes". Selon le quotidien new-yorkais, l'attaque terroriste menée contre le site pétrolier de Tiguentourine "reflète le chaos qui règne en Libye depuis ces deux dernières années". Certes, "les hommes qui se battent sous la bannière du djihad ont accumulé, depuis plusieurs années, d'énormes liquidités par la contrebande et d'autres activités criminelles, mais la chute d'El Gueddafi a été le point de basculement", écrit le quotidien. Abordant la crise malienne dans ce sillage, le New York Times souligne que "le gouvernement algérien est considéré comme un pays crucial par la France et d'autres pays occidentaux pour faire face aux militants islamistes en Afrique du Nord". Néanmoins, ajoute-t-il, les réticences de l'Algérie pour une vaste campagne militaire au Mali "s'expliquent par les risques qu'elle comporte dans la mesure qu'une action internationale contre la prise de contrôle islamiste dans le nord malien pourrait pousser les groupes terroristes vers le sud algérien". "Cela réduirait à néant des années de lutte sanglante menée par les forces militaires de l'Algérie, qui ont largement réussi à repousser les djihadistes en dehors de ses frontières", souligne le quotidien. Dans ce contexte, il considère aussi que le gouvernement de Barack Obama "fait face à un défi supplémentaire d'un paysage djihadiste extrêmement complexe à travers l'Afrique du Nord qui dément l'étiquette facile d'Al-Qaïda, avec de multiples factions qui se chevauchent entre les groupes ethniques, les clans et les réseaux criminels". L'administration d'Obama et de nombreux analystes "sont divisés quant à savoir quel type de menaces pèsera, à long terme, sur les Etats-Unis avec l'expansion du terrorisme en Afrique du Nord", note-t-il. Alors que certains appellent à un "rôle plus actif" des Américains, d'autres "mettent en garde contre une réponse trop musclée qui pourrait rendre les Etats-Unis davantage un ennemi qu'ils ne le seraient ailleurs", selon Paul Pillar de Georgetown University et ancien analyste à la CIA, cité par NYT. Pour sa part, la prestigieuse revue américaine Foreign Policy a affirmé que le mode opératoire pour lequel a opté l'Algérie pour mettre fin à la prise d'otages du site gazier d'In Amenas "a été non seulement une réponse à une crise particulière, mais il a été un signal pour l'avenir". "Si cette attaque terroriste a été conçue comme un changement dans le jeu des terroristes destinée à annoncer de futures attaques, l'Algérie a envoyé un signal clair que cette nouvelle tactique ne réussira pas", souligne dans son article Geoff Porter, expert américain des affaires de l'Afrique du nord. A ce propos, il a souligné que face à certaines critiques quant à la gestion de cette crise, l'Algérie devrait rétorquer à ses détracteurs que la crise était "le résultat direct de l'ingérence étrangère en Afrique du Nord et au Sahel". L'Algérie, rappelle-t-il, avait averti, en 2011, que "l'intervention de l'OTAN en Libye conduirait à l'effondrement de l'Etat libyen et que le flux d'armes tombées entre les mains des terroristes pourrait déstabiliser la région". En outre, poursuit cet expert, Alger "a également averti que toute approche militaire face à l'instabilité dans le nord du Mali présente le risque d'une escalade du conflit et augmente la probabilité d'attaques terroristes islamistes en Algérie". Par conséquent, "la communauté internationale est indirectement responsable de ce qui s'est passé (dans le site gazier de Tiguentourine) et elle est mal placée pour dicter à l'Algérie comment elle aurait dû agir", a-t-il soutenu. Concernant le conflit malien, il soutient que "les prises de position du gouvernement algérien sont justifiés par l'attaque du site gazier". Par conséquent, estime-t-il, "il sera plus difficile pour la France et ses alliés, dont les Etats-Unis, de convaincre l'Algérie à soutenir la campagne militaire au Mali".