Le département d'Etat américain a affirmé, dans un nouveau rapport, que la violation des droits de l'homme des Sahraouis par le Maroc se poursuivait au point que cette situation suscite des ''inquiétudes''. Ce nouveau rapport, dont une copie a été obtenue par l'APS, a été élaboré par le département de John Kerry en application d'une loi adoptée en 2011 par le Congrès américain, qui exige du département d'Etat de vérifier la situation des droits de l'homme au Sahara occidental occupé avant l'octroi de toute aide financière militaire au Maroc. Ce texte législatif stipule qu'avant l'affectation de cette aide financière, le département d'Etat doit soumettre un rapport aux comités budgétaires relevant de la Chambre des représentants et du Sénat, sur les mesures prises par le Maroc en matière de respect des droits des personnes d'exprimer pacifiquement leurs opinions concernant le statut et l'avenir du Sahara occidental, et doit aussi élaborer un rapport sur la situation des droits de l'homme des Sahraouis. A travers cette loi, le Congrès a également conditionné l'aide financière militaire américaine fournie au Maroc par le droit d'accès au Sahara occidental, sans aucune entrave, aux organisations des droits de l'homme, aux journalistes et aux représentants des gouvernements étrangers. Dans ce rapport établi en septembre courant, afin de se mettre en conformité avec ces dispositions législatives du Congrès américain, le département d'Etat a noté, tout d'abord, que "le Sahara occidental est un territoire non autonome sur lequel le Maroc revendique la souveraineté, une position qui n'est pas acceptée par la communauté internationale". Rappelant que le Conseil de sécurité de l'ONU avait créé en 1991 la Mission des Nations-Unies pour l'organisation d'un référendum au Sahara occidental (MINURSO) "pour permettre au peuple du Sahara occidental d'opter soit pour l'indépendance soit pour l'intégration au royaume du Maroc", le département d'Etat a tenu à préciser que les Etats-Unis avaient renouvelé leur soutien à la MINURSO en avril dernier, à travers l'adoption de la résolution du Conseil de sécurité de l'ONU. Néanmoins, ajoute-t-il, un référendum n'a jamais eu lieu et ''le Sahara occidental reste, de facto, sous l'autorité administrative du Maroc, même si ce dernier n'est pas la puissance administrante reconnue par l'ONU pour le Sahara occidental.'' Entraves et restrictions excessives Ces précisions rappelées, le département d'Etat a informé le Congrès qu'"il y a toujours des inquiétudes quant aux droits des personnes d'exprimer pacifiquement leurs opinions concernant le statut et l'avenir du Sahara occidental et d'informer sur les violations des droits de l'homme''. Les auteurs de ce rapport officiel américain signalent également aux parlementaires qu'"il y a aussi des inquiétudes relatives aux entraves qui empêchent l'accès aux territoires sahraouis par les organisations des droits de l'homme, les journalistes et les représentants de gouvernements étrangers''. Le département d'Etat note aussi que le Maroc continue à exercer des ''restrictions excessives'' à l'encontre, en particulier, du droit de réunion pacifique et de publication qui prônent l'indépendance ou un référendum qui inclurait l'indépendance comme option. ''Les grandes manifestations sur les droits de l'homme ou toute manifestation en faveur de l'indépendance des territoires sahraouis sont strictement interdites par la loi'', note le rapport, ajoutant que les personnes arrêtées pour avoir protesté contre l'intégration du Sahara occidental au Maroc ''ne bénéficient pas souvent d'un procès équitable''. Difficultés d'action des ONG sahraouies Citant davantage les actes de violation, les collaborateurs du secrétaire d'Etat américain soutiennent que plusieurs organisations des droits de l'homme sahraouies ont des difficultés à obtenir les agréments ou à fonctionner librement, ''ce qui ne leur permet pas d'accéder légalement à des financements et d'organiser des réunions publiques''. C'est le cas notamment de l'association sahraouie des victimes des violations graves des droits de l'homme (ASVDH) et le collectif des défenseurs des droits de l'homme au Sahara occidental (CODESA) dirigé par Aminatou Haidar. Le rapport n'a pas manqué de signaler que la loi marocaine interdit aux citoyens d'exprimer leur opposition à la position officielle du gouvernement à l'égard du Sahara occidental, précisant que la plupart des médias et des blogueurs pratiquent l'autocensure sur cette question, tandis que les blogueurs, qui soupçonnent d'être étroitement surveillés par les autorités marocaines, sont amenés alors à occulter leur identité. Le département d'Etat rapporte que le gouvernement marocain ''applique des procédures strictes qui limitent la capacité des ONG pro-indépendantistes et des militants sahraouis de rencontrer les journalistes''. Il est à rappeler que les Etats-Unis avaient proposé, en avril dernier, au Groupe des Amis du Sahara occidental (Etats-Unis, Russie, France, Royaume-Uni, Espagne) un avant-projet de résolution stipulant l'introduction de l'instrument de la surveillance des droits de l'homme au sein de la MINURSO, mais qui avait été refusé par la France. Par ailleurs, le Congrès américain a mis en place, en août dernier, le groupe parlementaire du Sahara occidental ''Western Sahara Caucus'' au niveau de la Chambre des représentants, qui vise à défendre le droit du peuple sahraoui à l'autodétermination et à la protection des droits de l'homme des Sahraouis dans les territoires du Sahara occidental occupé par le Maroc.