Le Yémen se retrouve dans une situation de double pouvoir, les miliciens houthis au nord et les partisans du président Abd Rabbo Mansour Hadi au sud à Aden, une situation qui a poussé la communauté internationale à redoubler d'efforts afin de ramener les protagonistes de la crise à la table des négociations. Le pays a sombré dans le chaos après le coup de force des Houthis, milice chiite confinée initialement à Saada, son fief dans le nord du Yémen, avant de lancer en 2014 une offensive militaire d'envergure qui lui a permis d'entrer en septembre à Sanaa avant de pousser en janvier le chef de l'Etat et son gouvernement à la démission. Le président Hadi est, quant à lui, installé à Aden (sud) depuis début février d'où il a repris ses activités. Il est toujours reconnu par le parlement yéménite et par la communauté internationale. Cette ancienne capitale du Sud-Yémen Aden, d'où le chef de l'Etat est originaire, est un bastion sunnite où les Houthis n'ont pas prise. Le Yémen se retrouve donc coupé en deux comme cela était le cas avant la réunification de 1990. Face à ce risque de partition du pays, les efforts de sortie de crise s'intensifient afin de ramener les parties en conflit à poursuivre le dialogue. Ce jeudi, l'envoyé spécial de l'ONU pour le Yémen, Jamal Ben Omar, entame une visite à Doha où il aura des discussions sur la crise yéménite et les moyens à même de relancer le dialogue entre les parties belligérantes. La visite de l'émissaire onusien dans la capitale qatarie intervient peu avant une réunion des ministres des Affaires étrangères des pays du Golfe, axée sur la conjoncture régionale dont la situation chaotique au Yémen. M. Ben Omar avait déjà exprimé au président Hadi, lors d'une récente rencontre à Aden, le plein soutien du Conseil de sécurité de l'ONU aux discussions de sortie de crise au Yémen et l'a informé de l'appel du Conseil à toutes les parties au conflit à "participer à ces pourparlers". En parallèle, le président Hadi multiplie à Aden les rencontres politiques. Mercredi, il a reçu une délégation du Mouvement sudiste, dont la frange la plus dure milite pour une sécession du Sud, un Etat indépendant jusqu'en 1990. "L'entretien était positif", a déclaré un dirigeant sudiste qui a souhaité que "Aden ne se transforme pas en un terrain pour un règlement des comptes entre les forces rivales" au Yémen. Le même jour, le président yéménite s'est entretenu avec son ministre de la Défense Mahmoud al-Soubeihi qui a fui la capitale Sanaa, et a souligné, durant l'entretien, "l'importance d'assurer la sécurité et la stabilité dans le pays". Le général Soubeihi rejoint ainsi le président Hadi à Aden après avoir fait défection à la milice chiite qui l'avait nommé "président de la haute commission de sécurité". Il faisait partie du gouvernement de Khaled Bahah, qui avait démissionné le 22 janvier en même temps que le président Hadi, sous la pression des Houthis, qui avaient ensuite couronné leur coup de force à Sanaa par l'annonce le 6 février de la dissolution du Parlement et de l'installation de nouvelles instances dirigeantes. Depuis, M. Bahah et la plupart de ses ministres vivent en résidence surveillée à Sanaa. Manifestation anti-Houthis Au moment où la communauté internationale tente de ramener la sécurité et la stabilité au Yémen, les manifestations hostiles aux Houthis se sont multipliées à travers le pays: Jeudi matin, un manifestant a été tué et d'autres ont été blessés par les tirs de miliciens chiites qui dispersaient un rassemblement hostile à leur mouvement à Baïda, selon des militants et une source médicale. D'après ces sources, les miliciens houthis, ont tiré à balles réelles pour disperser des milliers de personnes sorties dans les rues de Baïda pour protester contre leur coup de force à Sanaa. Les violences qui frappent le Yémen n'ont pas épargné les agents de médias. Reporters sans frontières (RSF) a accusé mercredi les miliciens chiites de s'attaquer sans relâche aux journalistes depuis le début de leur campagne pour contrôler Sanaa. "Les miliciens chiites Houthis poursuivent leurs exactions à l'encontre des journalistes et des médias", a souligné RSF dans un communiqué, évoquant 67 cas d'agressions visant à empêcher les journalistes d'exercer leur métier, qui ont été recensés par le Syndicat des journalistes yéménites. "Nous condamnons ces attaques délibérées contre les médias et les journalistes qui constituent un danger réel pour la liberté de l'information et pour le processus de transition politique dans lequel s'était engagé le pays", a déclaré Virginie Dangles, adjointe à la direction des programmes de RSF.