L'Algérie est devant l'impératif d'accélérer sa transition énergétique vers le développement durable, a indiqué, mardi, la ministre de l'Aménagement du territoire et de l'environnement, Dalila Boudjemaa, ajoutant que les hydrocarbures conventionnels et non conventionnels demeurent "un capital fragile et non durable". "Les incertitudes liées non seulement aux mutations géoéconomiques mais aussi au contexte d'emprise plus dangereuse qui est le dérèglement climatique, sont en train de compromettre toute perspective et ne pardonneront ni l'inaction ni le report de l'action", a déclaré Mme Boudjemaa lors de la 19e journée de l'énergie organisée par l'Ecole nationale polytechnique (ENP). Ainsi, l'amorçage de la transition énergétique vers le développement durable, poursuit-elle, ne doit souffrir d'aucun retard. Selon la ministre, il est important d'enclencher un processus serein qui devra agir sur la gouvernance des ressources du pays par la réorientation de investissements, la modification des standards de production et, impérativement, par le changement des modes de consommation. Ce processus de transition requerra un capital humain capable d'opérer des transformations fondamentales, a-t-elle souligné mettant l'accent également sur l'importance du rôle de secteur privé ainsi que l'engagement public tant pour la régulation que pour l'investissement qui reste un facteur décisif. Toutefois, la productivité des différents systèmes d'énergies renouvelables (solaire, éolien, valorisation énergétique des déchets) fait appel à des sommes colossales, ce qui impose la nécessité de s'appuyer sur les revenus générés par les ressources conventionnelles, selon elle. "L'Algérie de demain, sobre en énergie et respectueuse de l'environnement ne peut se découpler de l'opportunité que lui offre l'économie rentière d'aujourd'hui", a-t-elle estimé. Selon Mme Boudjemaa, "les hydrocarbures conventionnels et non conventionnels font partie intégrante du capital naturel du pays, mais demeurent incontestablement un capital fragile et non durable". Elle a, cependant, relevé que ces ressources ne doivent pas être perçues comme un "verrou technologique" compromettant la transition vers des énergies plus durables mais plutôt comme un support lié au soutien de cette transition, tout en tenant compte des impératifs environnementaux. La ministre a appelé, par ailleurs, les chercheurs et universitaires à travailler en étroite collaboration avec l'Agence national de changements climatiques pour la conception et la maturation de projets éligibles au financement du mécanisme de développement propre, un dispositif de la Conférence des Nations unies sur les changements climatiques qui va tenir son prochain sommet fin 2015 à Paris. Présent à cette journée, le ministre de l'Energie, Youcef Yousfi, a insisté sur l'importance du rôle des centres de recherche et des laboratoires universitaires dans l'amélioration des techniques utilisées en industrie de l'énergie notamment renouvelables. Considérant l'innovation comme un facteur déterminant pour l'indépendance énergétique du pays, M. Yousfi a estimé que les chercheurs algériens doivent s'orienter vers la conception de techniques susceptible de réduire les coûts et accélérer le processus de production. "Une révolution énergétique se fait actuellement à travers le monde grâce à la recherche et l'innovation et gare aux retardataires", a averti M. Yousfi soulignant que la transition énergétique "sortira de l'université". Outre le nucléaire à usage pacifique, l'Algérie compte se lancer dans un vaste programme de développement d'énergies renouvelables qui permettra au pays de générer 25% de sa production électrique à partir des sources solaire, éolienne et géothermique, a-t-il avancé. Cependant, a-t-il observé, le développement de ces énergies est très coûteux, ce qui impose d'impliquer davantage les centres de recherches pour rendre les coûts plus abordables. La transition énergétique nécessite un effort impliquant la société civile ALGER- La transition vers le développement durable nécessite un effort national impliquant la société civile pour mettre en place un modèle énergétique algérien, a préconisé, mardi à Alger, l'expert Chems Eddine Chitour, en soulignant qu'il faudra passer "de l'ébriété énergétique à la sobriété énergétique". "Rien ne peut remplacer un effort national pour la définition d ́un modèle énergétique prenant en compte les profondes mutations du marché énergétique mondial. La société civile devra être convaincue de la nécessité de changer de cap: passer de l'ébriété énergétique à la sobriété énergétique", a expliqué M. Chitour lors de la 19ème journée de l'énergie organisée par l'Ecole nationale polytechnique (ENP). Ce qu'il suggère est d'assurer une "relève graduelle" par les énergies renouvelables, modérer et dimensionner la production en fonction des stricts besoins de l'Algérie et, aussi, faire la chasse au gaspillage qui représente un gisement perdu d'au moins 25%. Selon cet expert, qui est également directeur de recherche du laboratoire de valorisation des énergies fossiles à l'ENP, "le secret de la gouvernance est de mobiliser le plus grand nombre autour d'une ambition partagée qui est celle de sauver l'Algérie quand la rente ne sera plus là". Il faut, donc, passer de la situation où personne ne se sent concerné à une situation où tout le monde l'est, et ce, à des degrés divers, a-t-il encore soutenu. Dans ce sens, il a jugé que le développement durable devrait passer par une "rupture" avec le gaspillage soulignant la nécessité de substituer au régime de subvention actuel un système de compensations ciblées et directes au profit des couches les plus défavorisées de la société. La 19ème journée de l'énergie a été centrée sur la transition énergétique, à travers des conférences et interventions sur l'état des lieux de l'énergie, les défis qui attendent l'Algérie et les différentes sources d'énergies non conventionnelles.