L'évaluation de l'Accord d'association et l'examen de la coopération bilatérale entre Alger et Bruxelles seront au menu de la visite de travail qu'effectuera à partir de ce mercredi à Alger la Haute représentante de l'Union européenne (UE) pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, Federica Mogherini. Les relations bilatérales entre l'UE et l'Algérie, la problématique de la migration et les questions sécuritaires seront à l'ordre du jour de cette visite, où la question de l'évaluation de l'Accord d'association signé entre les deux parties en 2002 et mis en œuvre en septembre 2005 se posera avec acuité. L'Algérie a déjà saisi la Haute représentante de l'UE pour demander officiellement l'ouverture de discussions sur une évaluation conjointe objective de la mise en œuvre de l'accord d'association. La visite de la chef de la diplomatie européenne en Algérie, la première depuis son entrée en fonction en novembre 2014, sera ainsi, mise à profit pour expliquer et sensibiliser la partie européenne sur l'opportunité et le bien-fondé de cette évaluation commune et sur la légitimité de la position algérienne. La démarche d'évaluation réclamée par l'Algérie "ne vise nullement à remettre en cause l'Accord d'association, mais bien au contraire à l'utiliser pleinement dans le sens d'une interprétation positive de ses dispositions permettant un rééquilibrage des liens de coopération", assure une source proche du dossier. Dix ans après l'entrée en vigueur de ce nouveau cadre de coopération qui a instauré un dialogue ouvert et une collaboration globale incluant les dimensions politiques, sécuritaires, économiques, commerciales, financières, culturelles et humaines, l'Accord d'association n'a pas pour autant permis d'atteindre les résultats escomptés par la partie algérienne. "Dans ce partenariat, l'Algérie a donné plus qu'elle n'a reçu. (…) cela fait dix ans depuis la conclusion de l'accord et une évaluation s'impose", avait déclaré en juin dernier, à Bruxelles, le ministre d'Etat, ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, Ramtane Lamamra lors d'une conférence de presse, animée à l'issue de la 9è session du Conseil d'association Algérie-UE. Depuis la conclusion de cet accord, la position commerciale de l'UE n'a eu de cesse de se renforcer au détriment de l'économie nationale. En 2010, cette situation a amené le gouvernement algérien à procéder au gel unilatéral des concessions tarifaires accordées à l'UE en vertu de l'Accord d'association. Après huit rounds de laborieuses négociations, un compromis sur le report de la zone de libre-échange, prévue en 2017, à 2020 a été trouvé. Cependant, la tendance à l'accroissement du déficit commercial hors hydrocarbures s'est poursuivie, en témoigne les chiffres des sept premiers mois de 2015. Sur 30,560 mds de dollars d'importations globales de l'Algérie, 15,67 mds proviennent de l'UE, soit 50,62% , selon la direction générale des Douanes. En même temps, un faible stock d'afflux des investisseurs de l'UE vers l'Algérie a été constaté. Selon les données de l'ANDI, seuls 316 projets d'une valeur de 7,7 mds d'euros ont été réalisés par des investisseurs européens durant la période allant de 2002 à 2014. PEV: l'adoption du plan d'action subordonnée à l'accession à l'OMC Si l'Algérie a fait le choix de conclure d'abord l'Accord d'association avec l'UE et de négocier ensuite l'adhésion à l'OMC, c'est pour pouvoir bénéficier de l'appui du partenaire européen dans cette négociation. Ce qui ne s'est pas réalisé à ce jour, en dépit d'une déclaration commune y afférente dans l'accord d'association. Selon la même source, l'adoption du plan d'action relatif à la politique européenne de voisinage (PEV), en cours de discussions, est subordonnée à l'avancement des discussions sur l'accord bilatéral de l'accession à l'OMC. Ce plan est un document d'engagement sur une série d'actions à mener durant trois ou cinq ans dans les trois volets: politique et sécurité, économie et commerce, social et humain. Dans le cadre de la PEV, l'Algérie a insisté sur des liens de voisinage respectueux de la souveraineté, de l'égalité des partenaires et des intérêts face aux défis communs de développement et de sécurité dans la région, œuvrant pour la consécration des principes de respect mutuel et de non-ingérence dans les affaires intérieures, de l'équilibre des intérêts dans le cadre d'un partenariat gagnant-gagnant. Au titre de la coopération financière, l'UE reste le premier bailleur de fonds avec une allocation totale, toutes subventions confondues, depuis les années 1980, avoisinant le milliard d'euros. Mais, dans la nouvelle programmation budgétaire (2014/2017), l'Algérie ne bénéficie que de 120 à 148 millions d'euros, contre 890 millions pour le Maroc et 246 millions pour la Tunisie. L'Algérie n'a pas caché son "insatisfaction suite à cette dotation inappropriée" par rapport aux objectifs ambitieux fixés par les deux parties relatifs à l'appui à la gouvernance, à la diversification de l'économie, en plus des autres avantages comparatifs de l'Algérie en tant que fournisseur sûr et régulier de gaz (14% de la consommation européenne) et d'acteur majeur de maintien de la paix et de la sécurité dans la région, contribuant directement à la neutralisation de fléaux et menaces affectant le partenaire européen. La visite en Algérie de la Haute représentante européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité sera également l'occasion de signer trois conventions de financement dans le cadre de la coopération bilatérale dans les domaines d'appui à la justice et à la formation-emploi. (Par Bouaziz Zahia)