L'exposition "Biskra, sortilèges d'une oasis : 1844-2014", dont le vernissage s'est déroulé jeudi soir à l'Institut du monde arabe de Paris, a réduit en quelque sorte la longue distance (17.000 km) qui sépare Sydney (Australie) et Biskra, la porte du Sahara algérien. L'histoire de ce rapprochement virtuel, qui s'est concrétisé en France, commence par l'engouement et la curiosité d'un chercheur et critique d'art australien de l'Université de Sydney, Roger Benjamin, qui voulait connaître Biskra et tout ce qui a été produit dans le domaine des arts (plastique, photo, plan) et en documents. L'idée de départ était une demande d'un article sur Biskra qui devait paraître dans la revue de l'IMA Quantara rédigé par l'historien australien de l'art, mais ce dernier suggéra au directeur du musée de l'IMA, Eric Delpont, une meilleure production, une exposition sur laquelle il a travaillé d'arrache-pied durant 4 ans. A Canberra, Roger Benjamin a pris attache avec l'ambassadeur algérien pour l'informer du projet et c'est ainsi qu'il a obtenu "un soutien officiel" du gouvernement algérien. "C'est une passion personnelle de faire voir les choses qui sont très peu connues à l'extérieur de l'Algérie, notamment en Australie. Dans mes recherches, j'ai même retrouvé de très belles photos faites en 1904 par un Australien qui avait visité Biskra avec sa femme", soulignant qu'en sa qualité de chercheur, il veut que ses recherches "aboutissent et soient diffusées pour le grand public", d'où ile ne cache pas son intention d'organiser l'exposition à Sydney. Son lien avec Biskra avait commencé lorsqu'il était à Paris pour préparer son doctorat sur les oeuvres d'Heuri Matisse, artiste-peintre niçois (1869-1954), qu'il savait que cet artiste était en 1906 à Biskra. En 1985, Roger Benjamin se déplaça à Baltimore (Etats-Unis) pour voir la toile de Matisse "Blue Nude (Souvenir of Biskra)" (1907) et "c'est à ce moment-là (1985) que je voulais connaître la ville de Biskra". Une ville qu'il a connue enfin en 2013, après sa première tentative en 1992 lors de sa visite d'études en Algérie. Mais la situation sécuritaire de l'époque ne le permettait pas. Ce spécialiste de l'orientalisme ne perdait pas son temps et s'est investi durant plus d'un dizaine d'années à collecter tout ce qui "se disait", "se faisait" sur Biskra, en laissant germer dans sa tête un "projet Biskra". Au cours de ses deux visites (2013 et 2015), il a fait connaissance de maître Salim Becha, un notaire dévoué à l'art et au patrimoine de sa ville natale, qui détient une collection personnelle d'oeuvres d'art, notamment sur Biskra. "J'ai eu la chance de rencontrer maître Becha qui collectionne des oeuvres de sa ville natale. J'ai fait un choix restreint de sa collection et il a même pu acheter récemment quelques oeuvres supplémentaires sur Biskra pour enrichir l'exposition", a-t-il indiqué. Salim Becha, l'autre acteur principal dans cette exposition que le président de l'IMA, Jack Lang, a encensé d'éloges lors du vernissage, dans le sens où il a apporté un soutien "artistique, philosophique et financier" avec même des oeuvres de sa collection. Ce passioné de l'art a expliqué à l'APS que son penchant pour les collections a commencé depuis la classe de 2e année moyenne à Biskra où "le professeur de sciences nous demander de collectionner des insectes et d'en faire un exposé". "J'ai continué dans cette besogne jusqu'à ces dernières années où j'ai commencé à acquérir certains objets culturels un peu plus importants. J'ai eu l'idée en 2010 de proposer au ministère de la Culture mon intention de faire un don à la collection nationale en l'enrichissant de quelques 18.000 pièces de ma collection", a ajouté ce mécène qui se balade en Europe là où se déroulent des ventes aux enchères publiques des collections culturelles. Par son amour à la culture et à son patelin natal, il est même derrière l'idée d'une construction d'un musée à Biskra, un projet pris en charge par le gouvernement algérien.