Les députés européens ont exhorté jeudi la Commission de l'UE à respecter le droit européen, soulignant la nécessité d'introduire auprès de la Cour européenne de justice (CJUE) une demande d'avis sur la compatibilité des accords UE-Maroc, en cours de renégociation, aux dernières décisions de cette Cour qui a exclu le Sahara occidental du champ d'application de ces accords. "Nous devons obtenir l'avis de la CJUE sur les accords avant qu'ils ne soient soumis au Parlement européen pour adoption afin d'éviter toute instabilité juridique à l'avenir", a affirmé l'eurodéputé Florent Marcellesi lors d'un échange de vues en commission "Commerce international" (INTA) au Parlement européen. Lors de cet échange de vues sur l'état d'avancement des négociations UE-Maroc au sujet des conventions adaptant les protocoles relatifs aux règles d'origine dans l'accord d'association et l'accord de pêche, ce député européen a mis l'accent sur la nécessité de respecter les arrêts de la CJUE car "il y va de la crédibilité de l'UE". Il s'est dit, par ailleurs, "effaré" et "choqué" par la terminologie utilisée par les représentants de la Commission européenne au débat pour désigner le peuple du Sahara occidental. Abondant dans le même sens, l'eurodéputée Maria Arena a mis l'accent sur la nécessité de solliciter la CJUE pour un avis sur la compatibilité du processus adopté par la Commission pour obtenir le consentement du peuple du Sahara occidental aux dispositions des arrêts rendus par cette Cour. Fin février, la Cour européenne de justice (CJUE) a conclu que l'accord de pêche UE-Maroc n'est pas applicable au Sahara occidental et à ses eaux adjacentes. Selon la CJUE, l'inclusion du territoire du Sahara occidental dans le champ d'application de l'accord de pêche enfreindrait plusieurs règles de droit international général applicables dans les relations entre l'Union et le Royaume du Maroc, notamment le principe d'autodétermination. En plus de l'arrêt du 27 février, la CJUE a rendu le 21 décembre 2016 une décision selon laquelle les accords d'association et de libéralisation UE-Maroc ne sont pas applicables au Sahara occidental, soulignant le statut "séparé" et "distinct" de ce territoire, classé depuis 1963 sur la liste des territoires non autonomes de l'ONU. ==Mise en garde contre une entrée en vigueur des accords sans l'accord du Parlement== Maria Arena a mis en garde, par ailleurs, la Commission contre la tentation d'autoriser une entrée en vigueur même provisoire des accords UE-Maroc révisés avant leur adoption par le Parlement européen. Les députés européens Helmut Scholz, David Martin et Klaus Buchner ont, de leur côté, jugé "inacceptable" et "inconcevable" pour l'UE de ne pas respecter les décisions de sa plus haute juridiction, exhortant la Commission à faire preuve de "transparence" dans le processus de consultation qu'elle mène, actuellement, pout obtenir le consentement du peuple du Sahara occidental. L'eurodéputée Anne-Marie Mineur a regretté, pour sa part, la démarche adoptée par l'exécutif européen qui est allé négocier avec la "force d'occupation", au lieu de demander l'accord explicite du peuple du Sahara occidental. "L'arrêt de la CJUE est claire: l'accord de pêche UE-Maroc ne s'applique pas au Sahara occidental", a-t-elle souligné, plaidant pour un accord UE-Maroc qui exclut explicitement le Sahara occidental du champ d'application à l'image des accords Maroc-Etats-Unis ou encore Maroc- Association européenne de libre-échange (AELE). Répondant aux préoccupations soulevées par les eurodéputés, le représentant de la direction générale Affaires maritimes et pêche (MARE) de la Commission européenne, Christian Rambaud a assuré que l'équipe des négociateurs européens tente de "trouver une solution qui soit respectueuse des conclusions de l'arrêt de la Cour". Le représentant du Service européen de l'action extérieure (SEAE), Nicolas Bultec a reconnu, de son côté, que le processus de consultation mené actuellement pour tenter d'obtenir le consentement du peuple du Sahara occidental est "particulièrement compliqué". Il a fait savoir, à ce titre, que le Front Polisario, en tant que partie au processus de négociations de paix sous l'égide de l'ONU, a été consulté, regrettant le refus opposé par d'autres organisations de la société civile sahraouie à l'invitation qui leur a été adressée. En effet, 89 associations représentant la société civile sahraouie ont annoncé qu'elles refusaient de participer au processus de consultation, jugeant celui-ci biaisé et renvoyant la Commission vers le représentant légal du Sahara occidental, le Front Polisario.