La déclaration faite dimanche par le ministre de la Communication, porte-parole du gouvernement, Hassane Rabhi, annonçant que l'ère de la planche à billet était "révolue", affirme que l'Algérie tourne résolument, la page de ce mode de financement non conventionnel, engagé fin 2017. Interrogé par l'APS sur les mesures que prendra l'Exécutif pour faire face à ses engagements budgétaires, notamment après l'abandon du financement non conventionnel, M. Rabhi a assuré que "le gouvernement avait pris des mesures devant permettre au pays d'éviter les risques qui pourraient porter préjudice à l'économie nationale". "La préservation du pays, de l'économie et ses institutions nationales est la responsabilité de tout un chacun", a-t-il affirmé, en marge du lancement d'un programme de formation sur l'environnement au profit de journalistes. Rendu possible grâce à un amendement de la loi sur la monnaie et le crédit, autorisant le Trésor public de s'endetter directement de la Banque d'Algérie (BA), le financement non conventionnel était programmé pour une période transitoire de cinq ans, qui devait voir "la concrétisation de réformes structurelles importantes". Appelé communément "la planche à billets", ce mécanisme de financement représentait, selon les arguments avancés par le gouvernement de l'époque, une "réponse urgente" aux rétrécissements des liquidités bancaires, du fait d'une chute brutale des cours du pétrole à compter de la mi-2014, alors que le recours aux alternatives de l'endettement extérieur ou l'introduction de nouveaux impôts était catégoriquement exclu. La crise financière sévère, induite par le déclin drastique des prix pétroliers, s'est traduite notamment par l'épuisement du Fonds de régulation des recettes (FRR), en février 2017, amenant l'Algérie à recourir à ce dispositif transitoire. Entre la fin de 2016 et celle de 2017, les réserves de change du pays s'étaient contractées de près de 17 milliards de dollars, passant de 114 mds USD à 97,3 mds USD. Outre la couverture des besoins du Trésor, le financement non conventionnel était destiné au remboursement de la dette publique interne, notamment les titres de l'Emprunt national pour la croissance, levé en 2016, ainsi que les titres émis en contrepartie du rachat de la dette bancaire de Sonelgaz et ceux émis au profit de Sonatrach, en compensation du différentiel sur les prix des carburants importés et de l'eau dessalée. Un financement "injustifié", selon la BA Il devait également offrir au Trésor la possibilité de doter en ressources le Fonds National d'Investissement (FNI), au titre des prises de participation de l'Etat dans des investissements ou des financements, à long terme, de programmes publics d'investissements. Toutefois, dans une note publiée le 1er avril dernier, la BA avait explicitement estimé que le recours de l'Algérie à la planche à billets était "dès le début injustifié". La Banque des Banques a même qualifié de "paradoxal" l'appel insistant, lancé en avril 2017 par les initiateurs de ce financement, une "Task Force" installée auprès de la Primature de l'époque. La BA avait estimé que la situation en Algérie durant les premiers mois de 2017, était " loin de présenter des similarités avec les cas exposés dans la note des experts (Etats-Unis, Europe, Japon) qui seraient susceptibles de justifier le recours au financement non conventionnel, dans notre Pays". En plus, les instruments conventionnels de politique monétaire "n'avaient pas atteint leurs limites", avait-t-elle encore argumenté, en ajoutant qu'à ce stade, les banques ne présentaient au refinancement, par la Banque d'Algérie, (opérations d'open market et réescompte) que des titres publics. D'autre part, la Banque d'Algérie voulait s'assurer que les liquidités bancaires qui seraient libérées allaient effectivement servir au financement de l'économie, mais elle était sceptique sur cet objectif. Effectivement, entre la mi-novembre 2017 et la fin janvier 2019, sur quelque 6.556,2 milliards de DA mobilisés par le Trésor auprès de la BA au titre du financement non conventionnel, 3.114,4 mds de DA seulement, soit près de la moitié, ont été injectés dans l'économie, selon la note de la BA. Depuis mai dernier, le gouvernement actuel a adopté une nouvelle approche visant à préserver les réserves de change du pays à travers notamment la limitation du recours à l'importation aux besoins réels du marché national, ainsi que par l'encouragement de la production nationale.