OUZOU – Cela fait exactement un mois que le Pr. Abdelkrim Benali, infectiologue au Centre hospitalo-universitaire (CHU) Nedir Mohamed de Tizi-Ouzou, reçoit des patients infectés par le nouveau coronavirus Covid-19, et durant toute cette période ce praticien n'a ménagé aucun efforts pour soigner et à résister face à cet ennemi invisible. Devoir et conscience professionnelle oblige, cet infectiologue qui accumule 25 années de lutte contre les infections et qui a fait face durant sa vire professionnelle à des épidémies dont celles du H1N1 et la leptospirose, mène aujourd'hui un nouveau combat contre un virus plus redoutable que ce qu'il a eu à traiter jusque-là. Rencontré au CHU de Tizi-Ouzou vers 10H30, Pr Benali, qui ne s'était pas encore reposé de la garde de la veille qui a débuté à 16H00, déclare d'emblée à l'APS, qui l'a sollicité pour un portrait, qu'il ne veut pas parler de sa personne. "Nous somme toute une équipe impliqués dans cette lutte contre le Covid-19. Dans des moments difficiles comme celui de cette pandémie, on ne travaille pas seul, on ne pense pas à soi-même mais on pense équipe", a-t-il observé modestement. L'arrivée des premiers patients atteints par le Covid-19 au service des maladies infectieuses, est désormais un souvenir indélébile de la mémoire de ce spécialiste. "Je me rappelle très bien des premiers cas. Et ça c'est passé exactement le 15 mars. Ce jour la j'étais de garde. Il y avait trois malades, le lendemain matin nous apprenons qu'il y avait trois autres malades présentant les symptômes d'une infection au Covid-19 au niveau duservice de pneumologie". Devant cette situation exceptionnelle, ce médecin et son équipe, composée de 17 médecins dont deux de rang magistral, sept spécialistes et 8 résidents, ont eu pour première démarche de réunir les meilleurs conditions de prose en charge des cas suspects, en demandant à l'administration du CHU de réserver un espace qui sera consacré exclusivement à la prise en charge de ces patients, chose qui a été faite le jour même, a-t-il dit. L'arrivée des malades dans le service désormais réservé à la pathologie du nouveau coronavirus, était un véritable moment d'émotion pour le Pr Benali. "Nous sommes des professionnels, nous côtoyons les infections quotidiennement et cela fait partie de notre travail mais nous sommes des être humains. "Le premier jour quand j'ai reçu les premiers malades qui venaient de rentrer dans le service en file indienne, un flash est passé dans ma tête et j'ai revu la scène d'un célèbre film. J'ai eu un moment de peur peut être, mais quelques minutes après lorsque nous avons commencé à examiner les patients nous avons vite repris notre sérénité", s'est-il confié. == D'importantes contraintes physiques et morales == Un mois à traiter les malades tout en se protégeant et en protégeant sa famille et son entourage, est une charge qui pèse sur le personnel soignant. "Au bout d'un certain temps et avec la fatigue physique et encore plus le stress quotidien, la situation que nous vivons quotidiennement au niveau des hôpitaux devient pesante sur les équipes qui sont au premier rang de lutte contre cette pandémie ". Après des heures à prodiguer des soins aux malades dans un milieu contaminé tout en se protégeant du virus, rentrer chez sois n'est pas synonyme de repos. "Nous rentrons chez nous et il y a tout un rituel astreignant à observer pour ne pas transporter le virus à la maison et tout ça pèse, un mois c'est lourd, mais nous continuons avec abnégation à assurer notre devoir". "A la maison nous sommes confinés par crainte de transmettre le virus à sa famille, nous évitons le contact avec les nôtres et cette situation pèse aussi sur les membres de la famille, lorsque vous avez un enfant qui ne peut pas vous approcher à moins d'un mètre et demi voir deux mètres quand vous ne mangez pas avec les membres de la famille, vous êtes obligé d'isoler vos effets et ustensiles et que vous évitez même de croiser vos enfants dans le couloir et ce depuis déjà un mois, c'est des choses qui pèsent sur le moral", a regretté le Pr. Benali. Il a observé que certains de ces collègues n'ont même pas le privilège de rentrer chez-eux. il s'agit notamment de ceux qui habitent loin et qui sont pris en charge dans des résidences mises à leur disposition durant cette pandémie. Face à cette situation "épuisante" compliquée par l'augmentation du nombre des malades puisque le service infectieux est saturé, ce même spécialiste a lancé un appel à ses confrères des autres spécialités pour "rejoindre l'équipe de lutte conter le Covid-19 qui compte actuellement des infectiologues, des pneumologues, des réanimateurs et des radiologues". "Mon message est pour les hospitaliers qui doivent comprendre que si cette pandémie perdure, les équipes qui sont en première ligne ne pourront pas tenir et nous leur demandons de nous aider et de venir nous soulager un tant soit peut pour surpasser cette crise, nous avons une mission à partager". Pr Benali a saisi l'occasion pour lancer un autre appel aux citoyens qui ont des masques FFP2, pour les remettre aux personnels soignants. "Les citoyens comprennent notre mission, ils nous soutiennent mais s'ils veulent vraiment nous aider en plus de l'application des recommandations émises par les experts du Comité scientifique de suivi de l'évolution de la pandémie du Coronavirus, je leur dirai que la meilleure façon de nous soutenir, c'est de laisser ces masque FFP2 pour le personnel de soin qui prend en charge les malades et qui est fortement exposé au virus. "Un soignant protégé est un malade sauvé" a ajouté ce même spécialiste qui a observé qu'il y a parfois des hôpitaux ou ces masques manquent. "Le masque chirurgical est suffisant pour le citoyen", a-t-il dit en soulignant qu'"il ne faut pas avoir trop peur ni ne pas avoir peur du tout".