Un habitant sur deux dans la bande de Ghaza connaît une situation alimentaire catastrophique, en particulier dans le nord où la famine sévira d'ici le mois de mai en l'absence de mesures "urgentes", ont prévenu lundi les agences spécialisées de l'ONU. Plus de 1,1 million de Gazaouis sont confrontés à "une situation de faim catastrophique", proche de la famine, "le nombre le plus élevé jamais enregistré" par l'ONU, qui se base sur le rapport du Cadre intégré de classification de la sécurité alimentaire (IPC) publié lundi. "La communauté internationale devrait avoir honte de ne pas réussir à stopper" la famine imminente, s'est indigné sur X le chef des Affaires humanitaires de l'ONU, Martin Griffiths. Dans le dernier rapport IPC publié en décembre, le Programme alimentaire mondial (PAM) et l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) considéraient la famine comme "probable" d'ici la fin mai dans le nord de la bande de Ghaza. "Sans changements dans l'accès à l'aide humanitaire, la famine arrive" dans le nord, confirme la directrice générale adjointe de la FAO, Berth Bechdol, "Il est possible qu'elle sévisse déjà dans le nord, mais nous n'avons toujours pas été en mesure de le vérifier", faute d'accès aux territoires concernés. Les critères de l'IPC pour déclarer une famine ne sont pas techniquement remplis mais d'ores et déjà "des habitants de Gaza meurent de faim", s'alarme la directrice exécutive du PAM, Cindy McCain, dans un communiqué. Le PAM estime que dans le nord du territoire, un enfant sur trois souffre de malnutrition et "la malnutrition aiguë chez les enfants de moins de cinq ans progresse à un rythme record". Selon Hiba Tibi, directrice de l'ONG CARE en Cisjordanie et à Ghaza, "le personnel médical voit des enfants s'amaigrir au fil des jours, des enfants qui peuvent à peine parler et marcher à cause de la faim". "La faim est une mort lente et douloureuse", souligne-t-elle. Le porte-parole du département d'Etat américain, Vedant Patel, a de son côté estimé que ces constats étaient "alarmants", et révélaient l'image "déchirante" d'"enfants qui meurent de faim". "C'est pourquoi nous sommes si convaincus que tout doit être fait pour revoir l'assistance humanitaire à la hausse", a-t-il ajouté. Les destructions sont massives dans la bande de Ghaza et l'aide humanitaire n'y entre qu'au compte-gouttes. Selon l'ONG Oxfam, 2.874 camions sont entrés dans le territoire en février, soit "seulement 20% de l'aide quotidienne" qui y pénétrait avant le 7 octobre. Il existe toujours, selon le PAM, "une fenêtre étroite" pour empêcher la famine. Pour cela, "nous avons besoin d'un accès immédiat et sans restrictions au nord. Si nous attendons que la famine soit déclarée, il sera trop tard, des milliers de personnes supplémentaires auront trouvé la mort", selon Cindy McCain. Un "cessez-le-feu humanitaire immédiat" rapide permettrait "de faire entrer suffisamment de nourriture, de médicaments et d'eau potable" dans les zones pour éviter une famine, abonde Berth Bechdol, mais un arrêt des hostilités "ne semble pas probable dans les jours ou semaines à venir". Selon le PAM, pour assurer les besoins alimentaires de base, il faudrait faire entrer à Ghaza "au moins 300 camions par jour", particulièrement dans le nord, où il n'a pu acheminer que neuf convois d'aide depuis le début de l'année. Les derniers 18 camions d'aide alimentaire ont été livrés dimanche soir à la ville de Ghaza.