A une soixantaine de kilomètres l'ouest de Tipaza se trouve la localité côtière de Gouraya. Ce petit coin du Bassin méditerranéen, qui jouissait d'une bonne réputation avant le terrorisme, tel un aimant, attirait des dizaines de milliers de familles qui venaient profiter de ces paysages. Malheureusement, cette même localité a vu quelques dizaines de ses enfants partir rejoindre les maquis durant les années 1990, pour grossir les rangs des hordes criminelles. Le marché hebdomadaire de Gouraya a résisté à tous les temps. Il se tient tous les mardis. Certaines activités ont disparu, comme l'apprentissage du maniement de la canne pour se défendre contre les agresseurs. En ce mois d'août, le beau temps était au rendez-vous. Les grappes humaines venues de toutes les zones environnantes de la ville de Gouraya convergent vers cet espace poussiéreux clôturé par un grillage et situé à l'extrémité est de cette localité. Chaque commerçant augmente les décibels pour dominer ses concurrents. Peu de femmes circulent au milieu des vagues humaines qui déferlent à travers les allées du marché découvert. Les fruits et légumes sont exposés au sol. Toutes sortes de produits alimentaires, de la quincaillerie, de la droguerie, les chaussures, la friperie, les lits, les matelas, les fenêtres, les portes, les salons de différentes couleurs, les salles à manger jonchent l'étendue de cette « surface » de vente. La commercialisation à la criée produit la cacophonie. Les vendeurs viennent des wilayas environnantes. Chaque vendeur tente d'attirer le maximum de clients vers son véhicule ou son « stand ». Cette fois-ci les miracles sont réalisés par un « guérisseur » venu d'Alger. Il propose des formules magiques pour guérir tous les maux, les maladies et les traumatismes. Il arrive à trouver les mots pour faire tomber les citoyens naïfs dans ses filets. Des produits emballés dans des bocaux qui transforment les malades en un laps de temps court. Celui qui se plaint du rhumatisme, du mal de dos, de l'infection urinaire, de l'impuissance sexuelle, du mal de tête, des séquelles des fractures, de l'allergie, des problèmes de peau, autant de maladies qui sont soignées miraculeusement selon ses propos par ses pommades et des gels fabriqués à l'aide des plantes médicinales qu'il vient de mettre en vente.Parmi les nombreux exemples qu'il cite, le vendeur encaisse à chaque fois des billets de 200 DA « Ne me payez pas messieurs si vous ne le désirez pas, Allah Ou Akbar, crie-t-il à l'aide de son mégaphone, je serai à Sidi Ghilès samedi prochain, sinon je reviendrai à Gouraya mardi prochain », ajoute-t-il. Les pauvres gens continuent à lui remettre les billets de 200 DA et achètent l'une des formules magiques. Mais le vendeur utilise son artillerie d'arguments pour vendre l'œuf de l'autruche. « Je vous préviens qu'il coûte un peu cher, précise-t-il à l'assistance, mais sachez que lorsque vous buvez 3 fois par jour le contenu de cet œuf d'autruche mélangé à un verre de lait, dites-vous bien que vous avez bu tout « le ministère de la Santé » et « désormais rien ne vous arrivera à l'avenir », conclut-il. Volontairement, il ne divulgue pas le prix de vente de l'œuf d'autruche. En revanche, il promet de le ramener si quelqu'un verse des arrhes. Des personnes de plus en plus nombreuses s'agglutinent devant le véhicule de marque Renault Express de ce vendeur. Il parle et il invite ses clients ébahis par les histoires et l'invitation de ce monsieur à essayer ses formules qui guérissent ceux qui souffrent. A proximité de ce vendeur, un autre vieux tente d'accrocher les passants pour écouler des herbes séchées. Les citoyens semblent moins convaincus par cet autre « magicien ».