Mercredi, 10h 30, à l'hôpital de Thénia. Le personnel médical annonce la venue du ministre de la Solidarité nationale et de la Communauté algérienne à l'étranger. Boumerdès . De notre bureau Le wali et les responsables de la DAS attendent devant le service des urgences pour le recevoir et l'accompagner dans sa visite au chevet des blessés de l'attentat kamikaze, qui avait tiré la ville des Issers de son sommeil avant-hier, causant 48 morts et une cinquantaine de blessés (le bilan s'est alourdi). Ici, sur les 13 blessés qui ont été admis le jour de l'attentat, 11 ont quitté l'hôpital. Les deux autres ont été opérés et seront libérés dans les deux ou trois jours qui suivent. En marge de sa visite qui l'a menée à l'hôpital de Bordj Menaïel, le représentant de l'Etat a indiqué que toutes les victimes seront prises en charge par l'Etat. Il a confirmé que 29 des corps qui ont été transférés vers la morgue d'El Alia ont été identifiés tandis que ceux qui se trouvent à Bordj Menaïel, au nombre de sept, ont été complètement déchiquetés. Ils seront identifiés dans tout les prochains jours, a-t-il dit. Devant le portail principal dudit hôpital, des dizaines de familles attendent des nouvelles, qui de leurs proches, qui de leurs familles. La tristesse et l'inquiétude se lisaient sur tous les visages. Elles sont venues de partout. Parmi les 49 blessés qui y ont été admis, 14 uniquement sont sous surveillance médicale. La plupart d'entre eux avaient été opérés durant la nuit de mardi. Venu de Ténès, Ahmed nous confie qu'il ne reviendra jamais aux Issers. « Même si l'on me donne des milliards, je refuserais, car j'y ai vécu l'horreur », ne cesse-t-il de répéter. Cet avis est partagé par plusieurs autres blessés. Peur sur la ville Contrairement à Ahmed, Bouabdellah n'a nullement voulu renoncer à son projet de rejoindre le corps de la Gendarmerie nationale. Ce jeune licencié de Ghelizane et son ami de Jijel indiquent que « l'attentat de mardi ne nous a pas fait peur ». « Après ce que nous avons vécu, normalement on doit tous nous accepter », préconisent-ils sur un ton ironique. Par ailleurs, le ministre qui a effectué une visite éclair au chevet des blessés n'a cependant pas fait une halte aux Issers pour s'enquérir des dégâts causés par l'attaque terroriste. Dans cette commune, tout le monde s'accorde à dire que l'Etat a failli dans sa mission consistant à protéger la population. Bien que la plupart vaquaient à leurs occupations, les citoyens rencontrés se disent désormais menacés. Agé d'une trentaine d'années, Lamine est venu porter main forte à ses proches dont la maison a été sérieusement touchée par l'attaque. La famille qui y habite a été relogée dans la soirée d'hier à Zemmouri en attendant la restauration de leur maison. Sur place, Rezki, le propriétaire, déplore l'absence des hauts responsables de l'Etat, lesquels, selon lui, n'ont rien fait pour atténuer les malheurs de la population endeuillée par l'explosion. « Hormis les services du CTC qui ont supervisé la bâtisse, aucun autre responsable ne nous a rendu visite et pourtant notre maison est la plus touchée par l'attentat. Les membres de ma famille sont complètement choqués et c'est du devoir de l'Etat de les assister », assène-t-il. La tente installée par le Croissant-Rouge algérien pour la prise en charge psychologique des blessés était vide et personne ne se trouvait à l'intérieur. Non loin du lieu du drame, le propriétaire d'un café touché par l'attentat s'affairait encore hier à réparer les dégâts avant de rouvrir son commerce. L'équipe de la voirie communale, quant à elle, s'affairait à enlever les décombres tandis que des commissions accompagnées par des responsables locaux faisaient des va-et-vient pour faire l'inventaire des dégâts. A proximité et au milieu d'un décor apocalyptique, des groupes de jeunes et de moins jeunes, abattus, discutaient sur ce qui venait de se produire. Chacun y va de son commentaire. De l'autre côté, aâmi Dahmane, attablé devant son restaurant, dit craindre que « l'avenir de cette jeunesse ne soit compromis par la poursuite de ce genre d'actes barbares, le climat de psychose et une incertitude qui n'ont que trop duré ». « C'est flou. Nous ne pouvons rien dire. La situation est trop compliquée », conclut-il avec amertume.