Evalué à une moyenne de 27 millions de centimes par mois, le salaire du parlementaire algérien le met à l'abri du besoin. C'est même une rémunération très avantageuse par rapport à ce que perçoivent d'autres salariés du secteur public dans les fonctions les plus éminentes et les attributions les plus hautement spécialisées. Combien gagne un professeur de médecine, un chirurgien qui répare ou sauve des vies, un pilote de ligne, un ingénieur des ponts et chaussées ? En Algérie, mais aussi dans le monde entier, il n'y a pas scandale à voir très bien rétribué celui qui soigne, construit des barrages, des ouvrages d'art ou des réseaux autoroutiers. Mais l'élu du peuple ? Cela ne demande aucun talent particulier d'être député et cela demande certainement moins de temps que de devenir chirurgien du cœur ou des yeux. Il n'y a même pas de mise en concurrence possible. Que dire alors si le salaire moyen de 27 millions de centimes est rapporté à ce que gagne un cadre moyen de l'Etat, un universitaire ou un enseignant du secondaire. Beaucoup ont vu dans un tel niveau de salaire un privilège qui sera payé au bout du compte par les contribuables. Le moins que l'on puisse dire est que cette échelle de salaire ne serait justifiable qu'en retour de services rendus à la nation par l'élaboration de propositions sociales pour atténuer le fossé entre les plus pauvres et les plus riches. La vocation du parlementaire, d'abord pour honorer le mandat confié par les électeurs, est d'introduire un peu plus de justice dans le quotidien des citoyens. Mais à considérer ce salaire de 27 millions de centimes par mois, nombreux seront ceux qui croiront non sans amertume que charité bien ordonnée commence par soi-même, dans l'hémicycle. Quelle désillusion pour les laissés-pour-compte, pour les grands blessés de la vie, mais aussi pour des millions de travailleurs ordinaires qui n'ont que le strict nécessaire pour exister. Car le professeur de médecine, l'ingénieur ou le pilote de ligne gagnent suffisamment pour vivre dignement. Il est dramatique que dans de telles conditions, certains exercices de démagogie puissent encore tromper l'opinion. Servir ou se servir ? Telle est la question.