Revalorisation du pouvoir d'achat, logements et plus de sécurité, ce sont en somme les trois axes des attentes des Algériens pour 2010. En 2009, des émeutes ont éclaté sporadiquement sur tout le territoire national autour de ces mêmes attentes. Dans tous les cas de figures, c'est la revalorisation des salaires et des conditions de vie qui seront projetées sur les devants de la scène publique durant l'année 2010. En fait, les promesses non-tenues par les pouvoirs publics s'accumulent et empestent le quotidien des citoyens. La dernière tripartite entre un syndicat moribond, un patronat désorienté et un gouvernement «parcimonieux» quant il s'agit de travailleurs, a été le sacre d'une énième comédie où H'mida fait toujours le joueur et le croupier à la fois. A l'unanimité, les travailleurs déclarent que la dernière tripartite n'a rien apporté de concret à part «une nouvelle grille de salaires qui a favorisé plus les secteurs névralgiques comme l'Education». Le salaire minimum est porté à 15.000 dinars (soit mois de 150 euros) contre 178 euros en Tunisie et 164 euros au Maroc. En dépit de sa valorisation, le SNMG demeure «insignifiant voire humiliant », déclarent les smicards algériens qui vivent de plus en plus une précarité plus abrupte. «Les 15.000 dinars ne suffisent qu'à couvrir une semaine des dépenses d'un père de famille de quatre personnes», indiquent nos interlocuteurs. Les travailleurs approchés se sont également focalisés sur la revalorisation des salaires et la réhabilitation des conditions du travail. Que ce soit dans le secteur public ou privé, les salariés se déclarent «insatisfaits» du montant inscrit dans leurs fiches de paye. Idem pour les travailleurs la fonction publique qui emploie, selon les dernières statistiques, 1,6 million de fonctionnaires. Au-devant de la scène, il y a les fonctionnaires de tous les secteurs qui se sont dits mal payés. Un chirurgien exerçant dans le secteur public dont le salaire ne dépasse guère les 36.000 dinars est «aliéné» de la société. «Les nouveaux statuts n'ont pas amélioré la grille des salaires. Le chirurgien qui a fait tant d'études se trouve écrasé par un salaire à minima», indique Mourad, un jeune chirurgien du CHU d'Oran. Les médecins marocains débutent à 727 euros/mois, alors que leurs confrères tunisiens touchent au minimum 910 euros/mois. Au Maroc, les médecins entament leur carrière à 727 euros contre 910 euros en Tunisie. De leur côté, les magistrats sont à l'abri du besoin. Leurs salaires bruts oscillent entre 100.000 et 200.000 DA. Autrement dit, leur mensualité varie, selon le grade et l'échelon, entre 8 et 17 fois le salaire national minimum garanti (SNMG). Quant à l'enseignement dans tous ses paliers, il reste, malgré les dernières revalorisations, loin par rapport aux enseignants marocains et tunisiens qui entament leur carrière respectivement à 637 euros et 575 euros. Un professeur du secondaire algérien ne peut atteindre les 32.000 dinars qu'après avoir passé 15 ans de carrière, soit l'équivalent de la bagatelle de 300 euros. Les enseignants du supérieur ne sont pas en reste. Les 80.000 dinars de l'échelon le plus haut, c'est-à-dire, celui d'un professeur émérite dans les universités algériennes, est bien loin de ses similaires marocains et tunisiens. Si le point indiciaire a été maintenu à 45 dinars, il a été fixé 1.400 à 1.600 points pour le professeur d'université qui est au sommet de la pyramide des salaires. Quant à nos chefs d'entreprises publiques, ils sont également mal considérés. En somme, leurs salaires ne dépassent pas 6 millions de centimes par mois. Toutefois, les salaires du secteur de l'Energie sont déconnectés de ceux du secteur public industriel. Voire ceux de la Fonction publique. Un vice-président à Sonatrach dépasse les 20 millions de centimes par mois. Le P-DG de Sonelgaz touche presque autant que le patron de la compagnie pétrolière nationale. Nos banquiers et experts en finances, ils ont des salaires très variés. Un banquier algérien travaillant pour le compte d'une banque étrangère domiciliée à Alger affirme toucher entre 100.000 et 180.000 centimes mensuellement. En fait, 10 millions de centimes -est le salaire de base- alors que les 8 autres millions de centimes correspondent à des primes liées au résultat. Les banquiers algériens exerçant dans les établissements étrangers reçoivent en plus deux mois de salaires en fin d'année. Les salaires des banquiers font rêver leurs collègues des banques publiques et aussi les jeunes diplômés. Selon une étude comparative sur le pouvoir d'achat en Algérie, réalisée par l'Intersyndicale de la Fonction publique, le niveau de vie des Algériens reste précaire. Selon l'étude maghrébine, le niveau de vie des travailleurs dans les trois pays du Maghreb reste en dessous de la moyenne. Le salarié SNMG algérien ne peut subvenir aux besoins de la famille tout au plus pendant une semaine. Quant aux salariés qui perçoivent des salaires situés entre 15.000 à 25.000 DA, ils ne peuvent subvenir qu'aux dépenses familiales durant 10 jours. En Algérie, le SNMG ne couvre, selon la même enquête, que 26% des besoins minimums des salariés au SNMG contre 32% pour les Marocains et 15% pour les Tunisiens. Il faut dire que les hausses des salaires sont accompagnées par une récurrente inflation. A chaque augmentation des salaires, suit une flambée des prix des biens et services. L'équilibre n'est jamais atteint. «La dignité des travailleurs et le prochain combat social», conclut nos interlocuteurs.