Le parti au pouvoir en Afrique du Sud, le Congrès national africain (ANC), a décidé hier de retirer son mandat au président Thabo Mbeki, l'appelant à démissionner de ses fonctions alors qu'il est accusé d'avoir influencé la justice pour nuire à son rival Jacob Zuma. « L'ANC a décidé de rappeler le président de la République avant la fin de son mandat » qui expire au 2e trimestre 2009, a déclaré à la presse le secrétaire général du parti, Gwede Mantashe. « Notre décision est prise, les formalités suivront maintenant le processus parlementaire », a-t-il ajouté à l'issue d'une réunion du comité directeur de l'ANC. « Nous avons communiqué notre décision (au président), ainsi que le fait que nous suivrons le processus parlementaire. Il (M. Mbeki) n'a pas manifesté de réaction particulière, il a accepté de participer à ce processus et à ces formalités », a-t-il ajouté. « Le président a accepté la décision du comité directeur de l'ANC », a déclaré le porte-parole de M. Mbeki, Mukoni Ratshitanga. « Cette décision inclut le processus parlementaire », a-t-il ajouté, se refusant à indiquer si M. Mbeki envisageait de démissionner. Selon une radio privée, le président a convoqué une réunion extraordinaire du gouvernement cet après-midi pour décider de la marche à suivre. « La Constitution est silencieuse » sur la convocation d'élections anticipées en cas de démission du chef de l'Etat, a indiqué M. Mantashe. Le président de la République est nommé par le Parlement issu des élections générales, où l'ANC domine très largement depuis les premières élections multiraciales de 1994. Il s'agit traditionnellement du chef de l'ANC. Aux termes de la Constitution, le comité directeur ne peut pas démettre directement le président de la République. Un vote de défiance requiert une majorité simple au Parlement, dominé à quelque 70% par l'ANC. Il faut les deux tiers des députés pour renvoyer le chef de l'Etat. L'ANC est divisé mais peut vraisemblablement compter sur le soutien du principal parti d'opposition, l'Alliance démocratique (DA). M. Mbeki, qui a succédé à Nelson Mandela à la tête de l'Etat en 1999, est sur la sellette depuis qu'un juge de Pietermaritzburg a prononcé le 12 septembre un non-lieu contre le populaire Zuma, son rival et président de l'ANC depuis décembre, évoquant des « interférences » au plus haut niveau de l'Etat dans ce dossier. Le secrétaire général de l'ANC a toutefois affirmé que la décision du comité directeur n'avait « rien d'une punition mais (visait) à unir de nouveau le parti », profondément divisé par la lutte entre les deux hommes. M. Mbeki avait été chassé de la présidence de l'ANC lors d'un congrès aux allures de coup d'Etat interne en décembre dernier. Communistes, syndicalistes et mouvements de jeunesse avaient multiplié cette semaine les appels à la démission du président. Julius Malema, le leader de la Ligue de la jeunesse de l'ANC, avait assuré pour sa part avoir pris contact avec les responsables du parti pour qu'ils ordonnent le départ du chef de l'Etat.