L'Association des industriels et hommes d'affaires indépendants (Musiad) regroupe plus de 10 000 sociétés, notamment des PME familiales concentrées dans le centre-sud de l'Anatolie (le triangle Adana-Konya-Kayseri). Troisième zone industrielle du pays, capitale du meuble de la Turquie, la ville de Kayseri produit 1% du textile monde. Cette organisation patronale compte aussi quelques mastodontes comme Ülker (le géant de l'agroalimentaire) ou Kombassan, un puissant conglomérat implanté dans le fief islamiste de Konya. Ces patrons musulmans ont « pignon » sur les secteurs des textiles ou des matériaux plastiques et sous-traitent pour l'automobile. Selon la Musiad, les sociétés membres pèsent 40 milliards d'euros, soit 10% du PIB turc (72 millions d'habitants) et emploient plus de 700 000 personnes. Le M du sigle signifie officiellement « indépendant », mais renvoie aussi à « musulman ». Avec leur slogan « High technology, high morality », les membres de Musiad font du business au nom d'Allah mâtiné d'un conservatisme prononcé des valeurs et des mœurs. Selon eux, les priorités sont aux prêts islamiques et aux activités charitables. Point d'investissements dans le jeu, encore moins contracter des emprunts assortis de taux d'intérêt et d'autres activités dites « illicites ». Dans le passé, des responsables de la Musiad ont été traînés en justice. Plus maintenant, puisque Recep Tayyip Erdogan, Premier ministre et chef de l'AKP, parti au pouvoir, issu de la mouvance islamo-conservatrice, n'éprouve aucun gêne à se faire accompagner dans ses voyages à l'étranger par ces « hommes verts ». Ces Tigres anatoliens ne ratent aucune occasion pour faire les yeux doux au parti islamo-conservateur actuellement au pouvoir. Certains les soupçonnent de vouloir influencer la société résolument laïque. Il faut dire que le couple Musiad - AKP a le vent en poupe et arrache des parts de marché à la Tüsiad, organisation patronale plus laïque qui regroupe, elle aussi, les plus grandes entreprises du pays.