La saison touristique dans le grand Sud algérien a démarré sous d'heureux auspices. Les vols charters en provenance de France atterrissent régulièrement à Tamanrasset et à Djanet. En dépit des rumeurs d'insécurité, les touristes n'ont jamais cessé de venir dans le Sud algérien, allant à la rencontre des espaces de rêve, de curiosité, de méditation et d'aventure. Un voyage qui va au-delà des frontières de l'imaginaire. L'activité a, certes, diminué il y a une année après l'enlèvement des Allemands, mais elle a vite repris le chemin de la croissance. En cette matinée de fin d'année, un soleil radieux baigne le tarmac de l'aéroport de Tamanrasset. Deux vols sont programmés en provenance de Paris. L'un de la compagnie Aigle Azur et l'autre de Air Méditerranée. Ils arrivent à l'heure, le premier à 10h et le second à 11h30. Des groupes de touristes sont accueillis par une troupe folklorique et une petite cérémonie de bienvenue leur est réservée. Tous partagent une passion commune : le désert. Un couple est venu en voyage de noces pour profiter de l'intimité et s'enivrer de grands espaces. Un sexagénaire nous affirme : « J'avais l'intention de venir l'année dernière dans le Sud algérien, mais l'enlèvement des Allemands m'a fait craindre le pire alors je suis parti en Mauritanie. Cette année, je me suis dit qu'il faut vaincre mes appréhensions et y aller, car tout le monde est unanime : le désert algérien est magique. » Le tourisme algérien commence à attirer pour ses énormes potentialités. Après une longue traversée du désert, il commence à retrouver des couleurs. Cependant, il souffre d'un manque de publicité et d'une communication plus agressive en Europe. Il laisse ainsi le terrain à ceux qui distillent des contrevérités. Les vols charters ont apporté une éclaircie. Dominique Mersch, représentant d'Aigle Azur, nous a déclaré : « Cette année, nous avons une liaison directe par semaine depuis Paris (Orly) sur Tamanrasset et Djanet, nous avons commencé cette liaison le 19 octobre et nous sommes satisfaits des premiers résultats. Nous continuons jusqu'en avril à raison d'un vol par semaine, le dimanche, et nous avons déjà des projets de développement pour l'année prochaine. Nous aimerions faire un vol supplémentaire en semaine, car actuellement, nous offrons la possibilité aux touristes de venir pour 8 jours mais il y a des groupes qui sont demandeurs du Sud algérien pour 4 jours. Ils ne peuvent pas s'absenter plus longtemps. Si nous mettons un vol en milieu de semaine, on pourrait faire venir des groupes du jeudi au dimanche par exemple. » Une mine d'or inexploitée La compagnie a la possibilité de doubler ses vols directs sur Djanet et Tam, car il existe une réelle demande de la clientèle qui cherche le dépaysement, les beaux paysages et qui est intéressée par cette destination. Avec un avion de 160 sièges, elle transportera durant l'hiver un millier de passagers, essentiellement originaires de toutes les régions de France mais aussi des groupes de Belgique. Aigle Azur a démarré son premier vol régulier il y a un an et demi. Elle possède 18 lignes régulières entre la France et l'Algérie. Elle a transporté près de 500 000 passagers en 2004. Jean-François Rial dirige trois agences qui opèrent sur le Sahara (Terres d'Aventure, Nomades et Déserts), filiales du groupe Voyageurs du monde. A ses yeux, le Sahara algérien est une mine d'or. Cependant, des problèmes retardent son développement. « On a envoyé environ 1500 personnes sur Tam et Djanet. Néanmoins, la demande extrêmement forte sur le Sahara est freinée par l'avis du ministère des Affaires étrangères français qui continue de déconseiller le Sud algérien, malgré les mesures de sécurité prises par le gouvernement algérien. Il faut absolument que ce problème soit réglé. Les autorités algériennes nous expliquent que le Sud est complètement sécurisé, ce que nous croyons, et nos partenaires locaux nous l'ont confirmé, mais tant que le site officiel des Affaires étrangères français expliquera qu'il est déconseillé de circuler dans le Sud algérien, on aura une croissance qui sera faible », souligne-t-il. En effet, le ministère des Affaires étrangères français écrit cela sur son site Internet : « Les voyages sont déconseillés dans ce pays, sauf pour raisons professionnelles impératives. A la suite de l'enlèvement de plusieurs groupes de touristes européens en 2003, tout déplacement dans le grand Sud algérien reste déconseillé. » Simplifier les formalités Par ailleurs, le représentant de cette agence conseille de « simplifier les formalités de visa pour ceux qui viennent dans le Sud, ce qui permettrait d'inscrire plus de gens. Il y a un vrai potentiel, c'est un tourisme exclusivement saharien, ce marché qui a triplé en volume depuis 10 ans, l'Algérie devrait avoir la plus grosse part. Or elle a la part la plus faible (10 %). On envoyait 3500 personnes par an et aujourd'hui, ce chiffre s'est réduit à 1500. » Sami Guenaoui est le directeur de l'agence Mille et un soleils. Il nourrit de grandes ambitions : « On est tout nouveau sur le marché algérien. On était spécialisé dans d'autres destinations et avec l'arrivée d'une directrice de production sur l'Algérie, on a lancé l'Algérie depuis 2 mois. Les premières ventes ont commencé et ce qui en ressort, c'est qu'on est le premier tour-opérateur à vendre l'Algérie au grand public, il y a un beau potentiel et les gens sont très contents quand ils trouvent le produit algérien dans notre brochure, quand ils découvrent les photos. C'est le plus beau des déserts, à ce niveau-là, vous êtes inégalables : l'accueil, la beauté des sites et la proximité. » Yves Couprie est l'un des responsables du Guide du routard. Il retrouve l'Algérie et ses merveilles du Sud. C'est l'histoire d'un amour qui commence. « On traitait l'Algérie depuis longtemps dans le guide de l'Afrique. Après les événements des dernières années, malheureusement, il n'y avait plus de demande. Mais là, il y a à nouveau des demandes de nos lecteurs qui nous écrivent pour nous demander de parler de l'Algérie, notamment du Sud algérien très à la mode pour les gens qui aiment marcher. On a décidé de nous intéresser à toute la région du Sud algérien. On lancera dans quelques mois sur notre site Internet (www.routard.com), le site le plus visité de la francophonie avec un million de lecteurs par mois, la destination Algérie et nous allons rédiger un reportage. Une équipe sera envoyée pour sillonner l'Algérie », a-t-il affirmé. Philippe Feral, directeur de production zone saharienne de Point Afrique, est content de revenir en Algérie. Un pays qu'il a appris à comprendre et à aimer. Sa volonté est de remettre sur la brochure l'Algérie : 7200 touristes fréquentaient Djanet et Timimoun dans les beaux jours du tourisme algérien. Aujourd'hui, il y a quelques difficultés dues à la peur et à une mauvaise communication en France, plus généralement en Europe, de ce qui se passe en Algérie. « Je crois cependant que ces destinations reprendront leur essor d'antan », confie-t-il. Il décèle des signes avant-coureurs d'une reprise. En attendant la résurrection et malgré la réduction de 50% des prix pour toute personne qui prenait un vol et un circuit, « la faible demande nous a obligés pour des raisons financières à supprimer le dernier vol de novembre et les deux derniers de décembre, mais compte tenu des effectifs sur les week-ends suivants, nous espérons que ça redémarrera vite. » Avec le Festival du tourisme saharien de Tamanrasset, les autorités veulent donner la preuve qu'elles veulent rattraper le temps perdu. Elles veulent montrer au monde les meilleurs paysages que recèle ce beau pays. Le tourisme a des chances de renaître...