Même si le bourg de Lahchichia, situé dans la commune de Mezloug, n'est distant que de 8 km du sud-est du chef-lieu de la wilaya, il semble appartenir à une autre époque. En effet, sa population estimée à 10 000 âmes, souffre le martyre. Les collégiens, notamment, sont le « véritable parent pauvre » de cette localité distante de quelques kilomètres de l'aéroport du 8 Mai 1945. Des dizaines d'élèves du moyen, dont la plupart des filles, quittent les bancs de l'école à cause de ce problème. Des habitants de la localité nous confient à ce sujet : « Les parents ne laissent pas leurs filles quitter le village pour poursuivre leur scolarité au CEM de Khalfoun, dans la commune de Aïn Arnat. L'année passée, c'est même un enseignant du primaire habitant le village qui a mis fin à la scolarité de sa fille. Cette décision a été la cause d'un vrai remue-ménage, nous avons essayé de l'en dissuader, en vain ». La centaine d'élèves scolarisés au niveau des lycées sont, quant à eux, confrontés au même problème le manque de transport, voire son inexistence. Une situation qui dure depuis quelque années, suscitant les inquiétudes des parents, qui eux-mêmes éprouvent de grandes difficultés à se déplacer à Sétif ou encore à Aïn Arnat, distante de prés de 10 km, faisant dire à un habitant : « Les routes sont dans un état lamentable, elles n'ont jamais été prises en charge ; pis encore, certains quartiers ne sont même pas viabilisés. C'est la panique générale dès que l'hiver approche, c'est invivable. Il faut venir un jour de pluie pour voir le calvaire que nous vivons au quotidien ». Certains villageois désabusés renchérissent : « L'arrivée des Japonais nous a fait croire, pendant plusieurs semaines, que la solution était trouvée et que nous allions sortir de la misère, mais hélas la situation est la même. Le téléphone est arrivé à la base vie des étrangers, mais notre village reste coupé du reste du monde. Même les deux écoles et le centre de santé n'ont pas de téléphone ». D'un autre côté, les habitants que nous avons rencontrés ne comprennent toujours pas pourquoi un centre de santé en chantier est abandonné depuis plusieurs semaines. Actuellement, un semblant de centre de soins se trouve provisoirement au logement d'astreinte de la nouvelle école primaire ; pour les cas jugés graves, les malades sont évacués vers le CHU de Sétif ou la polyclinique, avec des moyens qui ne répondent pas aux normes les plus élémentaires. Par ailleurs, les structures devant prendre en charge les jeunes de la région, et il est malheureux de le constater, sont inexistantes dans cette bourgade, et cette frange de la société est livrée à elle-même. Tout manque : maison de jeunes, salle de sport, terrain combiné, cybercafé…qui allégeraient un tant soit peu l'amer quotidien de cette jeunesse désoeuvrée, sans perspective d'emploi, rassemblée, à longueur de journée, devant le café maure du village, ou encore devant l'arrêt de bus. Quelques-uns d'entre eux, plus chanceux, ont pu décrocher, pour une certaine période, un travail auprès de la société japonaise, qui réalise actuellement le tronçon de l'autoroute Est-ouest passant par la wilaya, et dont la base vie est implantée à Lahchichia. Il convient de relever que les nombreux autres villages de la commune ne sont guère mieux lotis.