Quand la salubrité fait défaut, l'environnement humain, animal et végétal est menacé. Au XXIe siècle, il est impossible de penser qu'une grande wilaya comme Blida, située à moins de 50 km de la capitale, puisse crouler sous la saleté. Il est désolant aussi de voir cette ville, réputée autrefois par ses roses et ses paysages paradisiaques, vivre aujourd'hui sous le règne de ses déchets. Routes, boulevards ou étroites ruelles, aucun endroit n'est épargné par les sachets en plastique de toutes les couleurs, des bouteilles vides jetées ça et là, des cartons et de tous les autres types de détritus qui offrent aux paysages de cette belle ville un aspect lugubre. Parmi les premières causes de cette situation, on citera les marchés informels qui sont considérés comme les premiers générateurs de déchets ainsi que le nombre d'habitants qui a largement augmenté ces dernières années. Selon la direction de l'environnement, la norme du volume quotidien de déchets par individu qui est de 0,5 kg est largement dépassée pour atteindre 0,7 kg/ habitant/jour. Ce qui donne à la situation une ampleur grave, ce sont les décharges sauvages qui pullulent un peu partout dans la wilaya et qui s'accroissent dans les zones désertées et sur les abords des oueds. Selon la direction de l'environnement de Blida, il existe environ 25 décharges sauvages dans la wilaya, et on citera comme exemple celle de oued Bouarfa. Cette dernière est totalement étouffée par les déchets d'une entreprise privée, des matériaux de construction combinés avec les arbres sauvages et les immondices ménagers des bidonvilles qui jonchent ces rives. Un peu plus loin, dans la commune de Beni Mered, les anomalies que présente l'oued Beni Azza sont nettement visibles. Tous les témoins de l'érosion sont identifiables. On peut en citer des griffes, des stries, de grands arbres perchés sur leurs racines ainsi que des dépressions importantes dues aux extractions de sable. Sans omettre que ce oued, qui était dans un passé récent une décharge publique contrôlée, est toujours la destination de certains individus malintentionnés qui viennent y jeter leur ordures et leurs gravats. Un peu plus à l'ouest, la commune de Oued El Alleug connaît plusieurs décharges sauvages provoquant ainsi la grogne chez les habitants de cette ville et dans celle située dans l'oued portant le même nom, certains commerçants y jettent des déchets d'abattage. Contacté, le P/Apc de cette commune niera la présence d'une telle atrocité, mais il avouera cependant : « La seule décharge que nous possédons est une décharge publique contrôlée sise sur les rives de oued Chiffa. Nous avions un projet d'un centre d'enfouissement technique qui a été rejeté par la direction des services agricoles sous prétexte que le terrain choisi est une terre agricole. » Dans le chef-lieu, l'exemple n°1 d'insalubrité est celui du marché Guessab situé à l'entrée de la ville, ce dernier près du stade Mostapha Tchaker et de la gare routière est considéré comme la plaie profonde du chef-lieu de la wilaya vu le nombre important de marchands ambulants qui l'entourent et qui génèrent des tonnes de déchets quotidiennement. Eboueur, un sale noble métier Le volume des déchets augmente, et en contrepartie le nombre d'éboueurs régresse, ou du moins reste insuffisant et dans la wilaya de Blida, le déficit en éboueurs est un problème courant. La commune de Bouarfa ne dispose que de 5 éboueurs qui seront renforcés de 6 autres dans les prochains jours. Par contre, la commune de Oued El Alleug possède un effectif de 35 éboueurs qui seront prochainement consolidés par l'arrivée de 20 autres employés chargés du nettoiement. Confirmé par un des membres administratifs du service des agents chargés du nettoiement de la commune de Blida, il nous a été difficile de croire que le chef-lieu de la wilaya ne dispose que de 182 éboueurs (tous grades confondus) dont 36 balayeurs seulement pour toute la ville des Roses. Les vacataires ne dépasseront pas le nombre de 42, dont 3 sont des chauffeurs. « Je n'ai pas honte de mon métier, au contraire j'en suis fier, sauf que nous rencontrons, mes collègues et moi, beaucoup de contraintes qui rendent notre travail difficile et parfois infructueux », nous confiera un jeune éboueur. Il avouera que le premier handicap est le manque de moyens humains et matériels. « Par rapport à la forte demande formulée par les citoyens, notre nombre est minime. En plus, nous n'avons pas de tenues adéquates pour nous faciliter notre métier telles que les bottes, les capuchons, les uniformes et le matériel qu'on utilise », ajoutera notre jeune interlocuteur. Questionné sur son salaire, on apprendra qu'il ne dépasse pas les 9000 Da/mois. « C'est un salaire maigre comparé aux efforts qu'on fournit chaque jour. A titre d'exemple, parmi les équipes de nuit, un groupe de 3 éboueurs et un chauffeur ramasse 200 bacs chaque nuit entre la cité de Benboulaïd et celle des Bananiers, chose qui me pousse à trouver un autre boulot en parallèle comme vendeur de qalb ellouz pendant le mois de Ramadhan », conclura notre interlocuteur Un CET sans Epic… Suite à la forte pression exercée par la société civile qui ne pouvait plus supporter les odeurs nauséabondes que dégageait la décharge sauvage de Chiffa, le centre d'enfouissement technique de Soumaâ a été ouvert et sa gestion léguée à l'APC de Blida en attendant la création de l'Epic. « L'Epic, qui existe sur papier, attend la décision délivrée par les ministères de l'Intérieur et des Collectivités locales, des Finances ainsi que celui de l'Aménagement du territoire, de l'Environnement et du Tourisme », dira Bouaouameur Azzedine, directeur de l'environnement de la wilaya de Blida. Rappelons que ce CET coiffe 9 communes ainsi que les corps constitués. Selon M. Oumane, détaché de l'APC de Blida et chargé de la gestion provisoire du CET, ce dernier reçoit 200 camions qui y déversent environ 400 t quotidiennement. Cette structure, qui est d'une capacité de 350 000 m3, souffre de plusieurs problèmes tels que les difficultés rencontrées par les camionneurs lors de leur accès vers le casier. « Le problème d'accessibilité sera rapidement pris en charge. Ces contraintes étaient attendues vu que l'EPIC n'est pas mis en place. La mauvaise gestion est de mise dans cette phase transitoire », expliquera le directeur qui n'hésitera pas à nous fournir des renseignements concernant le dispositif de Blanche Algérie : « Dans le cadre d'un programme que nous sommes en train d'établir en collaboration avec la direction de l'action sociale, nous visons la commune de Blida. Nous voulons imposer aux jeunes qui choisissent ce créneau d'atteindre les 3 buts fixés qui se résument en l'impact visuel du travail entrepris, la réalisation finie du travail et le contrôle et le suivi régulier du service fait », dira le directeur avant de conclure : « Nous voulons absolument impliquer les comités de quartier dans ce processus. Dans le cadre de ce projet, nous avons ciblé 4 points noirs dont la route de Chréa et le marché Guessab. En utilisant le langage des roses, nous mettrons des panneaux de protection de l'environnement dans le cadre de campagnes de sensibilisation. »