Voici quelques anecdotes et souvenirs concernant le grand maître du chaâbi qui rappelleront à certains d'agréables souvenirs et permettront à d'autres de découvrir quelques facettes de sa personnalité. Avec Kateb Yacine En 1966, (plus exactement, le jour de l'évasion d'Aït-Ahmed), lors de la célébration d'une circoncision, El Hadj M'hamed El Anka, qui animait la fête, rencontra Kateb Yacine, qui l'avait un jour qualifié d'Himalaya. Ils se congratulèrent chaleureusement et le cheikh lui demanda qu'est-ce qu'il avait écrit récemment. Kateb Yacine lui répondit humblement qu'il était justement venu chercher l'inspiration en l'écoutant. Son maître cheikh Nador Dans un entretien avec Bendaamèche en 2006 sur les ondes Chaîne III, Rachid Guerba, chef de l'orchestre national andalou et docteur de l'Ecole nationale de musique de Paris, a déclaré : « El Anka a dépassé le maître, il est un génie et ne doit rien à Nador. Pour le cerner à sa juste mesure, il faut lui consacrer plusieurs émissions. » El Biar ou les puits El Anka avait pris en gérance l'ex-Cercle de l'équipe de football, la JSEB, à El Biar, à la fin des années 1960 jusqu'aux environs de 1974 (si ma mémoire ne me trahit pas). Cette période demeure pour les anciens elbiarois leur meilleur souvenir. Les anecdotes pullulent. La phrase prononcée, un jour à El Biar, par El Hadj M'hamed El Anka, excédé par les manigances de certains, et que tous les elbiarois vous répéteront est : « J'étais fi bir (dans le puits) et je me retrouve aujourd'hui fi el biar (plusieurs puits) ». Cette phrase a dû être lâchée après qu'il eut été excédé par le comportement de personnes malintentionnées et intéressées par le local, qui complotaient pour l'inciter à partir. Dans le cours de cela, on lui demanda un jour de s'acquitter, sans délai, du loyer. El Anka rétorqua avec un sourire que deux représentations suffiraient à réunir le montant réclamé. En fait, en une soirée, il récolta bien plus que ce qu'on lui réclamait. Grand seigneur, il remit la totalité en disant « Gardez tout ! » et quitta définitivement le dit Cercle. Coup de cœur pour la JSEB Dans ce quartier, El Anka s'est lié d'amitié avec les frères Soukhane, grands footballeurs, qui l'accompagneront dans tous ses déplacements. Il eut un coup de cœur pour le club local qu'il supporta à fond, même lorsque celui-ci, à la surprise générale, élimina de la Coupe d'Algérie le Mouloudia d'Alger (on notera qu'avant l'indépendance, la JSEB avait éliminé aussi le stade de Reims en Coupe de France). Petits accrochages Les démêlés avec le chanteur Souki, qui avait la réputation de trop coller El Anka, sont une légende à El Biar. El Hadj lui fera regretter, un jour, amèrement d'avoir pris son mandole sans qu'il le sache. Mieux vaut s'arrêter à ça pour Souki. Secrète générosité Les gens qui ne connaissaient pas véritablement El Hadj lui ont collé une réputation de pingre prenant par exemple au sérieux ses « taquineries » envers S. Abdallah le vendeur de légumes, situé alors en face de son café. Il était en réalité très généreux mais dans le secret. Il avait pour habitude de remettre régulièrement à une personne de confiance une certaine somme pour la donner à des nécessiteux qu'il désignait et sans que son nom ne soit cité. Ceux qui savent Yahia le boucher et Louail Mustapha, l'un des préférés d'El Anka, connaissent mille et une anecdotes sur sa vie à El Biar. Peut-être un jour aideront-ils à mieux cerner la personnalité de ce géant de notre histoire culturelle ?