Figure emblématique de la grande Jeunesse Sportive de Kabylie, la JSK, Miloud Iboud qui a offert ses plus belles années à son club de toujours, poursuit son «combat» pour redonner aux «Genêts» des couleurs. Redorer le blason d'une JSK plongée depuis des années dans les abysses. Aux côtés de Chérif Mellal, il compte inoculer à la nouvelle génération le «virus» de la grinta. Dans cet entretien, il nous parle de l'avenir de la JSK qui doit puiser sa force de son passé glorieux, mais aussi du présent qu'il faudra mieux saisir pour repartir sur de nouvelles bases, solides et sereines. – Dans quel état d'esprit le JSK aborde-t-elle le championnat sachant que l'exercice précédent a failli voir le club quitter l'élite ? Je dois dire que nous entamons la saison dans de très bonnes conditions comparativement aux précédentes saisons où la JSK avait toujours d'énormes difficultés à préparer les intersaisons. Cette année, nous avons pu mettre en place un programme en trois étapes. D'abord à Aïn Benian, ensuite avec l'arrivée de l'entraîneur en chef Franck Dumas qui a conduit le stage en Allemagne, une occasion pour le technicien de faire l'état des lieux, d'apprécier chacun des joueurs. Le séjour allemand était concluant, et de retour à Tizi Ouzou nous avons mis en place les dernières retouches pour aborder le premier match contre la JS Saoura. Mais je dois dire que nous étions handicapés par l'affaire des cinq joueurs non qualifiés. Ce qui a sérieusement chamboulé les plans de l'entraîneur, contraint de recourir à un plan B. – Pourquoi ces joueurs n'étaient-ils pas qualifiés ? Cela est dû à un manque criant de rigueur au niveau du secrétariat du club. Il n'y a pas eu le suivi voulu. Au risque de paraître dur, le président Chérif Mellal a été trahi par des personnes auxquelles il a accordé sa confiance. Ces personnes, qui jouissaient d'une confiance totale du président, qui devaient s'occuper du volet recrutement et qualification n'ont pas été à la hauteur de cette confiance. – Cela nous amène à vous poser la question de savoir dans quelles conditions l'actuelle direction a trouvé la JSK… Quand Chérif Mellal est arrivé, il a trouvé la JSK dans une situation extrêmement difficile. Ces dernières années ont failli emporter le club et pas la peine que je revienne sur le scénario de la saison passée. Des conditions difficiles, parce que le club manque cruellement d'argent, souffre d'instabilité sur le plan technique et surtout de la perte de confiance des supporters qui commençaient à s'inquiéter sérieusement sur l'avenir de leur club. Il aura fallu une mobilisation générale portée par un sursaut de dignité des supporters — auxquels il faut rendre un vibrant hommage — pour échapper au purgatoire. Nous n'étions pas loin. C'était inespéré. Tout le monde pariait sur la chute. Mais, grâce à la volonté des dirigeants, joueurs et supporters, la JSK a été sauvée. Pendant longtemps, le club a été géré de manière anarchique. La structure administrative de manière globale était loin d'être digne de l'envergure d'un club comme la JSK. Des aspects stratégiques comme celui de la formation, de l'organisation moderne ont été abandonnés. C'est à tous ces chantiers que Chérif Mellal et son équipe se sont consacrés. – Le président Mellal parle d'un projet sportif complet. En quoi consiste-t-il ? La nouvelle direction estime nécessaire que la JSK possède toutes les structures et infrastructures dignes d'un grand club professionnel pour pouvoir ensuite penser à la formation, à la création d'une académie, d'une administration moderne, à mettre en place un système d'autofinancement. Le projet est en cours et suscite l'adhésion de tous. C'est un projet ambitieux auquel les sponsors adhèrent. Nous pensons également intégrer ces derniers soit en association, ou en partenariat ou en sponsoring. C'est un projet global et intégré qu'on veut mettre en place. – Comment est le climat ambiant à Tizi Ouzou, favorable ou pas, serein ou parasité ? Favorable, je dirais non, mais pas aussi défavorable au point où l'on pourrait désespérer. Vous savez, depuis des années on a laissé s'installer des habitudes néfastes et des comportements étrangers qui nuisent au prestige de la JSK. Il reste encore des personnes étrangères au club qui ont pris l'habitude de s'ingérer dans la gestion du club, de vouloir imposer leurs lois, des joueurs, proposer des recrutements et demander des comptes alors qu'il n'ont absolument rien à voir avec la gestion de l'équipe. Il reste encore des personnes au sein du club qui manigancent insidieusement. Fort heureusement, elles sont minoritaires. Une fois que le club sera remis sur sa voie historique, ces perturbateurs se retrouveront hors d'état de nuire à la JSK. – Vous incarnez la belle histoire de la JSK des années 1970-1980. Qu'est-ce qui différencie votre époque de celle d'aujourd'hui ? Les temps ont changé non seulement pour le sport, mais aussi dans tous les domaines de la vie. A notre époque, les joueurs vivaient au milieu des supporters, étaient très proches d'eux, aussi bien à la JSK que dans les autres clubs. Il y avait une communion. Les joueurs étaient sensibles aux appels et aux doutes des supporters. Tout le monde était impliqué. Ont jouait avant tout pour les rendre heureux. Aujourd'hui, avec la professionnalisation, le joueur est à l'hôtel, s'entraîne, fait sa compétition et rentre chez lui, ailleurs. Ce qui fait perdre un peu son âme au club. Nous avons conscience de tout cela. Et c'est dans cet esprit qu'avec Chérif Mellal nous avons décidé qu'à chaque fois que cela est possible, d'emmener l'équipe s'entraîner dans les villages pour permettre aux jeunes joueurs de s'imprégner de ce qu'est la JSK. C'est également une manière de leur inculquer ce qu'incarnent la JSK, son histoire, sa grandeur. – Par le passé, on disait souvent «jouer à la JSK, c'est jouer pour le nif (la dignité). Est-ce le cas aujourd'hui ? Je le dis toujours, la JSK, c'est plus que du football. C'est une histoire, un vécu et une culture. Il est vrai qu'aujourd'hui il y a trop d'argent. Cela a faussé les choses et surtout changé le rapport et l'amour qu'on a pour son club. Il suffit qu'un autre club propose un million de dinars de plus pour qu'un joueur quitte son équipe de toujours. Mais je reste convaincu que la priorité doit être donnée aux enfants du club issus de la région. Avec le projet du centre de formation, nous allons certainement renouer avec ce qui a fait la grandeur de la JSK. C'est à la fois le projet et la conviction de la nouvelle direction.