La rencontre, jeudi dernier, entre l'envoyé spécial de l'ONU en Libye, Ghassen Salame, et les chefs de tribu de Tarhouna, a laissé entendre que ces derniers exigent le départ de toutes les milices armées de Tripoli, leur dissolution ainsi que l'accélération du processus de tenue d'élections en Libye, selon les termes de l'accord de Paris entre les belligérants de la scène libyenne. Ces chefs de tribu justifient leurs requêtes par le fait que les milices armées ont mis les autorités politiques sous leur emprise, monopolisé les richesses des Libyens, comme l'attestent le renflouement des comptes bancaires des chefs de milice, alors que la majorité du peuple libyen vit dans la pauvreté. Le commandant du 7e bataillon, Abderrahim Al Kani, a déclaré hier que «les opérations militaires vont se poursuivre jusqu'à la sortie des milices armées de Tripoli et le retour de l'autorité de l'Etat sur ses institutions». Le politologue libyen Ezzeddine Aguil constate que les requêtes des chefs de tribu de Tarhouna concordent avec celles du maréchal Haftar. Aguil a rappelé que Haftar avait décidé en mai dernier de stopper les exportations de pétrole à partir de l'Est libyen et de ne plus reconnaître les institutions de la Banque centrale et de l'Etablissement national du pétrole, avant de revenir à de meilleurs sentiments, mais les requêtes de Haftar de faire sortir les milices armées de Tripoli et les dissoudre résonnent encore. De là à dire que Haftar serait un allié objectif, il n'y a qu'un pas que l'ex-porte-parole du Conseil national de transition, Abdelhafidh Ghouga, a franchi. «Il ne faut pas oublier que Haftar a des liens dans la tribu Ferjan, basée à Tarhouna. En plus, le gros du 7e bataillon s'est entraîné dans l'Académie militaire de l'Est libyen. Enfin, ce n'est pas un hasard, s'ils attaquent Tripoli du côté des quartiers KhillatFerjan et Salaheddine, connus pour l'origine de Tarhouna et Beni Oulid de leurs habitants», explique Ghouga, qui n'exclut pas que Haftar soit avisé de cette attaque, dans la mesure qu'il partage les mêmes objectifs. Les milices armées ne sont pas parvenues à contrer l'avancée de ces militaires de carrière. Les mots d'ordre du gouvernement Al Sarraj n'ont pas, non plus, été respectés. Les chefs de tribu de Tarhouna ont expliqué à Oussama Jouili, le commandant de la région militaire ouest, qu'ils refusent toute interposition de l'armée devant leurs troupes. Identité C'est dire que le 7e bataillon ne reconnaît pas Jouili comme supérieur militaire, ni Al Sarraj comme chef d'état-major des armées. Le 7e bataillon n'a pas fait beaucoup de bruit depuis son ralliement, durant l'été 2016, au gouvernement de Fayez Al Sarraj. Le ministre de la Défense de l'époque, Mehdi Barghathi, lui a attribué le rôle de protection du sud de Tripoli, en se basant dans la zone de Oued Rabii. Le gros du bataillon est formé de soldats libyens, ayant appartenu à l'armée d'El Gueddafi, originaires notamment de Tarhouna et Beni Oualid, les fiefs de l'ancien régime. Le cousin de Mouamar El Gueddafi, Ahmed Gueddaf Eddam, a par ailleurs déclaré, vendredi dernier, à partir du Caire, le soutien des «gueddafistes» au mouvement des troupes de Tarhouna. Il est utile de souligner que Fayez Al Sarraj a déclaré, jeudi dernier, que le 7e bataillon ne relève pas de son autorité, depuis avril dernier. Néanmoins, les éléments de ce bataillon continuent à percevoir des salaires de la trésorerie publique. Mais les questions les plus pertinentes concernent le financement de cette campagne militaire et les raisons de l'alliance entre ces «gueddafistes» et les troupes de Salah Badi, un commandant militaire de Misrata, de la mouvance proche de l'islam radical du mufti Sadok Ghariani. «Tout le monde cherche à mettre pied à Tripoli. Mais, cela n'explique pas tout», explique le juge Jamel Bennour, ex-président du conseil local de Benghazi.