Les travaux de la session extraordinaire des ministres arabes des Affaires étrangères s'ouvrent aujourd'hui au Caire avec pour principal ordre du jour l'examen du dossier des réformes institutionnelles de la Ligue arabe. Les fortes appréhensions ayant précédé ce rendez-vous, présenté comme la dernière ligne droite dans la préparation de l'avant-projet de refonte des structures de l'organisation panarabe, en raison de la grosse polémique ayant opposé depuis de longs mois l'Algérie à l'Egypte concernant la nature des réformes à apporter, se sont estompées. Celles-ci ont décliné à la suite des entretiens successifs qu'a eus Abdelaziz Belkhadem, le ministre algérien des Affaires étrangères, avec le président égyptien Hosni Moubarak et le secrétaire général de la Ligue arabe, Amr Moussa. Initiatrices chacune d'elles d'un projet global de réforme de la Ligue arabe globalement similaire, l'Algérie et l'Egypte s'étaient toutefois opposées « vigoureusement » concernant le volet inhérent à l'alternance au poste de secrétaire général introduit par la partie algérienne. L'Egypte ayant vu dans le projet algérien une remise en cause de son statut d'« ancien » au sein de la Ligue arabe. L'opposition égyptienne au projet de réforme soumis par l'Algérie s'est manifestée, durant l'année 2004, à travers une campagne de presse soutenue dirigée contre Abdelaziz Belkhadem et destinée à « diaboliser » les propositions algériennes. Régulièrement alimentée par la presse gouvernementale égyptienne, la controverse autour des réformes de la Ligue arabe a irrité le gouvernement algérien au point que celui-ci a fait dernièrement une entorse à ses habitudes diplomatiques, traditionnellement fondées sur la retenue, pour rappeler sévèrement à l'ordre la partie égyptienne. « L'Algérie n'acceptera pas l'idée d'une Ligue arabe annexe au ministère égyptien des Affaires étrangères », avait déclaré récemment Abdelaziz Belkhadem pour dénoncer le climat néfaste entourant le débat sur l'avenir du monde arabe. Mais bien qu'exaspéré par l'attitude des médias égyptiens, Abdelaziz Belkhadem a pris soin d'expliquer que les propositions algériennes, contrairement à la manière dont elles sont perçues au Caire, ne visent pas la personne de Amr Moussa, encore moins l'Egypte, mais avaient plutôt pour but d'initier la réforme des mécanismes de l'action commune et des structures de la ligue. Ce discours que Abdelaziz Belkhadem a tenu une nouvelle fois à l'occasion de son séjour au Caire a visiblement été compris puisque la partie égyptienne n'est plus revenue sur le sujet. Amr Moussa a également soutenu, hier, que cette question (celle relative au projet de présidence tournante) « ne saurait donner lieu à une polémique, encore moins à une polémique impliquant la Ligue arabe ». En guise de bonne foi, M. Belkhadem a d'ailleurs annoncé que l'Algérie n'a pas de candidat au poste de secrétaire général de la ligue et qu'elle soutient la candidature de l'ancien ministre égyptien des Affaires étrangères, Amr Moussa. L'algérie maintient son projet Les travaux de la haute commission mixte algéro-égyptienne qui se sont tenus parallèlement aux réunions préparatoires de la session des ministres arabes des Affaires étrangères prouvent que la qualité des relations algéro-égyptiennes a été déterminante dans ce retour à la normale. Néanmoins, l'apaisement notable de l'atmosphère ne signifie pas que l'Algérie et l'Egypte ont décidé de retirer ou d'arrêter de défendre leurs projets respectifs, ainsi que rapporté par certaines agences de presse. Mal saisie, la nuance des discours de l'Algérie et de l'Egypte a suscité en effet la confusion au sein de la presse. A ce propos, Alger tout autant que Le Caire ont signifié durant la même journée qu'ils soumettront, dès aujourd'hui, leurs propositions à la réunion extraordinaire. La position de l'Algérie a d'ailleurs été confirmée par le ministère des Affaires étrangères. Le fait, pour l'heure, que l'Algérie et l'Egypte tiennent chacune à leurs propositions ne veut pas dire que les deux pays ne parviendront pas, à terme, à un consensus. Tout reste possible. En ce sens, le voyage que Amr Moussa doit effectuer le 23 janvier à Alger en prévision du sommet d'Alger de la Ligue arabe prévu le 22 mars prochain peut être destiné justement à forger une entente entre les deux grandes capitales sur cette épineuse question des réformes. De prime abord, le long feuilleton du « secrétariat tournant » animé par la presse caïrote devrait amener les membres de la Ligue arabe à ne plus sortir, à l'avenir, du cadre des débats « conventionnels » sur la réforme de la Ligue arabe. Au regard des grands problèmes opposant certains pays comme l'Arabie Saoudite et la Libye, cela paraît difficile. Mais gardons néanmoins à l'esprit que la tradition arabe a souvent habitué à de spectaculaires revirements de situation.