Coordonnées par Bouba Mohammedi Tabti, ces «impressions de lecture» sont une jonction entre deux entités que rien ne semble lier si ce n'est les paradoxes. Entre le pays de la neige et celui des sables, il y a, pourtant, beaucoup de points en commun. Comme les auteurs algériens, les Québécois entretiennent un rapport très créatif avec les langues : Jacques Poulin, qui intègre l'anglais à la narration en français; Antoine Maillet qui use d'un français métissé; Laferrière qui introduit le créole et Ducharme, «phénomène» qui s'inscrit dans l'originalité de la «parlure». Chez les Québécois comme chez les Algériens, la littérature avait une fonction particulière avant de prendre son envol. Dans les années 1950, les romanciers algériens avaient pour mission de témoigner. Entravée par cette nécessité, la liberté de création ne reprend ses droits qu'après l'indépendance. Au Québec, la littérature avait également une «fonction de suppléance qu'elle se voit attribuer par rapport aux autres discours sociaux», explique le coordinateur de cet ouvrage, en reprenant les termes de Lise Gauvin, spécialiste des rapports entre langue et littérature. Mais aujourd'hui, les auteurs québécois usent de cette littérature à leur guise, notamment en «faisant entendre leur langue, leur voix originelle et privilégiant une fonction ludique». Impressions de lecture, c'est tous ces éléments et bien plus. Bien plus de choses qui rapprochent, qui ouvrent des brèches, qui tendent une passerelle entre deux pays lointains, dans deux continents opposés. (*) Littérature canadienne, impressions de lecture, édité par les éditions Tell. 134 pages, mars 2005.