L'article commence par une question suivie d'une réponse : « L'opposition politique a-t-elle le droit d'exprimer son opinion en Algérie ? » « Théoriquement oui, puisque c'est garanti par la Constitution. Mais dans les faits, c'est une autre histoire... » « La télévision, chasse gardée du pouvoir en place, mise au service presque exclusif du candidat Bouteflika, ne se gêne d'ailleurs plus d'exclure ouvertement du débat tous les partis qui ont une vision différente sur la manière de concevoir la gouvernance dans notre pays. » Il me semble que cette flagrante violation des dispositions constitutionnelles par ceux-là mêmes qui ont la charge officielle de les respecter, protéger, sauvegarder et défendre, est fréquente et variée. Mais au-delà de ce constat qui bénéficie provisoirement de l'impunité officielle nationale et internationale, je voudrais faire quelques remarques sur le concept « opposition politique », afin de clarifier et expliciter l'enjeu politique que peut recéler l'article, selon mon humble point de vue. En Algérie, l'opposition politique n'a pas la même acception, la même signification du concept qu'en Occident. Il convient tout d'abord de distinguer « l'opposition du pouvoir » de « l'opposition contre le pouvoir ». Ensuite, faire en sorte que l'amalgame ne soit pas vite fait entre elles. Car il est souvent intentionnellement fait, afin que la première forme d'opposition, autoproclamée ou désignée, puisse parasiter la seconde, lui faire de l'ombre et la décrédibiliser aux yeux de l'opinion publique. En fait, l'opposition du pouvoir a en réalité accès à ces médias lourds pour émettre un discours anti-gouvernemental, chaque fois que le pouvoir éprouve la nécessité de faire parler sa façade pseudo-démocratique. Mais ce discours d'opposition ne résiste ni au temps qui va faire tomber les masques ni au comportement qui va trahir la duplicité de cette opposition de service avec ce système, tout en contrant son candidat présidentiel. Quand bien même cette opposition cherche sincèrement à réformer le système de pouvoir, elle s'oppose par principe à son changement radical. Elle participe à sa restructuration ou à sa réforme, chaque fois qu'il lui fait appel. Elle prétend aboutir à l'Etat de droit en réformant de l'intérieur ce système qu'elle pérennise en réalité. Elle est donc consubstantielle de ce système qui lui a donné naissance et qui l'entretient. Elle s'oppose ainsi au remplacement radical de ce système de pouvoir qui lui assure un cordon nourricier de la rente nationale, au détriment du statut de citoyenneté qu'elle prétend défendre, et contrairement à l'éthique politique. Ce comportement se trouve précisément à l'opposé de celui de l'opposition politique contre le pouvoir, laquelle est incarnée par le FFS depuis 1963 à ce jour. Se référant en permanence à l'idéal démocratique auquel il est idéologiquement attaché, le FFS de Hocine Aït Ahmed, avait dénoncé, dès le début, en 1963, en même temps que le PRS de feu Mohamed Boudiaf, le système de pouvoir qui avait squatté l'Etat de l'Algérie indépendante en se passant de l'avis de la population. Cette valeureuse population qui venait pourtant de libérer sa patrie après tant de sacrifices. Elle n'a pas été libérée pendant qu'elle dormait, comme voudraient le faire croire les usurpateurs de sa souveraineté qui s'étaient organisés au sein de la prétendue famille révolutionnaire corrompue par les privilèges matériels de l'immorale attestation communale.Ce système a cependant réussi à tromper des Algériennes et Algériens et leurs élites, un quart de siècle durant, jusqu'à la révolte sanglante d'octobre 1988. A ce moment-là, au lieu de se ressaisir et de rejoindre le FFS, ces Algériens et leurs élites se sont plutôt prêtés à la manipulation du système, en acceptant de s'assimiler aux éléments constitutifs de la façade démocratique de ce pouvoir. C'est-à-dire que ces élites se sont organisées en opposition du pouvoir, afin de légitimer sa pérennité et profiter des privilèges corrupteurs qu'offre la rente nationale. Mais on ne peut pas tromper tout le monde et tout le temps !Même si l'une de ces élites déclare actuellement qu'« il y a urgence à créer une synergie, une insurrection citoyenne pour disqualifier ces élections », ou bien « on ne peut pas sauver l'Algérie et le régime », tandis que l'autre élite prend conscience que « Les Algériens ne sont pas dupes…qu'ils veulent l'Etat de droit… », ces élites donc de l'opposition du pouvoir se sont démasquées car leur comportement s'est avéré toujours décalé par rapport à leurs beaux discours. Ces élites-là, autoproclamées démocrates du CNSA (Conseil national de la sauvegarde de l'Algérie), avaient contré le FFS qui défendait la continuation démocratique du processus électoral des législatives du 26 décembre 1991. Malgré les conséquences tragiques nationales qui ont suivi leur comportement en faveur du système, elles montrent aujourd'hui qu'elles conservent intacts leurs réflexes naturels d'opportunisme. Cela s'explique par le fait que ces élites-là ne sont pas des démocrates à l'image du FFS qui se réfère à l'idéal démocratique et à l'éthique politique et dont le discours est conforme, d'une façon rigoureuse, cohérente et constante, à son comportement quotidien. Mais qu'elles s'attribuent le titre de démocrate, plutôt, par rapport aux intérêts et à leur seule opposition à l'intégrisme islamiste algérien dont ils ont amplifié la psychose de terreur. Cette dernière sera fallacieusement assimilée à celle de l'Iran, puis vite greffée ensuite sur la terreur du 11 septembre 2001 à New York de Bush. C'est pourquoi il est incorrect de mettre dans le même sac de la démocratie, ces démocrates-là et le FFS. Car comme on dit, « Chassez le naturel, il revient au galop ! » En effet, malgré l'intense démoralisation du citoyen par la mauvaise gouvernance, le peuple est de plus en plus désabusé. Il a fini par se rendre compte de cette usurpation originelle de sa souveraineté perpétrée sous le couvert de la mythique « légitimité révolutionnaire » ou de la prétendue « sauvegarde » de l'Algérie. Sa méfiance accrue cède désormais la place à la désaffection. Cela d'autant plus que le pouvoir l'empêche de s'organiser d'une façon autonome, et le quadrille pour mieux le dominer et le clochardiser. Ainsi, l'écrasante majorité du peuple se désintéresse de plus en plus des scrutins pipés d'avance, particulièrement des présidentielles et des législatives, qui constituent la vitrine de la fallacieuse démocratie du système en place. Il ne votera ni par oui, ni par non, ni par l'abstention, pour assurer la pérennité du système de pouvoir obsolète. C'est pourquoi il boycottera tout simplement, en ne participant plus à la fête électorale empoisonnée, d'autant plus qu'elle est organisée, sans honte aucune et avec les deniers publics, en l'honneur de l'élu membre du sérail clanique. Le FFS a eu l'intuition de lâcher ce système de pouvoir et d'exiger son remplacement radical, démocratique et pacifique. Il se retrouve en harmonie avec les sentiments refoulés des Algériennes et Algériens, des citoyennes et citoyens qui exigent un Etat de droit au lieu de l'Etat providence en place aggravé par l'Etat policier et intégriste. C'est avec leur engagement conscient et libre qu'il souhaite concrétiser cette alternance radicale, démocratique, citoyenne et pacifique en faveur de l'Etat de droit de la deuxième République algérienne. R. L'auteur est : Ophtalmologue (1) Article d'El Watan du 11 mars 2009, p. 19, « Vu à la Télé », de A. Merad.