Le candidat Mohamed Djahid Younsi a préféré le contact direct avec la population en empruntant le principal boulevard du chef-lieu de wilaya par un jeudi, où la foule des badauds est plus dense que les autres jours. Il s'est arrêté à une cafeteria pour y déguster un café et engager la discussion avec les gens. Ensuite, il a improvisé un mini-meeting sur la place Boudiaf. Lors de sa première halte, il a fait un bref discours qu'il a voulu « 100% sportif », selon ses termes, titillant son public à propos des deux clubs fanions de la ville. Cependant, son auditoire ne l'a pas suivi sur ce terrain, l'interpellant plutôt sur les questions du chômage, de l'érosion du pouvoir d'achat et autres situations sociales. A sa deuxième station, place Mohamed Boudiaf, lieu où se tient un hétéroclite commerce pratiqué par les exclus du système, c'est sur ce sujet qu'il a axé son discours où la référence coutumière des islamistes à la religion était absente, un discours puisant aux mots simples du langage des humbles. Le candidat d'El Islah était, lui, sur le parvis du monument aux morts où il venait de déposer une gerbe de fleurs, ce qui est inhabituel même lors des dates commémoratives, l'éloigné cimetière des chouhada ayant les faveurs des autorités pour ce genre de manifestations. M. Younsi a profité de son podium improvisé pour haranguer la foule agglutinée, piquée de curiosité par son insolite présence. Bien qu'aucunement tribun, l'orateur a su accrocher l'assistance par un débat improvisé. Pleinement engagé dans le mouvement de cette action de proximité, il a été confronté à la détresse d'un marchand de breloques qui l'a invité à constater de visu combien il avait de la peine à gagner 100 DA par jour. A la vue de son misérable étal de vieilles sandales, de vieux boulons et autres objets de récupération, juste derrière le monument aux morts, le candidat à la présidentielle a été saisi d'une forte émotion. Sa réaction et ses sanglots contenus ont marqué les esprits de la foule qui l'avait suivi. Néanmoins, si pour certains observateurs présents, vu la persistance d'une émotion apparemment non feinte, nul ne sait à quel moment l'homme politique, un homme censé avoir la maîtrise de soi, l'a prolongée. Mais surtout l'on s'interroge sur ce que pourrait impliquer de fâcheux cette tendance à une émotivité à fleur de peau chez un candidat à la magistrature suprême.