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« La route supporte 90% de l'activité économique »
Amar Ghoul. Ministre des Travaux publics
Publié dans El Watan le 23 - 01 - 2005

Dans cet entretien, le ministre des Travaux publics Amar Ghoul passe en revue l'ensemble des projets en cours de réalisation dans son secteur. Il s'est longuement étalé sur l'autoroute Est-Ouest qui, d'après lui, est un projet structurant d'envergure maghrébine, africaine et méditerranéenne. Le tronçon de la région Centre d'une longueur de 450 km sera réceptionné en 2005. Son département, a-t-il souligné en outre, s'attelle, avec la contribution d'autres secteurs, à rendre la circulation plus fluide dans tout le territoire national.
Quel est le niveau de réalisation du projet de l'autoroute Est-Ouest ?
L'autoroute Est-Ouest est un projet structurant hautement stratégique pour l'Algérie. Cette autoroute passe par 24 wilayas économiques industrielles qui sont les plus peuplées. Dans la cadre de l'aménagement du territoire, c'est une solution qui a été recherchée depuis des années. On est arrivé, en outre, aujourd'hui à subir un terrible fléau : les accidents de la route. Plus de 80 milliards de dinars annuellement sont engloutis dans les frais d'hospitalisation et autres suite aux accidents de la route. Toutes les études donnent comme solution les autoroutes qui diminuent un sixième du nombre d' accidents. Ainsi sur une route, on enregistre six accidents contre un sur une autoroute. Pour ce qui est de l'état des lieux de l'autoroute Est-Ouest, nous avons achevé et finalisé les études sommaires dites APS pour tout le tronçon. Quant aux études détaillées qui sont faites avant l'exécution, nous avons achevé 900 km et le reste, environ 300 km, est en cours d'achèvement. Il nous reste les tronçons qui vont vers la frontière tunisienne et vers la frontière marocaine, sur lesquels se penchent des commissions de coordination. Au niveau de la réalisation, nous avons donné la priorité à la région centre du pays (de la frontière de la wilaya de Chlef à la frontière de la wilaya de Bordj Bou Arréridj), qui est la plus saturée. C'est un tronçon de 400 km. Entre 2000 et 2004, nous avons pu mettre en chantier environ 350 km (la partie du Centre et une bonne partie du contournement de Constantine). Dans les 350 km, nous avons des projets livrés à la circulation et d'autres sont en cours de réalisation. En 2005, près de 450 km seront réceptionnés. Dans la partie Centre, il nous reste environ 120 km pour parachever le projet. Les parties est (de Chlef à la frontière marocaine, soit 400 km) et ouest d'égale distance ont été engagées dans la cadre de la concession (financement, réalisation, exploitation et gestion). Nous allons parachever ce qui reste et mettre petit à petit en concession des parties achevées. Nous avons eu une quarantaine d'offres émanant de tous les continents. Nous avons sélectionné les plus fiables dans le cadre d'un conseil interministériel. Il y avait des offres américaine, italienne, française, malaisienne et une autre chinoise. Récemment, on a eu d'autres offres américaine, chinoise, et des Emirats arabes unis. Nous sommes en train de préparer le dossier pour le présenter au gouvernement. En janvier et en février, nous aurons des discussions avec certains groupements. Ce qui reste, on peut le construire en 3 ans, car c'est seulement du plat. Nous allons exiger dans le cahier des charges de construire tous les tronçons restants simultanément. A l'horizon 2008, nous achèverons l'autoroute Est-Ouest si nous entamons les travaux en 2005.
Peut-on savoir combien a coûté l'autoroute Est-Ouest jusqu'à présent ?
Les tronçons que nous avons réalisés ont coûté environ un milliard de dollars. Les autres tronçons restants et les équipements de l'autoroute vont nous coûter quelque trois à quatre milliards de dollars.
Vous allez introduire le système de péage avec ce projet. Comment allez-vous procéder ?
Une étude économique et financière et une étude écologique et environnementale approuvées par la Banque mondiale démontrent que nos autoroutes sont rentables. On arrive jusqu'à 19% de rentabilité. C'est très encourageant. D'autant plus que ces études ont été réalisées en 1997. Le taux de rentabilité est beaucoup plus important aujourd'hui, car il y a un accroissement terrible du parc auto. Le péage est conditionné par l'investissement, c'est pour cela qu'il est relié au budget alloué à la construction, à la densité du trafic et à la durée de la concession et au pouvoir d'achats du citoyen. Nous prendrons en considération tous ces paramètres lors des négociations. Je suis très optimiste, notre péage sera beaucoup moins cher que chez nos voisins et ailleurs. Il sera supporté par la densité du trafic. On s'attend aujourd'hui à plus de 50 000 véhicules par jour contre 12 000 à 15 000 précédemment. De plus, 40% du trafic, ce sont les poids lourds. Ce sera trois à quatre fois plus cher pour eux que pour les véhicules légers. Ce sera en tout cas un prix très raisonnable.
Les infrastructures routières se sont avérées insuffisantes avec notamment l'évolution du parc automobile. Comment comptez-vous y remédier ?
Le schéma directeur routier et autoroutier 2005-2025 nous guide à prendre en charge tout ce volet dans le cadre de trois opérations importantes. Il y a une opération de rattrapage. Nous avons 20 ans de retard à combler très vite pour réguler la circulation à travers le territoire national. La deuxième opération est la mise à niveau pour que nos routes répondent aux normes internationales. La troisième opération, c'est le développement qui concerne les nouveaux projets qui seront lancés. Une loi cadre des travaux publics sera présentée le premier semestre 2005 et va prendre en compte tout ces aspects. Nous avons comme priorité de réhabiliter et de moderniser l'autoroute côtière, c'est-à-dire d'Alger jusqu'à l'est du pays et d'Alger à l'Ouest. Nous comptons aussi sur l'apport de l'autoroute Est-Ouest et la construction de la rocade des Hauts-Plateaux. La deuxième rocade d'Alger, celle d'Oran, celle de Tizi Ouzou et l'évitement de Béjaïa font également parties de nos priorités sans oublier les évitements de plusieurs autres grandes villes et des voies périphériques express. Il y aura aussi la transsaharienne Alger-Lagos. Nous avons aussi engagé des projets que nous appelons les pénétrantes Nord-Sud pour structurer notre réseau. Un recensement concernera les points de congestion dans les centres urbains. Nous avons établi une cartographie de tout le territoire national et avons répertorié 370 points de congestion. D'ici à la fin 2006, nous les supprimerons tous. Au sujet des points noirs, dont le nombre est de 350, nous espérons les éliminer totalement d'ici à la fin 2006.
Quel est l'état d'avancement de la transsaharienne ?
D'Alger jusqu'à In Guezzam, il nous reste seulement 200 km qui relient In Guezzam à Tamanrasset ainsi que la branche malienne. Nous aurons en février, une rencontre spécifique avec les pays concernés pour, d'une part, évaluer le projet et, d'autre part, parachever ce qui reste.
Justement, quelle est l'importance du transport routier par rapport à l'ensemble des moyens de transport en Algérie ?
Le transport routier est sollicité à 90% par rapport aux autres moyens de transport. Même dans le volet économique et commercial, 90% des activités se font par route. On aurait dû après l'indépendance, prendre des choix pour réguler entre le rail, le transport maritime et la route. Nous travaillons à travers le schéma directeur routier et autoroutier et le schéma directeur ferroviaire engagé par le ministère des Transports pour réguler le transport et la communication dans cette optique. Le problème se pose également pour le transport par mer. Près de 95% de l'échange commercial se fait par voie maritime. Qu'en est-il alors de la voie aérienne, les charters et les avions-cargos ? Le ministère des transports a également engagé une réflexion pour régler cette question. Les infrastructures routières, maritimes, ferroviaires et aériennes doivent se répartir la tâche et accorder leurs violons.
Qu'en est-il des infrastructures portuaires et aéroportuaires ?
Nous y travaillons avec le ministère de l'Aménagement du territoire et d'autres départements concernés, pour mettre en valeur notre potentiel touristique mais aussi pour des projections socioéconomiques. En ce qui concerne la pêche, d'ici à 2010, nous réceptionnerons10 ports de pêche pour donner un élan qualitatif au développement de ce secteur. Pour ce qui est des ports de commerce, en plus de la réorganisation des flux et trafics, nous allons créer de nouveaux ports. Un travail dans ce sens est fait en coordination avec le ministère des Transports, notamment pour le port de Djendjen afin de le rentabiliser. S'agissant des ports pétroliers et des hydrocarbures, nous avons à augmenter nos capacités d'exportation, nous sommes ainsi obligés de trouver des solutions adaptées. Il y a des solutions offshores, spécifiques et des solutions autres que nous étudions avec le ministère de l'Energie et des Mines. C'est un dossier qui est pris en charge dans le cadre d'une coordination intersectorielle bien établie. Notre côte dispose de 1280 km. Pour ce qui est des infrastructures aéroportuaires, de ce point de vue nous sommes bien étoffés. Nous avons plutôt un problème de flotte. Actuellement, nous avons 55 plateformes aéroportuaires dont 12 de niveau international en plus d'autres aéroports d'envergure régionale qui peuvent évoluer et devenir d'envergure internationale. Le problème de trafic nous impose d'ouvrir nos aéroports au transport de marchandises surtout pour certains produits ou opérations urgentes. D'ici à fin 2008, nous aurons quatre nouveaux aéroports qui sont en construction à Hassi Messaoud, Chlef, El Beyadh et Bordj Badji Mokhtar. Notre secteur a également engagé une action très importante de mise à niveau. Nous avons programmé 17 aéroports dans notre dispositif de réhabilitation qui entre dans notre schéma directeur des infrastructures aéroportuaires pour mettre à niveau nos aéroports.
Quelles sont les parts du public et du privé dans le financement des projets de votre secteur ?
Du point de vue réalisation, environ 70% sur le territoire national sont supportés par les entreprises publiques nationales, entre 20% et 25% reviennent aux entreprises privées, nationales et 5 à 10% aux entreprises étrangères.
En fait, quelle est la valeur du marché du secteur des travaux publics ?
Annuellement, nous avons un programme de 150 milliards de dinars soit 1,5 milliard de dollars. C'est le programme en cours pour les travaux publics qui varie entre 100 et 150 milliards de dinars par an. Pour ce qui est de nos besoins, pour 2005-2010, il nous faut au moins 500 milliards de dinars.
Nora Boudedja , Rabah Beldjena


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