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L'histoire revisitée… (3e partie et fin)
Publié dans El Watan le 27 - 12 - 2006

Quel est alors ce facteur qui met en ligne de mire le monde musulman, ou, en d'autres termes, à qui profite ce clash de civilisations ? Dans les années 1970 et 1980, on a beaucoup parlé du «déclin américain». Paul Kennedy, dans son ouvrage The Rise and Faïl of Great Powers (1988), a tenté de l'expliquer par le poids des responsabilités politiques de la première puissance mondiale, le complexe militaro-industriel, en particulier, drainait cerveaux et capitaux au détriment du reste de l'économie qui en devenait moins compétitive. Il donna l'exemple du Japon, qui, libéré du poids de l'effort de défense, a plus réussi jusqu'à devenir le principal rival économique des Etats-Unis. Une autre thèse de Samuel Huntington, réponse à celle de Paul Kennedy. Il explique que «le consumérisme et non le militarisme est ce qui menace l'économie américaine.» Il dit que «le déficit commercial n'est à ses yeux que le revers de la médaille de l'énorme appétit de consommation des Américains, Ainsi, s'explique la forte croissance des années 1990, mais aussi le niveau d'épargne particulièrement faible. Le taux d'épargne des ménages n'est jamais supérieur à 5% dans les années 1980-1990, il devient même négatif en fin de période. Tout se passe comme si les Etats- Unis vivaient depuis trop longtemps à crédit, au risque de compromettre l'avenir.» A notre sens, les thèses de ces deux historiens sont toutes deux justes, elles ne s'opposent qu'en apparence.
Quand on pense aux 725 bases américaines dans le monde à financer, aux moyens logistiques considérables (maintenance, renouvellement de l'armement, etc.) pour le maintien de leur niveau opérationnel, on comprend pourquoi bon an mal an, elles nécessitent un budget de financement faramineux : plusieurs centaines de milliards de dollars. Ce budget adossé au consumérisme américain dont une bonne partie à crédit, difficilement remboursable, a un impact direct sur la dette extérieure nette américaine. Le solde de cette dernière est désormais négatif, les Etats-Unis ont été pour la première fois, depuis 2005, des payeurs nets de revenu de facteurs. Cela veut dire que plus le déficit courant augmente plus les Etats-Unis doivent débourser des dividendes au reste du monde qu'ils n'en reçoivent. Au train où vont les déficits courants et la dette extérieure et si les Etats-Unis ne font pas l'effort de réajuster leur économie aux nouvelles donnes, ce n'est pas le clash des civilisations mais plutôt le clash de l'économie américaine qui poindra dans quatre ou cinq années, à l'image de ce qui s'est passé pour l'ex-URSS en 1990-1991. Les Etats-Unis ne peuvent vivre indéfiniment à crédit, le financement extérieur tôt ou tard atteindra ses limites, par conséquent le dollar dopé par le financement extérieur risque le même sort que ce qui fut pour la rouble soviétique en fin de règne de l'empire soviétique. Au vu de cette argumentation, il apparaît dans le raisonnement de Samuel Huntington, une «antinomie». Visible, en effet, du seul fait qu'il prêche d'un côté une mise en garde contre la menace du «consumérisme» qui plane sur l'économie américaine, de l'autre, une lutte contre «l'expansion de la puissance militaire des Etats confucéens et islamiques». Une thèse et une antithèse qui se résout par le «clash des civilisations». En réalité, en évitant, ce qui est perceptible dans son raisonnement, d'inclure l'effort de défense américain dans le déséquilibre économique américain et d'en faire même de celui-ci le fer de lance de la politique étrangère américaine, cette thèse «de consommer moins mais de se militariser plus» revient ni plus ni moins à prôner une «économie de guerre». Ce qui revient à faire fi des effets de la mondialisation, Huntington oublie que le monde d'aujourd'hui n'est plus le monde d'antan, l'économie et même la militarisation sont globalisées. La puissance américaine repose sur plusieurs centaines de bases essaimées dans le monde, ces bases et ces floues de combat sont des sentinelles avancées qui veillent sur l'ordre américain. Pour financer armadas, arsenaux et bases-vie dans le monde, cette puissance US passe obligatoirement par l'ouverture économique de son marché aux pays alliés et non alliés. Le paradoxe de cette puissance est que, sans le déficit et sans financement extérieur, on ne voit vraiment pas comment la militarisation (selon Samuel Huntington) pourrait être soutenue. cette synthèse «de consommer moins mais se militariser plus» supposée se résoudre par un clash de civilisations est tout simplement «impossible». Pour qu'elle soit possible, il faut que la puissance américaine tire d'elle-même sa puissance militaire, c'est-à-dire ne finance pas ses déficits commerciaux et budgétaires par précisément les «Etats confucéens et islamiques». On ne peut, d'un côté, demander aux Chinois et aux Arabes des milliards de dollars pour financer le déficit en «consumérisme» et le déficit du «financement de ces 725 bases américaines dans le monde», de l'autre, leur déclarer le «choc de civilisations».
– 6. L'aire arabo-persique islamique
La théorie en vogue, le clash des civilisations, ne montre pas toutes ses failles. Tout d'abord, elle passe sous silence les Etats confucéens et reste orientée essentiellement sur une seule direction, le monde musulman. L'aire arabo-persique islamique, où se trouvent les plus grands gisements de pétrole du monde, occupe le devant de la scène mondiale, sur tous les plans : politique, économique, médiatique, etc. Ce n'est pas un hasard, si cette aire se trouve sous les projecteurs des médias, c'est dire qu'on ne peut oublier l'importance stratégique de cette région centrale qui va de l'Asie centrale au versant africain.
De son évolution dépendra la nouvelle redistribution des cartes du monde, d'elle se jouera en grande partie la destinée du XXIe siècle. On comprend dès lors pourquoi les grands décideurs politiques occidentaux ont adopté cette idéologie, non seulement pour faire accroire à l'opinion occidentale que le monde civilisé, c'est-à-dire «judéo-chrétien» se trouve face à une hydre «islamique» qui refuse les valeurs universelles (liberté, démocratie, modernité, etc.) mais pour montrer qu'elle repose sur des facteurs crédibles : faiblesse des régimes politiques, division politique des Etats, retard technologique, démocratisation limitée et contrôlée, archaïsmes, sont autant de repoussoirs contre l'Occident. De l'autre côté, c'est-à-dire des différents mouvements djihadistes en Irak et en Afghanistan, ils voient dans l'Occident, depuis la guerre du Golfe en 1991, un monde de barbarie et d'injustice à l'encontre de l'Islam et des pays musulmans. La guerre en Irak apparaît alors comme objectif et légitimation d'un combat contre l'occupation étrangère. La violence «libératrice», que l'on constate aujourd'hui de part et d'autre des parties en guerre, est aussi liée aux conflits asymétriques, c'est-à-dire aux rapports de forces inégaux qui se distinguent d'une guerre classique. De plus Les forces américaines comme les contingents occidentaux, qui les appuient d'ailleurs, sont conscients que l'objectif géostratégique qu'ils se sont donné ne repose sur rien de tangible. Des guerres précédentes à l'image des guerres coloniales, ou plus récente la guerre du Vietnam, l'occupation soviétique de l'Afghanistan, montrent, si besoin est, l'inanité de leurs actions coercitives contre des pays souverains. En s'embourbant en Afghanistan et en Irak, l'idéologie huntingtonienne ne peut que se retourner contre les Américains et leurs alliés. Pour les musulmans, ce clash s'est transformé en champs de bataille idéaux entre «forces du mal judéo-chrétiennes» qui agressent le monde musulman et les «forces islamiques ou forces du bien» qui défendent les musulmans contre l'envahisseur extérieur. A vrai dire, cette poussée islamiste n'exprime en fin de compte que des sentiments nationalistes nonobstant les errements islamistes en Egypte et en Algérie, relents de la guerre froide. L'Occident le sait très bien comme il le voit en Palestine, la victoire du mouvement Hamas aux élections législatives le doit au recul du Fatah face aux exigences sans cesse renouvelées d'Israël. C'est ainsi que devant l'incapacité de juguler ces mouvements djihadistes, les Américains de plus en plus cherchent à contourner cet obstacle en penchant pour une autre idéologie tout aussi utopique que la première, le Grand Moyen-Orient (GMO).
– -7. Conclusion
Le monde est aujourd'hui à la croisée des chemins. De part et d'autre de l'aire arabo-persique, des blocs se forment, les partenariats tant de l'Occident dont les Etats-Unis travaillent sans cesse le degré de compétitivité que du renouveau de la Russie et surtout de la Chine avec sa nouvelle stature dans la géopolitique asiatique et mondiale ; tout plaide à dire que la compétition va être rude et le développement des relations internationales incertain.
Cela étant, l'unilatéralisme de la première puissance mondiale en Irak était dicté précisément par le désir d'ériger une ceinture stratégique contre les ambitions russo-chinoises sur cette région. Les attentats du 11 septembre 2001 ont été le maillon qui manquait à la mise en œuvre de cette stratégie. La guerre en Afghanistan avec la fin du régime taliban en 2002, suivi de la chute du régime dictatorial irakien en 2003, ont été un premier succès. Les problèmes ont commencé à apparaître pour les Etats-Unis, avec la montée en puissance de l'insurrection armée irakienne. Tous les plans américains ont été faussés et même en Afghanistan où l'Otan a du mal à contenir une nouvelle insurrection taliban en 2006. Si la guerre intercommunautaire qui se déroule en Irak est en faveur de l'occupation américaine puisqu'elle noie l'insurrection armée dans l'antagonisme chiite contre sunnite, il n'en demeure pas moins que plus le conflit s'exaspère plus il risque de mettre à néant tous les plans américains.Le conflit est fortement médiatisé, les pertes américaines augmentent en ampleur, toutes ces données préfigurent un nouveau désastre pour la politique américaine dans la région. Reste bien évidemment la crise iranienne, et là encore, engager un autre processus de l'unilatéralisme américain dans la région, en optant pour une guerre «préventive» contre l'Iran risquerait non seulement d'embraser la région, d'amener l'Europe à se désolidariser des Etats-Unis même de l'Afghanistan (crise de l'OTAN), mais surtout de créer un nouveau syndrome vietnamien. D'autant plus que la Chine partage les préoccupations russes devant l'implantation de bases américaines dans la région moyen-orientale.
Si les bases nouvellement acquises en Asie centrale par les Etats-Unis constituent un pôle stratégique pour la sécurité de la région, avec la création d'une force d'intervention rapide, on peut penser, comme le définissent des stratèges, que cette intrusion de l'OTAN au Moyen-Orient sous le couvert de la lutte contre le terrorisme, cherche à opérer un «encerclement de la Chine». Mais il est peut-être plus plausible de penser que cette intrusion cherche à protéger à l'Est l'aire arabo-persique vitale pour la superpuissance. Ainsi, l'Afghanistan apparaît comme une «ligne rouge» délimitant l'influence chinoise, aujourd'hui débordante grâce à l'émergence d'une diplomatie active. Cette implantation occidentale en Asie centrale entend préserver l'avenir, surtout avec l'essai nucléaire de la Corée du Nord et le risque d'une course aux armements nucléaires en Asie.
Si celle-ci se réalise, les Américains procéderaient à un repli stratégique, le Moyen-Orient serait alors la ceinture idéale et en même temps un point d'attache des forces américaines. Une contrainte, cependant, les Etats-Unis pourront-ils réduire leurs déficits jumeaux (commercial et budgétaire), donc leur «consumérisme» et leurs «dépenses militaires et la diminution de leurs bases dans le monde» comme cela a été pour l'ex-Union soviétique. Sans cela, les Etats-Unis vont aller droit au mur. Une dette extérieure nette qui aurait atteint un point de non retour entraînerait la fin des financements extérieurs. Une dévaluation du dollar bien qu'elle ait déjà commencé, nettement visible depuis quatre années, sera la plus grande catastrophe. Le monde entier sera touché, il sera difficile de parler de siècle américain ou de siècle asiatique, ce sera simplement, après une courte euphorie, un début de siècle en berne. Pourquoi au lieu d'un «clash de civilisations» stérile qui met le monde en péril, à commencer par les Etats-Unis, ne pas trouver des solutions pacifiques aux conflits en cours à même de diminuer les dépenses américaines et stabiliser un dollar de plus en plus discrédité ?
L'auteur est Chercheur


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