Alger, ville conçue pour une population estimée à un demi-million d'âmes, se trouve contrainte d'en contenir dix fois plus. Lorsque l'Algérie comptait environ 10 millions d'habitants, dans les années 1960, la ville disposait de trois grands hôpitaux (Mustapha Bacha, Maillot et Parnet) pour ne citer que les plus connus. Entre université, lycées, écoles d'administration…, la capitale assurait à ses occupants l'essentiel dont a besoin un individu pour son épanouissement. Cette situation a commencé à connaître ses limites dès le début des années 1980, et aujourd'hui, nous nous retrouvons devant une asphyxie et en panne d'imagination pour sortir du calvaire. L'encombrement de la capitale touche actuellement tous les domaines aussi bien dans la vie active que passive, personne ne trouve son compte et c'est le continuel «pousses-toi que je m'y mette». Pour mettre un terme à ce cycle, dans lequel se trouvent Alger et ses environs, il y a deux alternatives, ou il faut multiplier toutes les infrastructures par dix, voire plus, ou tout bonnement changer la destinée de la ville en la versant dans le tourisme. Dans le deuxième cas, il faudrait prendre son courage à deux mains et engager un grand chantier d'aménagement national, qui donnerait naissance à une nouvelle capitale sur les grands espaces des Hauts-Plateaux, avec des voies de communication adaptées, pour desservir toutes les grandes villes de la côte et de l'intérieur du pays, afin de donner le grand air dont a besoin toute l'Algérie. Le projet est économiquement rentable, et les moyens de le réaliser existent aussi dans le cadre d'investissements étatiques, privés, nationaux et étrangers. Pour cela, il suffit de créer un centre d'intérêt à la hauteur de l'événement pour permettre la contribution de tous les acteurs économiques. Pour ma part, il est impératif, pour nous, de ne pas rater cette marche pour préserver l'avenir très compromis par la très mauvaise occupation des espaces par un urbanisme empirique du pays. La population active pour participer au développement de manière acceptable et rationnelle doit obligatoirement bénéficier d'un environnement socioprofessionnel acceptable pour lui permettre d'assurer le support attendu par les différents secteurs d'activité, faute de quoi, toute l'économique serait compromise à tous les niveaux. C'est la situation que nous vivons aujourd'hui. Nous sommes devenus une société boiteuse. La saturation, générée par une forte demande de services, touche tous les secteur: santé, transports, éducation, loisirs… Circuler ou stationner, se promener ou se restaurer, se loger ou se reposer, se soigner ou s'entretenir deviennent des tâches difficiles pour la population à longueur d'année. Des individus soumis à ce rythme de vie, épuisés, ne peuvent rien apporter au développement économique que la société attend d'eux. Bien au contraire, il faudrait les prendre en charge sur le plan de la santé, car ils sont dans leur majorité rendus malades par le vécu quotidien. Le cadre de vie est fortement dégradé et rien ne vient apporter un équilibre pour pallier les déficits qui s'accumulent autour de nous. Les premiers lieux les plus indiqués pour assurer une récupération énergétique, tels que les espaces de restauration et de loisirs, ne répondent même pas au minimum requis, les repas proposés ne répondent à aucune hygiène, à aucune recette encore moins une saveur. Il faut être un affamé pour accepter d'ingurgiter une bouchée de nourriture. Même les restaurants classés sont loin de donner satisfaction en tenant compte du critère qualité-prix. Trop souvent, les prix affichés sont alignés sur ceux de l'Europe sans que le service suive. Prendre un bol d'air pendant les périodes estivales nécessite un déplacement hors de la capitale pour échapper aux mauvaises odeurs dues à la saturation des réseaux d'assainissement et la restriction de l'eau. Il est pratiquement rare de faire une promenade dans Alger sans être constamment agressé par ce phénomène qui tend à se généraliser et à se banaliser dans tous les quartiers. Dans ce cas précis, les pouvoirs publics, en attendant de prendre en charge ce nouveau fléau, si ce n'est trop demander, doivent en principe mettre gracieusement à la portée de la population qui vit dans la capitale et ses environs des masques pour se protéger de ce phénomène. Les Algérois, dans leur majorité, soumis à des agressions continuelles face à une ville désorganisée, donnent l'image d'une population malade, allergique et ne possèdant plus de force pour servir, comme le devoir l'exige, de support à ses gouvernants. En règle générale, une entreprise ne peut être forte que si son personnel à tous les niveaux est fort, il en est de même pour une administration, un ministère, une direction… Si nous sommes forts, tout le reste le sera, et si nous sommes faibles, tout le reste suivra. Pour vivre en harmonie, nous avons besoin du bonheur de toutes les personnes avec lesquelles nous partageons notre temps, notre vie, comme le buraliste, le boucher, le boulanger, le transporteur, le médecin, l'infirmier, les compagnons de notre vie. L'Algérie, grâce à Dieu, possède de grands espaces où nous pouvons préserver l'avenir des générations futures en puisant encore dans le peu d'énergie qui nous reste. Oui, il est possible, de lancer ce grand chantier d'une nouvelle capitale qui servirait de trait d'union entre le Nord et le Sud, d'Alger à Tamanrasset. De grandes voies de communication pourront être lancées à partir de l'espace choisi sur les Hauts-Plateaux vers les villes du Nord et vers celles du Sud. Un concours d'aménagement du territoire basé sur cette approche, je suis convaincu, inspirerait bien les spécialistes pour sortir sur le projet dont nous rêvons et qui permettrait à notre pays de se doter d'une véritable force qui le propulserait vers un avenir meilleur. Et face aux générations futures, nous aurons enfin le sentiment et la satisfaction du devoir accompli. Après quoi, Alger la Blanche doit être réhabilitée pour être le témoin de notre histoire passée, où nous pourrons, à l'occasion d'une visite, respirer son air marin qui l'enveloppe et l'entoure depuis la nuit des temps. Ce n'est ni un rêve ni une utopie, l'Algérie est ouverte à ses citoyens sur toute son étendue, pourvu que l'on sache en tirer le meilleur profit avec efficacité et efficience. Il ne faut pas dire comme Tristan Bernard, à qui l'on demandait s'il préférait aller au paradis ou en enfer, qui répondit : «Je préférerais le Paradis, à cause du climat. Mais l'Enfer doit être agréable, car j'y retrouverais mes amis.» L'Algérie est vaste, cessons de nous accrocher les uns aux autres. Le paysage urbanistique d'Alger est effrayant. Au lieu d'avoir des rues aux normes requises, nous avons des ruelles où peuvent se croiser difficilement deux voitures. Autour de ces ruelles sont érigées des villas de grand luxe, où les accès et les sorties sont pénibles et insupportables. C'est le cas de Dély Ibrahim pour ne citer que celui-là, connu de tous et inconsciemment convoité. Il n'y a que les sages qui reconnaissent leur faute, alors pour une fois, soyons sages, et notre pays se portera mieux et nous aussi avec la bénédiction de dieu. L'auteur est : Ingénieur, PGS en gestion,Cap Caxine, Hammamet Alger