La mort, jeudi, de deux travailleurs palestiniens et la disparition de trois autres dans l'effondrement d'un tunnel de contrebande au sud de la ville de Rafah, frontalière avec l'Egypte, alors que le monde célèbre la Journée des travailleurs, éclaire sur cette catégorie de citoyens, qui, à cause du manque de travail, n'hésite pas à risquer leur vie dans des besognes très difficiles. Ghaza : De notre correspondant Ces tunnels, qui se comptent par centaines, creusés sans respect des normes scientifiques, à 20 m de profondeur, d'un diamètre ne dépassant que rarement un mètre et d'une longueur variant de 700 à 1000 m, sont de véritables tombes pour les milliers de jeunes. M'hamad, un jeune élève de 17 ans à peine, visiblement éreinté, nous a dit à la sortie de l'un de ces effrayants puits : « Lorsqu'on descend dans ces tunnels, on n'est jamais sûr de revoir le ciel. Le moindre effort à cette profondeur où l'air devient rare, nous coupe le souffle. Certains perdent connaissance, mais on y retourne à chaque fois, car il n'y a rien d'autre à faire à Ghaza. Je fais vivre ma famille de 8 personnes, car mon père ne travaille pas. Il était maçon, mais comme le ciment n'est pas disponible à Ghaza depuis l'été 2007, il est est au chômage. Je fais ce travail depuis plus d'une année et j'essaye de ne pas lâcher mes études. L'année prochaine, je vais passer mon bac. Dans ce travail, ceux qui font le plus d'efforts et risquent leur vie dans les accidents d'effondrements sont ceux qui gagnent le moins, alors que d'autres, les patrons, qui ne sont jamais descendus, deviennent des millionnaires. Vous savez, plus de 60 jeunes sont morts dans des effondrements de tunnels et les blessés se comptent par centaines, mais rares sont ceux qui lâchent ce travail. » M'hamad n'est malheureusement qu'un cas parmi des milliers d'autres qui travaillent dans ce domaine, depuis le putsch armé du mouvement Hamas au mois de juin 2007 et l'imposition par Israël d'un embargo, ce qui a fait monter le taux de chômage de façon inégalée auparavant. Il est évalué actuellement à plus de 70%, alors que le taux de pauvreté a atteint les 80%. Selon des ONG palestiniennes et étrangères, pas moins de 75 Palestiniens sur 100 survivent grâce aux aides humanitaires. L'Etat hebreu bombarde fréquemment ces tunnels qui servent, selon l'armée israélienne, à la contrebande d'armes au profit du mouvement Hamas. Hélas, cette situation risque de perdurer, tant que le blocus israélien restera maintenu et que les points de passage de la bande de Ghaza restent fermés. L'entrée du ciment et d'autres matières premières permettra la relance de la machine économique dans la bande de Ghaza, seul garant de l'arrêt du travail pénible et infructueux, sauf pour les chefs contrebandiers, dans les tunnels de la mort, comme les qualifient les Palestiniens. Il est sûr aussi que la situation misérable, que vivent les travailleurs palestiniens et l'ensemble de la population, ne changera pas tant que se maintiendront les divisions interpalestiniennes qu'Israël utilise comme argument pour se démarquer de toute responsabilité.