Les étudiants avaient eu le plaisir de l'écouter. Ali Amran avait monté le groupe Tura pour jouer des morceaux musicaux différents les uns des autres de par les influences musicales rock, folk, funky, jazz etc. Dès son adolescence Ali a annoncé déjà son style et ses préférences. Il a commencé à s'intéresser à la musique en reproduisant les mélodies d'anciens chanteurs kabyles tels que Cheikh El Hasnaoui, Cherif Kheddam, Slimane Azem, Aït Menguellet, Matoub, Kheloui… Avec des instruments rudimentaires qu'il a fabriqués lui-même, Ali a écrit ses premières chansons vers l'âge de16 ans dans le genre traditionnel. Certaines ont été interprétées avec succès par des chanteurs populaires tel que Lani Rabah. Ensuite, c'est dans le campus universitaire de Tizi Ouzou qu'il fait ses premières armes dans le domaine de la musique «moderne» avec ses musiciens, avant d'aller s'installer en France. En 2000, Ali Amran arrive en France, la guitare à la main, une licence d'anglais et un magistère de langue et littérature berbères, une rencontre biculturelle chez Ali Amran qui a su intégrer l'une dans l'autre ; les deux influences ont suscité un style musical «folk rock», un style d'ouverture comme il le qualifie lui-même ; la chanson occidentale c'était pour lui les morceaux fétiches : Francis Cabrel, Moustaki, Paul Simon, les Beatles, Pink Floyd, Dire Strait, etc. Si l'initiative d'introduire le rock dans la chanson kabyle est à l'actif du groupe Abranis, aujourd'hui Ali Amran fait partie de ces artistes kabyles qui ont décidé d'ouvrir à la chanson et la musique kabyles d'autres voies, de lui donner d'autres voix et de l'orienter vers d'autres horizons prometteurs, sans la dénaturer, il est plus que jamais une figure incontournable de la chanson kabyle. Avec son style musical à la fois ouvert sur le monde et profondément ancré dans la tradition musicale kabyle et son look à la hippy des sixties, il ne cesse de gagner l'estime de plus en plus de mélomanes qui, confiants, le soutiennent dans ses audaces musicales. Si l'exclusivité était réservée aux étudiants, le grand public a fini par découvrir Ali Amran avec son deuxième album intitulé, Xali Slimane (tonton Slimane). Des albums au forceps : mêmes sentiers battus dans lesquels pataugent en ce moment beaucoup de chanteurs kabyles qui, par manque de moyens pour les uns et de disponibilité pour les autres, ont fini par tomber dans la facilité : un synthé, une boîte à rythmes, et en avant la musique… Ali Amran, avec (un guitariste) Mourad T34, Hakim (le batteur) et Fatah (le bassiste) préfère la manière du grand Idir qui détient l'art de chanter, mais surtout celui de conter ses chansons sur scène à la manière de Francis Cabrel. Son premier album Amsebrid édité en 2003, par Izem à Tizi Ouzou. Chanté avec une voix rauque originale, simplement explosive. Dans cet album qui a séduit beaucoup de jeunes en Kabylie, l'album Amsebrid recèle des chansons d'une beauté extraordinaire à l'image de H'ureyya qui traite du thème de l'amour et où l'énonciateur s'interroge sur les contours de la relation amoureuse, relation qui concerne deux personnes certes, mais ne peut être séparée de l'environnement où elle évolue. C'est l'occasion pour le poète chanteur de revenir sur les dures conditions économiques et culturelles qui entravent l'évolution affective des jeunes. La fameuse rengaine, Xali Slimane (Tonton Slimane), diffusée en clip depuis 2005 via l'écran de BRTV. Le tube est une sorte de compromis entre un rythme léger qui reflète le marasme décrit dans le texte, à l'autre exemple celui de Bghigh ad kem-h'emmlegh (Je voudrais tellement t'aimer) le vœux d'aimer est interprété par Ali Amran de non-acquis, faute des tabous et conditions socioéconomiques qui ne le permettent pas, il reste alors à l'intimité d'un foyer pour aimer en plus ce n'est accepté que dans le cadre du mariage. Les autres titres sont : Anfet-iyi kan, Ma d awal, Kabylie, Ntenned, Ntezzi, Acawrar. Un album qui dégage une énergie positive dans l'ensemble, avec des textes décortiqués, tant que ça, la chanson kabyle se porte bien.