« Allez voir sur place », nous invite un citoyen à qui nous nous sommes ouverts à propos de la situation régnant dans certaines localités pendant ces derniers jours. « La réalité est tout autre », poursuit le même citoyen. Et de citer dix faits à l'appui de ses assertions. « A Aït Laâziz, (localité à 18 km au nord-est de Bouira), raconte notre interlocuteur, un jeune homme de 25 ans ayant eu une crise d'appendicite a été évacué dans une couverture jeudi dernier vers l'hôpital Mohamed Boudiaf. Ils étaient 40 se relayant par groupes de 10 pour effectuer le transport du malade vers l'hôpital. » « Ma sœur qui mourrait de faim avec ses cinq enfants, relate un autre citoyen, ont été transportés vers la ville de Bouira par le même moyen de transport rudimentaire. »Un troisième, tout en rendant un hommage appuyé au responsable local pour ses efforts consentis en direction des nécessiteux, brosse un tableau aussi sombre de la situation prévalant dans la commune d'Aomar où il est impossible, durant les premiers jours de neige, de se procurer un seul paquet de biscuits. Selon lui, la bonbonne de gaz se vend actuellement à 1200 DA dans la rue.Une femme sur le point d'accoucher à Oued El Bardi, localité à 9 km au sud de Bouira, aurait été évacuée ces jours-ci dans une remorque tirée par un tracteur, selon l'un des trois interlocuteurs qui, unanimes, font état de nombreux morts par hypothermie, mais là, sur ce point, les informations qu'ils rapportent avec aplomb sont puisées dans la presse. Selon la cellule de communication de la Sûreté de wilaya, il y a eu 4 décès enregistrés depuis le début des intempéries : 1 à Tikjda, mort de froid, 2 à Djebahia, morts par asphyxie au gaz, et 1 mort après une chute accidentelle aux 140 Logements à Bouira. Le premier était gardien de parking à Tikjda et était âgé de 41 ans. Les deux morts de Djebahia, mari et femme, étaient âgés respectivement de 75 et 45 ans et le quatrième, gardien à l'OPGI, âgé de 60 ans. Ce dernier, originaire de Aït Laâziz, allait être inhumé hier après-midi et le transport de la dépouille mortelle dans cette localité allait poser problème, selon un habitant de cette même localité, qui confirme nos informations à propos des deux personnes évacuées de Aït Laâziz avec des moyens de fortune. D'ailleurs, un chauffeur de fourgon qui assure le transport sur une partie de la ligne Bouira-Aït Laâziz apporte les mêmes témoignages. Pourquoi ne va-t-il pas plus loin avec son véhicule ? Mais, nous explique-t-il, parce que la chaussée dégagée dans un seul sens ne permet pas à deux voitures de se croiser. Comme la route qui monte et descend en deux fortes pentes sur 18 km pour franchir la montagne, le verglas n'arrange guère la circulation sur cette voie. Et de nous faire le récit abracadabrant de ce vieillard, qui souffrait de trop fortes douleurs, évacué dans un fourgon soutenu par des dizaines de bras pour l'empêcher de déraper.Qu'en est-il de Bordj Khreïs, Tagdit, Dirah, Guerrouma et Maâmoura, ces localités tout aussi enclavées et où la situation devait être pour le moins aussi cruelle ? Bordj Khreïs est pour le moment injoignable au téléphone autant que la cellule de crise. A Aït Laâziz, le problème du gaz butane a été résolu par beaucoup de citoyens en se tournant vers la forêt pour s'alimenter en bois, apprenons-nous auprès de cet habitant qui est resté bloqué chez lui pendant cinq jours, parce qu'il refusait de faire le déplacement à pied vers Bouira comme tant d'autres citoyens.