Hommes et animaux partagent le même espace ombragé à l'abri d'un soleil de plomb de ce mi-après-midi. Ici l'on se tarabuste quotidiennement du fait de la chaleur. «Aujourd'hui la température est supportable. Mais lors des dernières journées de canicule, l'air à l'intérieur des tentes était irrespirable d'autant plus que la tôle attise la chaleur», dit Walid maniant ses dominos entre ses doigts. Plus de six ans sont vécues ici par ces jeunes garçons à qui la climatisation est bien, une lointaine commodité. Derrière la bâche d'une tente fusent le son d'un ventilateur boiteux. «Ces appareils ne font que répandre la chaleur ambiante dans les tentes», déplore une vieille dame les paupières alourdies et la peau adipeuse de sueur. Et d'ajouter : «Très peu ceux qui en ont les moyens. Ceux qui ont de la famille ailleurs, rompent avec l'ennui et se délivrent un peu de cette étuve. Heureusement que nous avons l'eau. Les ordures qui sont jetées dehors attirent les moustiques et toutes sortes d'insectes nocturnes. C'est invivable», poursuit-elle. Les hangars abritent plus de 28 familles sinistrées, des victimes du tremblement de terre de Boumerdès. Ne quittant pas des yeux la table de jeux, Walid raconte : «Nous habitions à la Haut-ville (quartier de Tizi Ouzou) dans une maison de location. Nous l'avons quittée parce que le plafond s'est effondré. N'ayant pas où aller, ma famille s'est réfugiée dans ces entrepôts.» Décidément, nous n'avons rien à apprendre à ces gamins. Ils savent que leurs prochaines demeures sont les chalets qui sont en cours d'assemblage au centre de transit de Oued Falli, à quelques encablures de la ville de Tizi Ouzou. «J'ai vu à quoi ils ressemblent ces chalets. Trop exiguës pour des familles nombreuses comme les nôtres. La vraie solution est un appartement», atteste cet adolescent de 13 ans qui semble dépasser son âge. Samir, la trentaine passée, a grandi dans les baraquements de Oued Aïssi. Après leur recasement dans un chalet sur l'autre rive du bidonville, le jeune homme a décidé de quitter le camp pour venir s'installer ici. Dans cet espace d'un hectare environ, les liens sociaux se sont tissés à la faveur de cette misère commune, que partagent hommes et femmes. Samir s'est marié ici. «Faute de logement, je ne me suis marié que depuis 4 mois, alors que j'étais fiancé depuis 5 ans», dit-il, le sourire au coin. En effet, par la force des choses, nombreux sont les jeunes qui partagent la même misère se sont mariés dans ce camp. De son côté, la direction des transports s'est offerte ce terrain domanial pour la construction du futur siège de la direction de L'Etuto, l'entreprise de transport urbain. Le directeur des transports assure que ces familles sont prises en charge par la wilaya et elles seront relogées dans les chalets de Oued Falli avant la fin de l'année.