Les services de police de la sûreté de la wilaya d'Alger viennent de mettre la main sur un important réseau de trafic de cigarettes de marque Legend. Le coup de filet a permis la saisie de 5 conteneurs remplis de 172 450 cartouches de cette marque étrangère qui serait fabriquée « quelque part en Asie ». La marchandise en provenance d'Anvers, en Belgique, a été découverte le 16 décembre 2004 lors d'un contrôle effectué par les douaniers du port d'Alger. Les cartons contenant la marchandise prohibée étaient dissimulés derrière des lots d'éviers de cuisine, de céramique et d'imprimantes. « La disposition suspecte de la marchandise (non prohibée) devait inciter les douaniers à accentuer le contrôle ; » Les objets non prohibés étaient en petite quantité de manière à ce que la cigarette puisse occuper un maximum d'espace », a déclaré, hier, lors d'un point de presse, le chef de la brigade économique et financière (BEF) de la SWA, Abdelaziz Zanoun. Qualifié par les services de sécurité d'« important baron » activant dans la région algéroise, le propriétaire de cette marchandise, dont la valeur est de 18 milliards de centimes sur le marché de gros, a dû recourir à la « location » d'un registre du commerce d'une SARL appartenant à une tierce personne, celle-ci étant assistée, selon l'enquête, par un cogérant. « Louer des registres du commerce est un subterfuge auquel ont recours les trafiquants. C'est pour ne pas se mouiller », explique le patron de la BEF. La personne détentrice du registre du commerce, révèle le conférencier, a encaissé 50 000 DA pour les conteneurs de 20 pieds et 100 000 DA pour les conteneurs de 40 pieds. L'enquête a révélé aussi que le cogérant de la SARL qui a « négocié » la location du registre était « parfaitement » au courant de ce trafic. Présentés au parquet, le « cerveau » ainsi qu'un de ses « lieutenants » et le cogérant ont été placés sous mandat de dépôt par le magistrat instructeur. Le propriétaire de la SARL, « ignorant la nature de la marchandise importée », selon le commissaire principal Zanoun, est sous contrôle judiciaire. La « duperie » dont a fait l'objet ce dernier fera réagir l'officier qui a lancé : « Les services de police appellent les détenteurs de registre du commerce à refuser catégoriquement toute transaction avec des “opérateurs” fictifs. Dans des cas pareils, leur responsabilité devant la justice est pleinement assumée. » Outre Anvers, que les spécialistes considèrent comme une plaque tournante du trafic, la cigarette de marque Legend est acheminée aussi des pays subsahariens. Elle tend à s'imposer en « maîtresse » dans le circuit commercial du tabac en Algérie. Les consommateurs ne jurent désormais que par ce paquet rouge, à l'emballage parfait et portant l'effigie du célèbre aigle représentant les armoiries américaines. Son prix de détail ? A partir de 60 DA. Ce paquet porte la mention « made in UE » (fabriqué en Union européenne), mais sortirait de sordides manufactures en Asie et probablement en Afrique avec la bénédiction des géants mondiaux. Les multinationales sont en effet harcelées chez elles, ce qui les pousse à « délocaliser » dans les pays du Tiers-Monde. Résultat : la cigarette « autochtone », nonobstant sa dangerosité sur la santé du fumeur, fait face à un redoutable concurrent au niveau du marché local, notamment en Algérie. Exposée chez le buraliste au même titre que les marques locales, la Legend partage le même rayonnage avec d'autres marques étrangères, notamment américaines et françaises et qui ont pour nom Marlboro, Gold Seal et Gauloises. Contrairement au tabac fabriqué par la régie nationale SNTA, ces marques ne versent aucun centime d'impôt au Trésor. Selon les analystes financiers, la contrebande de la cigarette est aujourd'hui telle que le manque à gagner accusé par le Trésor tourne autour de 100 milliards de dinars. Les services de la gendarmerie ont déclaré, à plusieurs occasions, que la majorité du trafic se fait via les ports algériens.