A Collo, si, comme d'habitude le début réel de la saison estivale a été constaté à partir du 20 juillet, la clôture de fait a eu lieu dimanche dernier, soit le 8 août. Du coup, la haute saison s'est limitée à 20 jours au lieu de 30, aggravant la situation de l'économie touristique locale. Mais, le pire est que la tendance au ratage de la saison se confirme d'année en année alors que les responsables de la wilaya avancent le chiffre de 5 millions de touristes en 2009, que toute la Tunisie arrive difficilement à atteindre sur les douze mois de l'année. Ainsi, à Collo, pour la cinquième année consécutive, l'avenue Rouibah et la cité Chetti, où se concentre l'essentiel du parc hôtelier de la ville, étaient toujours en travaux avec gravats et poussières comme pot de réception. Du coup, les touristes, avant d'arriver aux hôtels ou chez les habitants d'accueil, doivent endurer les aléas de ruelles transformées, à coup de bulldozers, en champs de mines. Pour rester dans les mêmes quartiers, le non-nettoyage des berges et du lit de oued Essial est devenu habituel. Un oued qui rejette les déchets à même la plage de la Baie des Jeunes filles ! La seule précaution prise par les autorités locales est cette plaque interdisant la baignade à 50 m de part et d'autre du lit de l'oued. Une bêtise à ciel ouvert car on ne sait toujours pas par quelle méthode cette lisière a été calculée. Concession et occupation sauvage des plages
Alors qu'ailleurs la concession est en passe de devenir une exception, à Collo, il s'agit d'une mesure imposée depuis le chef-lieu de wilaya et à laquelle touristes et autochtones doivent s'y faire. Ainsi, de fait, la partie ouest de la Baie des Jeunes filles, soit Aïn Eddoula, s'est avérée fermée aux estivants. Du coup, la partie Est a enregistré le maximum de fréquentation. A cet afflux s'est ajoutée la cinquantaine d'exposants et d'agents de sécurité de la foire de Collo, qui n'avaient que ladite plage pour passer leurs nuits et faire leurs besoins. En effet, à l'inverse de toutes les directives, à Collo, les abris de plage se sont transformés en tentes où des familles passaient leurs nuits, que ce soit à la Baie des Jeunes filles ou à la plage de Teléza. Dans un total laisser-aller, des abris de plage ont été alimentés au réseau électrique pour les besoins de nuitées pas toujours innocentes. Une situation qui s'est répercutée sur l'hygiène et la sécurité des plages. Aïn Eddoula n'aura jamais été aussi mal entretenue que durant cette saison, de l'avis de tous les estivants.
La sécurité, une entrave plus qu'une facilitation
Cela nous amène à évoquer la question cruciale de la sécurité. Malheureusement, à Collo, l'irresponsabilité, comme une maladie contagieuse, a touché tous les secteurs engagés dans la préparation et la gestion de la saison estivale. Même sur la plage dite pilote de Aïn Laksseb, aucun commerce ouvert ne dispose de documents commerciaux légaux, sans parler des justificatifs d'occupation des terrains. Le cas de la plage Lebrarek est, lui aussi, édifiant de cette irresponsabilité. La plage, interdite par arrêté du wali à la baignade, est bondée. Ces baigneurs assumeront, certes, leur choix. Sauf que le stationnement de part et d'autre de la route nationale qui lie Collo à Skikda, à hauteur de cette plage, est autorisé alors qu'il est interdit dans plusieurs artères de la ville par mesure sécuritaire. Pire, les commerces informels à Lebrarek et Aïn Lakesab sont reliés au réseau de la Sonelgaz sans que cette dernière ni les services de sécurité ne réagissent pour mettre fin à ce piratage interdit aussi bien par les textes de l'entreprise que par les lois de la République. Au même moment, les sites fréquentés le soir par les familles sont ceux qui sont les moins éclairés tels que le port de pêche et la cité Chetti.
Une plage expérimentale de l'anarchie
Cette année la wilaya de Skikda a voulu créer une plage pilote à Collo. Le choix fut porté sur Aïn Lakssab, distante de la ville de 3 km. Dimanche dernier, à la clôture de fait de la saison, les travaux d'aménagement de cette plage étaient toujours en cours. Aucune tranche n'était livrée. Ainsi, à la place d'une plage pilote, les estivants ont eu droit à une plage expérimentale de l'anarchie et de l'informel. Le tourisme ne se limite pas à la partie hébergement. Cette année, à Collo, les habitants de la cité et les touristes ont eu droit, en guise d'animation, à un tournoi de pétanque. Pour le reste des sports, notamment ceux dits populaires, et pour les soirées artistiques, rien n'a été prévu. Les années précédentes, le manque de moyens financiers était avancé par les élus locaux pour justifier cette disette. Sauf que cette année, l'APC de Collo, qui ne trouve pas de sous pour payer des artistes locaux, a financé, et avec largesse, une partie du tournage d'un feuilleton produit par une boite privée «Antinea». Le pactole versé à cette boîte suffit pour financer au minimum 30 soirées. Heureusement que la direction de la culture de Skikda a délocalisé 3 activités prévues au chef-lieu de la wilaya. En fait, la saison à Collo a été clôturée par une animation d'un autre genre: les agents de sécurité de la foire, après avoir corrigé à coups de poing un adolescent, porteront de sérieux coups de couteau à l'abdomen d'un commerçant qui cherchait à s'interposer. Les vacanciers sont rentrés chez eux et les séquelles de cette autre saison marqueront encore l'économie touristique de la région, même après le départ des actuels responsables au niveau local et de wilaya. Cette année, même la très réservée chaîne unique de télévision n'a pu donner une image sereine de la préparation de la saison. Les faits étaient tellement criards, que même l'ENTV a fini par donner la vraie image de la préparation de la saison estivale à Collo. Tant mieux pour la ville, car seule la vérité est à même de fouetter les esprits.
Le chiffre des bêtisiers
Dans quelques jours, les services de la wilaya de Skikda publieront les chiffres officiels relatifs à cette saison. Comme d'habitude, la comptabilité des salons essaiera de maquiller la réalité du terrain. En effet, selon les responsables de la wilaya de Skikda, la région avait reçu l'été dernier 5 millions de visiteurs, alors qu'on sait que la saison écoulée s'est étalée du 20 juillet au 20 août, pas plus ; on insinue qu'en l'espace d'un mois, la wilaya a été visitée par des touristes dont le nombre est deux fois supérieur à celui que reçoit la Mecque durant le Hadj, lui aussi limité à un mois. Sauf qu'on ne sait toujours pas par quel miracle cet exploit a été possible à Skikda alors que l'Arabie saoudite s'en sort difficilement malgré les milliards de dollars de dépenses pour une seule campagne, les 20 000 agents de la garde civile, les milliers de tours-hôtels, les axes routiers et le plan de circulation modélisé, les aéroport de Djeddah et de Médine… Heureusement que le ridicule, même chiffré, ne tue pas !