Après cinq jours de violents affrontements entre l'armée nigériane et le groupuscule Boko Haram, dans quatre Etats du Nord, le calme semble enfin être revenu. Un calme survenu après que l'armée nigériane eut bombardé, jeudi matin, les quartiers abritant le groupuscule Boko Haram. Ben Shemang, correspondant de RFI à Abuja et correspondant de guerre, revient sur cette dramatique semaine. Plusieurs informations circulent en ce moment sur le groupuscule islamiste Boko Harem. De quoi s'agit-il exactement et qui sont ses membres ? Les membres de cette secte sont pour la plupart des étudiants, de jeunes chômeurs, des femmes analphabètes et d'innocents enfants qui ne savent pas vraiment ce qu'ils font. En fait, certaines femmes et certains enfants à Maiduguri (capitale de l'Etat de Borno), ne sont là que parce que leur époux ou leurs relations sont membres du Boko Harem. Ils sont emmenés de place en place pour assister aux meetings et suivre des enseignements religieux. Lorsqu'ils ont été découverts, beaucoup d'entre eux mouraient de faim. Ce qu'on a appris sur cette secte, c'est qu'elle prêche la haine. Boko Haram, nous a-t-on dit signifie « l'éducation occidentale est interdite ». Yousuf Mohamed semble être le leader incontesté des émeutiers, que savons-nous de lui ? Ce qu'on a pu apprendre, c'est qu'il connaît très bien la culture occidentale. Il parle un anglais parfait, a fait des études supérieures et possède une grande maison. Lorsque les soldats sont allés dans le campement de Boko Haram, ils ont aussi trouvé une clinique et une mosquée. Les activités du groupe sont restées longtemps secrètes. Je me rappelle cependant qu'il y a environ trois semaines, le gouverneur de l'Etat de Bauchi, Mallam Isa Yuguda, avait souligné le danger que représentait Boko Haram et avait appelé les citoyens de son Etat à être prudents. Une chaîne de télévision privée nigériane réussit alors à interviewer Mohammed Yusuf, qui avait déclaré son opposition au mode de vie occidental et à l'éducation occidentale. Les forces de sécurité nigérianes ont bombardé jeudi (hier) matin, les quartiers abritant Boko Haram. Quelles sont les premières réactions ? Il y a toujours un grand déploiement de troupes bien que la situation soit désormais plus calme. Nous attendons de voir si ce week-end sera calme après la prière du vendredi. Le président Umaru Musa Yar'Adua a ordonné de rester en alerte. Le porte-parole de l'armée nigériane, le brigadier général Chris Kolade a déclaré que l'armée contrôlait la situation, et le ministre de la police Ibrahim Lame prêche la tolérance. Certaines personnes pensent que la corruption et la mauvaise gestion du pays ont contribué à l'évolution de Boko Haram, qu'en pensez-vous ? Certes, il y a de la pauvreté, mais tout le monde ne mange pas dans les poubelles. Et oui, la corruption existe, mais la police et d'autres organismes luttent sérieusement contre la corruption dans ce pays. Beaucoup d'anciens hauts fonctionnaires sont jugés, certains ont été condamnés. Le gouvernement insiste sur le fait que toute personne possédant une preuve de corruption sur une autre peut joindre n'importe quelle commission anti-corruption. Tout au long des dix dernières années, le Nigéria a connu un bon nombre d'affrontements entre musulmans et chrétiens, à votre avis, quelle est la principale raison de ces conflits, et quelles sont les solutions ? Respect, respect, respect. Que chacun respecte les opinions, la religion, la culture, la couleur et la valeur de la vie de l'autre. Il existe de nombreux mariages entre chrétiens et musulmans au Nigeria. Ces familles ne se battent pas. Beaucoup de familles chrétiennes célèbrent les fêtes musulmanes, et vice-versa. On doit se respecter les uns les autres. Il ne faut pas compter sur une fin de l'Islam, du christianisme ou d'une autre religion au Nigeria. Nous devons les accepter pour vivre en paix.