Par ces temps de canicule à Souk Ahras, des centaines de jeunes adolescents privés de bronzette, pour des raisons multiples, se rabattent, chaque vendredi, sur les oueds pour assouvir ce désir ardent de nager et oublier, pour quelques heures, la monotonie et l'atmosphère maussade qui règnent en ville. On les voit chaque week-end, à Oued Djedra, aux sources du barrage de Aïn Dalia et ailleurs, s'adonner à des acrobaties périlleuses sans mesurer le risque qu'ils courent. Plonger depuis une hauteur de trois mètres et plus, explorer le fond d'un étang ou d'une rivière, retenir le souffle pendant plusieurs minutes sous l'eau ou s'adonner à des jeux dangereux dans ces lieux, qui échappent à tout contrôle, causent parfois l'irréparable. « Que voulez qu'on fasse dans une ville où l'on meurt d'ennui et où la température avoisine les 40° C à l'ombre », nous lance, tout de go, Mohamed, l'aîné du groupe. L'air plutôt jovial, Fouad nous résume son emploi du temps : « La khedma, la zedma (ni travail, ni débrouillardise) à Souk Ahras, le matin c'est le café, l'après-midi c'est l'oued et le soir c'est le zapping. » Même si des noyades sont enregistrées chaque année à Souk Ahras, de nombreux jeunes y trouvent un palliatif à la grande bleue et une échappatoire à une ville suffocante. A qui la faute ? A ces jeunes écoliers, lycéens, universitaires et autres jeunes hommes issus des quartiers défavorisés et qui, à défaut de pouvoir s'offrir une journée au bord de la mer, fuient la fournaise et jettent leurs corps dans la source d'eau la plus proche ? A leurs parents dont les bourses, déjà laminées par les dépenses de tous les jours, seront soumises à rude épreuve le mois du Ramadhan ? Souk-Ahras n'a jamais eu ses piscines, et pour cause, l'argent réservé à ce projet, annoncé dans les années 1990 avec fanfare par les pouvoirs publics, a été détourné, tout comme les autres enveloppes allouées aux structures de la DJS entre 1998 et 2004. Les auteurs du scandale sont des élus ou des hauts fonctionnaires qui se permettent les stations balnéaires de Charm Cheikh et les plages des îles grecques.