Elles sont devenues incollables en soufflés, charlottes, cakes… Les Algériennes se mettent à la cuisine européenne. Ustensiles, chaînes de télé et écoles de cuisine se sont multipliés pour les y initier. Histoire de réveiller les papilles des plus irréductibles. « Pour moi la cuisine européenne est synonyme de raffinement. Elle est facile à faire et peu coûteuse, contrairement à ce que l'on pourrait croire. » Malika, infirmière retraitée et cordon bleu avéré, a testé les cours de cuisine française, anglaise ou italienne… une véritable mode ! Déjà dans les années 60, les Algériennes n'éprouvaient aucun complexe à explorer la cuisine française tout en gardant un regard fier sur la cuisine algérienne et ses variantes. Une coupure s'est opérée dans les années 80, à l'époque où la tendance était à la renaissance des produits du terroir, en réaction à la disette de l'époque. Et aux recettes de cuisine ont suivi les émissions de télé (Chez Martha, sur Fatafeat ou Cuisine TV, visible via NileSat), livres et magazines (on trouve le très luxueux Régal chez les marchands de journaux qui ramènent la presse étrangère) et un nombre impressionnant d'ustensiles de cuisine… « Avant, j'avais beaucoup de mal à faire des charlottes à la crème. Aujourd'hui, je trouve des ustensiles qui me permettent de les réaliser sans tracas ! », poursuit Malika. L'envie de cuisiner à l'européenne a entraîné la création de plusieurs écoles de cuisine, qui explorent la viennoiserie, la pâtisserie, et même la chocolaterie comme à Réghaïa (près de la station de taxi). Par ailleurs, l'école de formation professionnelle spécialisée en pâtisserie et cuisine de Mme Benberim offre des formations complètes afin d'arriver, presque, « au même niveau qu'un vrai chef ». « Le fait d'intégrer une école de cuisine est surtout lié à l'envie de faire soi-même, explique Sofia, fraîchement diplômée de l'école Benberim. Ayant beaucoup voyagé et goûté aux différents plats, j'ai toujours voulu cuisiner des plats originaux qui pourraient améliorer nos habitudes alimentaires et alléger la quantité de gras. » Et d'ajouter : « J'ai appris non seulement à mélanger les saveurs, mais aussi à donner un joli visuel à mes plats. Une caractéristique non négligeable dans la cuisine occidentale ! » Les grands chefs deviennent des stars médiatiques, une matinée passée derrière les fourneaux est désormais le nec plus ultra. Livres, sites, blogs et forums culinaires se multiplient, essayant de répondre à une demande sans cesse en augmentation. Les Algériennes ne se gênent plus pour copier, au détail près, la recette du fameux pavé de crevette du jeune Anglais Jimmy sur la chaîne de cuisine Fatafeat, ou encore le pudding de Martha ! Le chef décline les saveurs créatives de la cuisine occidentale devant les papilles gustatives de la ménagère déjà aux fourneaux ou affairée à rassembler les ustensiles sur le plan de travail, avant que l'émission ne commence. « Je suis une accro de Fatafeat, avoue Nasséria, étudiante en hôtellerie. Je cuisine tout à la manière de Jimmy. Il nous aide à choisir les produits et nous inonde d'explications. De ce fait, je réussis toujours mon cake aux olives ou la cuisson de mon poulet farcie aux champignons de Paris. La cuisine européenne ne fait pas d'ombre à la cuisine traditionnelle, il faut varier les plaisirs, car cuisiner universel, c'est faire voyager les sens. »