Poursuivi pour pratique de sorcellerie, cet imam prétend guérir les malades qui sollicitent ses dons. Nullement impressionné par l'austérité des lieux, Z. Abdelkader, âgé de 40 ans, s'avance à la barre des accusés d'un pas alerte. Son regard balaie furtivement les membres de la cour d'appel avant de se fixer sur le bout de ses chaussures. Ce prévenu, un escogriffe aux yeux verts et au visage en lame de couteau, qui n'a pas la tête de l'emploi, est poursuivi pour pratique de sorcellerie. Selon l'arrêt de renvoi, le 22 juin dernier, les enquêteurs de la police judiciaire ont opéré une descente dans son domicile, dans le quartier populeux de St Pierre, où il traîne sa réputation comme un lépreux sa clochette. Un véritable arsenal utilisé pour le besoin de ses agissements a été découvert sur les lieux. Les deux jeunes femmes, surprises chez cet apprenti sorcier, imam de surcroît, se sont avérées n'être, en fait, que de fidèles clientes. Ironie du sort, elles comparaissaient à ses côtés, le matin du 22 août dernier, premier jour du mois de carême, en qualité de témoins à charge. L'une d'elles, le genre de femme sans forme, épuisée par les maternités et les travaux ménagers, qui semble n'avoir connu que la pauvreté, les économies sordides et les expédients, glapit sans être invitée : « Il m'a promis un mari pour ma fille ! » Sa voix a grincé dans la salle d'audience comme une craie sur une ardoise, et le juge l'a aussitôt apostrophée. « Vous ne parlez que lorsque je vous y invite ». Puis s'adressant au principal accusé, il demande : « Qu'avez- vous à dire pour votre défense ? » Z. Abdelkader souffle dans ses joues avant d'ergoter d'un air canaille : « Mes disciples m'attendent pour le mois sacré de Ramadhan, Monsieur le juge. Il est de mon devoir de leur enseigner les préceptes du jeûne. Je suis un imam ! J'implore Dieu Tout-Puissant pour la guérison de tous les malades qui sollicitent mes dons. » Sa réplique interloque le plus imperturbable des présents. Quelque peu décontenancé, le président de la cour rétorque : « C'est vous le grand malade ! » Le représentant du ministère public a requis l'aggravation de la peine à son encontre. Notons que l'inculpé a été condamné à six mois de prison ferme en première instance par le tribunal correctionnel de la cité Djamel. L'avocat de la défense a plaidé le bénéfice de l'acquittement. Au terme des délibérations, la cour d'appel a maintenu la peine initiale.