Chaque année, 7000 nouveaux cas de cancer du sein sont diagnostiqués en Algérie. Une journée parlementaire a été justement consacrée à ce thème, hier à l'APN, par la commission de santé, affaires sociales, travail et formation professionnelle, en collaboration avec l'association El Amel d'aide aux patients atteints du cancer. Un état des lieux sur la maladie et son évolution a été présenté dans sa globalité, notamment en matière de prise en charge, laquelle est jugée insuffisante. D'ailleurs, la situation a été bien résumée par la projection d'un court métrage sur les patientes prises en charge au niveau du Centre Pierre et Marie Curie (CPMC) et hébergées à la maison de l'association El Amel, à Belcourt. Le professeur Bouzid, chef du service oncologie au CPMC, plaide pour la mise en place d'un plan national de lutte contre le cancer. Une décision qui doit, selon lui, être prise par les hautes autorités du pays car il s'agit d'un geste politique. Il a souligné que « les circuits et les moyens de traitement sont inaccessibles dans des délais acceptables ; 80% des cas arrivent au stade métastatique ». Pour le Pr Bouzid, il est urgent de procéder à une réorganisation de la prise en charge des cancéreux en Algérie, en y mettant les moyens nécessaires. Il déplore l'inexistence de dépistage de masse, de compétence nationale en mammographie de dépistage, bien que le parc de mammographes soit suffisant, mais non soumis à accréditation et contrôle de qualité validé par l'Etat. Pour pallier cette situation, il est urgent, a-t-il recommandé, d'actualiser la législation concernant les médicaments du tableau B pour lutter contre la douleur, assurer des soins palliatifs et permettre aux malades de terminer leurs jours dans la dignité et actualiser la nomenclature de tarification des actes. Il est aussi question de la mise en place d'un institut national du cancer (qui ne sera pas un centre de soins), de l'instauration de la vaccination contre certains cancers, comme celui du col de l'utérus. Les actions qui doivent être menées à court terme concernent, poursuit-il, la création de services d'oncologie dans les différentes wilayas, l'introduction des cancéreux sur les listes des malades chroniques pour bénéficier du tiers payant, la réalisation de structures conventionnées avec la sécurité sociale et l'implication de tous les cancéreux en organisant une conférence nationale. Des propositions qui ne semblent pas les bienvenues pour Saïd Barkat, le ministre de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière. Pour lui, le cancer est une maladie comme toutes les autres. Les moyens de prise en charge sont aujourd'hui disponibles que ce soit la chirurgie, la chimiothérapie ou la radiothérapie. « Les centres de soins existent et 17 autres sont en construction. Nous allons améliorer la situation des malades cancéreux », a-t-il expliqué, mais sans préciser comment. Le projet des 17 centres existe depuis plus 2 ans, mais aucun n'est encore fonctionnel. Les malades attendent toujours des rendez-vous de chimiothérapie et de radiothérapie sur des délais dépassant les six mois après l'intervention chirurgicale. Contrairement à M. Barkat qui n'a fait que rappeler l'existence du projet des 17 centres d'oncologie, le ministre de l'Emploi et de la Sécurité sociale, Tayeb Louh, n'a pas manqué de signaler que son secteur œuvre dans la lutte contre les maladies chroniques en initiant des actions concrètes inscrites dans la politique engagée dans son secteur. Il a annoncé la création de 4 centres de radiologie, dont un, programmé pour le dépistage gratuit du cancer du sein pour toutes les femmes âgées de 40 ans et plus, est en préparation. L'opération sera lancée à partir de janvier 2010, en attendant la formation spécifique du personnel, notamment les radiologues spécialisés en mammographie. M. Louh a par ailleurs signalé que la contractualisation avec les hôpitaux est en phase finale, mais il réfute tout conventionnement avec des établissements privés pour la prise en charge des cancers : « Cette maladie exige des fonds importants ; elle ne peut être prise en charge dans des établissements privés. Il n'en n'est pas question. La lutte contre le cancer doit se faire dans les structures publiques. » Quant à l'actualisation de la nomenclature de la tarification des actes médicaux, M. Louh signale qu'elle doit être définie « sur la base d'un tarif de responsabilité de la sécurité sociale. Un seuil permettant à la sécurité sociale de rembourser ». Pour la présidente de l'association El Amel, Mme Kettab, cette journée a pour objectif principal d'informer et de sensibiliser les politiques sur les cancers qui font ravage dans notre pays, notamment le cancer du sein. D'ailleurs, la caravane El Amel, initiée dans le cadre de la campagne de sensibilisation et d'information sur le cancer du sein, a commencé son périple, hier, à partir d'Alger ; la première ville qui l'accueillera est Djelfa, puis elle sillonnera le Sud en passant par Laghouat et Ghardaïa.