Sondage "Brahim Dahmani-2024": l'APS publie la liste des athlètes proposés pour les différents prix    Ghaza: le bilan de l'agression sioniste s'alourdit à 43.985 martyrs et 104.092 blessés    Attaf reçoit un appel téléphonique de son homologue iranien    Liban: 3 544 martyrs et 15 036 blessés depuis le début de l'agression sioniste    Les ministres nommés ont pris leurs fonctions    L'Algérie met l'accent sur l'innovation et le soutien aux jeunes entrepreneurs    Le potentiel, considérable, de la croissance des exportations hors hydrocarbures mis en avant    Bendjama convoque le Conseil de sécurité aux actes au Moyen-Orient    La méthode Michel Barnier    Un pied dans la tombe et il veut emmener le reste d'entre nous avec lui    Plus de 300 milliards de cts de factures impayées détenues par ses abonnés    USM Alger-ORAPA United : Le Gambien Lamin N Jammeh au sifflet    Les 21 qualifiés pour la phase finale pratiquement connus    CAN-2025 U20 (Zone Unaf) : L'Algérie et l'Egypte se neutralisent    Ouverture du 8e Salon international de la récupération et de la valorisation des déchets    Mise en service d'une unité de dépistage médical scolaire et de suivi des élèves    Saisie de 3,5 g de cocaïne, deux arrestations à Djdiouia    Un travail de lexicologues, une oeuvre de référence    Appel à porter plus d'intérêt au contenu des journaux publiés durant la période coloniale    Quand le hijab rencontre le kimono vintage    Semaine européenne de l'hydrogène à Bruxelles: Sonatrach examine les opportunités de coopération algéro-allemande    Lotfi Boudjemaa prend ses fonctions à la tête du ministère de la Justice    Mohamed Boukhari prend ses fonctions de ministre du Commerce extérieur et de la Promotion des exportations    Krikou prend ses fonctions de ministre des Relations avec le Parlement    Guelma et Souk Ahras commémorent le 70ème anniversaire de la mort du chahid Badji Mokhtar    Touggourt commémore le 67è anniversaire de la mort en martyrs de Mohamed Amrane Boulifa et Lazhari Tounsi    Yacine El-Mahdi Oualid prend ses fonctions de ministre de la Formation et de l'Enseignement professionnels    Le 8e Festival international de l'art contemporain du 26 novembre au 7 décembre à Alger    Youcef Cherfa prend ses fonctions de ministre de l'Agriculture, du Développement rural et de la Pêche    Pas moins de 93% des pêcheurs affiliés à la sécurité sociale    Olympiades arabes de mathématiques: l'Algérie décroche la 2e place    Cybercriminalité: signature d'un accord de coopération entre AFRIPOL et Kaspersky    «Dynamiser les investissements pour un développement global»    Le point de départ d'une nouvelle étape    Foot/ CAN-2025 (Qualifications/ Gr.E - 6e et dernière journée) : l'Algérie domine le Libéria (5-1)    Judo: le Collège Technique national les 22-23 novembre à Oran    L'Algérie happée par le maelström malien    Un jour ou l'autre.    En Algérie, la Cour constitutionnelle double, sans convaincre, le nombre de votants à la présidentielle    Tunisie. Une élection sans opposition pour Kaïs Saïed    Algérie : l'inquiétant fossé entre le régime et la population    BOUSBAA بوصبع : VICTIME OU COUPABLE ?    Des casernes au parlement : Naviguer les difficiles chemins de la gouvernance civile en Algérie    Les larmes de Imane    Algérie assoiffée : Une nation riche en pétrole, perdue dans le désert de ses priorités    Prise de Position : Solidarité avec l'entraîneur Belmadi malgré l'échec    Suite à la rumeur faisant état de 5 décès pour manque d'oxygène: L'EHU dément et installe une cellule de crise    Pôle urbain Ahmed Zabana: Ouverture prochaine d'une classe pour enfants trisomiques    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Appel à un débat national sur le système de santé
Publié dans El Watan le 29 - 07 - 2012

Moi-même, à l'occasion de cet anniversaire, j'ai contribué dans Le Quotidien d'Oran (5, 6, 7 et 12 mars dernier) par une étude sur «le bilan du système de santé et les perspectives», de même que j'ai donné le 3 juillet une conférence sur le même thème à l'occasion d'une journée d'étude organisée par le GRAS (laboratoire de recherche en anthropologie de santé de l'université d'Oran), «Sciences sociales et santé : 50 ans après». Même si une hirondelle ne fait pas le printemps, j'ose espérer qu'il s'agit là des prémices d'un débat national sur la santé. D'ailleurs, chacun de nous conclut sa contribution sur cette revendication. Cependant, s'il y a une communauté de vue sur la situation actuelle de notre système de santé, les approches dans l'analyse sont plus nuancées. Permettez-moi d'une manière succincte de soulever quelques remarques.
Tout d'abord, nul ne doit ignorer, et particulièrement les jeunes générations, que le colonialisme a exclu les Algériens du système de santé, ce qui est dans sa nature. A l'indépendance, la situation sanitaire dramatique de la population algérienne, et particulièrement dans les zones rurales, s'exprimait par les chiffres suivants : espérance de vie de 50 ans et une mortalité infantile à 180/1000, dans un désert médical. Des mesures énergiques sont prises par le premier gouvernement, lesquelles se traduiront, 10 ans après, par une éradication du paludisme, la généralisation de la vaccination pour les enfants et la facilitation de l'accès aux soins, notamment grâce aux brigades mobiles.
La loi n° 73-65 du 26 décembre 1973, qui portant institution de la médecine gratuite dans les secteurs de santé, constitue l'événement majeur dans le système de santé de ces 50 années d'indépendance. Toute citoyenne et tout citoyen pouvaient accéder aux soins nécessités par son état de santé. Le financement était réparti essentiellement entre la CNAS et l'Etat. La participation des ménages était infime. Et c'est dans cette participation symbolique des ménages que résidait l'esprit de la loi. La CNAS, dont le remboursement des soins et des médicaments représentait une partie infime de ses dépenses, contribuait au financement par une participation forfaitaire. Par contre, c'est le transfert abusif des malades à l'étranger qui grevait ses dépenses.
En toute objectivité, la décision de la gratuité des soins, avec laquelle on peut ne pas être d'accord sur le plan idéologique, associée à la «démocratisation de l'enseignement supérieur», aura eu des résultats positifs en 15 ans, d'autant plus qu'elle s'est déroulée dans un contexte favorable, fait de recouvrement de droit sur le pétrole, une croissance économique élevée et de distribution équilibrée des richesses. Aussi, des progrès importants étaient enregistrés au niveau de l'emploi, de l'éducation et la formation et des logements. La DNS passe de 1,6% en 1973 à 5,5% en 1988. Le nombre de lits passe de 42 500 à 62 000 en 1987. Le nombre de médecins passe de 6700 en 1979 à 19 500 en 1988. Enfin, l'on note une éradication de certaines maladies transmissibles, un recul de la mortalité infantile et un allongement de l'espérance de vie. Cependant à la fin des années 1980, ce système commençait à s'essouffler sous la poussée démographique, la transition épidémiologique et la baisse des ressources financières du pays. Fallait-il bannir ce système ou le reformer pour l'adapter ?
Aucun débat national n'a eu lieu pour répondre à cette question. En janvier 1990, un rapport d'une commission intersectorielle sous l'égide du ministère de la Santé énonce les insuffisances ayant abouti à «la désarticulation du système de santé». Les pouvoirs publics expliquaient cette dégradation du système de santé par la gratuité des soins, les injonctions des organismes financiers internationaux ou encore le manque de ressources financières. Ces explications ont conduit à un certain fatalisme induisant une inertie. Une fois de plus, aucun débat national n'est organisé. Dix années après, en mai 2001, une autre commission du ministère de la Santé souligne dans son rapport «l'accumulation des problèmes depuis 1980, conduisant à une destruction progressive du système de santé». La DNS baisse à 3,6% en 2001 et la DSH est réduite à 58 dollars en 2001. Le budget de la santé n'est plus que de 3,8% du budget global en 2002. Ce qui est important à noter, c'est que la dépense des ménages a augmenté à 39,4% en 2000.
Dans les années 1990, le secteur de la santé est ouvert au privé, le marché du médicament est libéré et le «temps complémentaire» est autorisé pour les hospitalo-universitaires. Malheureusement, l'on ne peut que constater, 20 ans après, que ces 3 décisions n'auront nullement eu les effets escomptés sur le système de santé.
Le secteur privé va évoluer pour lui-même comme un système à part et non complémentaire du secteur public. Il n'est saisi ni en termes d'objectifs, ni en termes de programmation et ni en termes d'évaluation et de contrôle.
La libéralisation du marché des médicaments n'a permis ni une plus grande disponibilité des médicaments essentiels ou des formes génériques, ni une réduction du coût unitaire.Le temps complémentaire a profité au secteur privé et contribué à une désertion des services hospitaliers souvent dans des conditions, malheureusement, condamnables par la déontologie et l'éthique.
Quand, enfin, en 2001, le gouvernement a inscrit dans son programme la santé, il s'agira plus d'une réforme hospitalière que d'une refonte profonde du système de santé. Et la commission installée, à cet effet, dont le travail est à saluer, a conclu dans son rapport en 2003 que «la réforme hospitalière doit s'inscrire dans le cadre d'une politique globale de la santé».
A cette période aussi, aucun débat national n'est lancé afin de permettre une mobilisation autour des recommandations de ladite commission. Actuellement, la crise que connaît le système de santé est grave, mais il ne s'agit ni d'un effondrement du système de santé ni que les hôpitaux soient des mouroirs. D'abord, l'on note une amélioration des indices économiques de santé : la DNS à 5,79 (2009) et la DSH à 267 dollars (2009), le budget de la santé est de 405 M de dinars en 2012 (11,7% du budget global). Les hôpitaux publics absorbent plus de 70% des patients et font un travail remarquable, mais cela ne peut masquer la désarticulation du système de santé par le manque de hiérarchisation, de réseaux et d'une carte sanitaire rationnelle.
La pénurie récurrente des médicaments essentiels, l'anarchie régnant au niveau de l'importation et de la distribution.
L'accès de plus en plus difficile aux soins pour les catégories sociales les plus vulnérables. Enfin, un financement même s'il est en nette augmentation n'est pas conçu dans le cadre d'une politique globale de la santé.
Ne pouvant ainsi participer à la relance du système, d'autant plus que ni l'efficience n'est promue ni le gaspillage n'est banni. On ne peut plus à ce stade de désarticulation de notre système de santé se contenter de déclarations d'intention, de programmes purement techniques et d'anathèmes des uns contre les autres tenant lieu de débat.
Il est temps d'entamer un débat national sur la santé. Un système de santé n'est pas seulement un problème technique, mais un problème politique s'inscrivant dans le cadre d'un projet de société. Toutes les questions doivent être soulevées sans tabou, l'on ne peut faire l'économie d'aucune.
Quel système de santé ? Un système qui permet la protection de la santé de la population et sa prise en charge quand elle en a besoin, tout en sachant que l'on ne peut offrir les mêmes prestations que les pays nantis qui dépendent de 30 à 100 fois plus pour leur DSH que notre pays et qu'il n'y a aucun pays dans le monde, même les plus nantis, qui peut assurer une CMU à 100% ? Que l'on ne peut s'offrir un système de santé que celui dont on a les moyens financiers pour le soutenir, non seulement à court, mais aussi à long terme.
Pour cela, l'on ne peut faire l'économie du calcul du rapport coût /efficacité pour chaque technique et chaque molécule. L'étude du rapport coût/efficacité, notamment pour les médicaments, est une des bases de l'efficience, car connaissant toute la puissance des laboratoires, dont souvent malheureusement les prescripteurs deviennent des otages et risquent de dicter la politique du médicament, comme l'a souligné le Pr Chaoui dans une de ses contributions. Le médicament étant un produit stratégique pour la santé de la population, l'Etat se doit d'être la partie essentielle dans la régulation du marché, de l'importation et de la distribution. C'est aussi cela l'efficience. Que l'on ne peut faire l'économie d'un débat sur le budget, passant ainsi à la budgétisation par activité et non par structure, d'où la nécessité de l'application de la contractualisation.
Qu'on doit absolument aller vers la régionalisation. Ainsi, la région sanitaire émergera en tant que niveau de planification, d'organisation, d'animation et de contrôle de la politique de santé au plan régional.
Mettre en place l'intersectorialité qui donnera une dimension stratégique d'efficacité du système de santé.
C'est à mon sens les quelques questions qui sont essentielles à débattre pour ériger notre système de santé.
Le débat national sur la santé, auquel nous appelons de tous nos vœux depuis 30 ans, ne doit pas prendre la forme d'assises-alibis, devenant un lieu de grande foire plutôt qu'un lieu propice à la réflexion.
Ce débat se doit :
– d'être démocratique, regroupant l'ensemble des professionnels de la santé, des sociétés savantes, de la société civile, des économistes de la santé, anthropologues de la santé, sociologues, etc. ;
– doit se situer au-dessus des considérations politiques ou idéologiques, car la santé de par ses dimensions sociale et humaine est un facteur de cohésion sociale. D'ailleurs, les sociétés modernes actuellement rangent la santé parmi les quatre valeurs qui les fondent avec l'emploi, la sécurité et le développement durable. C'est pourquoi elles proclament que la protection de la santé de la population constitue une mission régalienne de l'Etat ;
– les participants au débat doivent absolument se départir de l'esprit de rente et du conservatisme. Ce débat doit être basé sur les réalités d'aujourd'hui, structurant sa transformation dans une perspective claire et transparente.

Farouk Mohammed Brahim : professeur de chirurgie cancerologique CHU Oran


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.